9 novembre 2024
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Algérie : Le cri des vivants et le silence des morts

REGARD

Algérie : Le cri des vivants et le silence des morts

L’implication de l’armée dans les affaires politiques n’est pas de bon augure pour la République.

« Le silence face au mal est en soi le mal, Dieu ne nous considérera pas comme innocent. Ne pas parler, c’est parler. Ne pas agir, c’est agir », nous dit Dietrich Bonhoeffer.

Un bref rappel historique est édifiant. 1830, les troupes françaises débarquent à Alger. 1945, massacres des manifestants pacifiques à Sétif et à Guelma. 1954, déclenchement de la lutte armée en vue de la libération du pays. 1962, l’Algérie accède à son indépendance, les troupes françaises quittent le pays,

L’armée nationale algérienne voit le jour. 1992, coup d’Etat militaire, arrêt du processus électoral, guerre civile fratricide. 1999, arrivée au pouvoir de Bouteflika à la tête du pays. 2001, le terrorisme se mondialise. 2004, hausse du prix du baril de pétrole et augmentation spectaculaire des recettes en devises. 2007, le président de la république engage un plan de relance de l’économie à partir des dépenses publiques. C’est le printemps des grands travaux.

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L’abeille de la corruption vient d’entrer dans le masque du BTPH. C’est la course à l’argent facile. Le pilotage automatique de l’avion Algérie est actionné.

2019, soulèvement spontané de nature pacifique sur tout le territoire national.

Ce sont-là des repères clés de l’histoire de l’Algérie contemporaine. «Une nation qui oublie son passé est condamnée à le revivre». Sommes-nous devenus amnésiques ? Nous oublions nos morts, nos vivants, nos enfants. Nous n’en tirons pas les enseignements du passé, nous refaisons les mêmes erreurs.

«Quand on a un marteau dans la tête, on voit tous les problèmes sous forme d’un clou ».

Nous n’apportons pas de solutions à nos problèmes, nous en créons d’autres. «Tout clou qui dépasse interpelle le marteau». Nous nous entêtons à reproduire à l’infini les schémas de pensée qui ont fait la preuve de leur inefficacité.

Albert Einstein nous a pourtant appris qu’ »un problème créé ne peut être résolu en réfléchissant de la même manière ». Sommes-nous en présence d’un consensus social pour un suicide collectif ? Une certitude, « le suicide est la dernière crise d’une maladie morale » nous dit Honoré Balzac.. Nous refaisons à l’infini les mêmes erreurs, Alors, à quoi bon la lumière du soleil si on garde les yeux fermés ?

Sommes-nous en présence d’un consensus social pour un suicide collectif ? Sommes-nous condamnés à nous entretuer ?

« Nous ne sommes pas un pays de consensus mais un pays en proie à une sorte d’incessante guerre civile ». Nous sommes habités par des démons et nous faisons appel à des charlatans d’un autre âge et d’une autre planète pour nous extirper le mal qui nous ronge jusque dans nos entrailles.

Un inventaire des lieux s’impose. Il n’y a pas d’homme providentiel. Le dernier prophète est mort. Tous les souverains qui se sont succédé à la tête des peuples ne sont que des imposteurs. La souveraineté appartient au peuple.

Les Occidentaux l’ont compris et ils en n’ont tirés des institutions crédibles. La loi est au-dessus de tous et nul n’est censé ignorer la loi telle est leur devise. Ils se portent bien. Ils vivent paisiblement et confortablement en pillant nos richesses et en protégeant leurs serviteurs locaux qui leurs servent de relais. C’est l’esclave qui fait le maître. Le mal, il ne faut pas le chercher ailleurs, il est en chacun de nous.

Avant de vouloir changer les choses, il faut changer soi-même. Et ce n’est pas une sinécure. C’est une œuvre qui exige sacrifice et abnégation. La spécificité de la société algérienne, c’est qu’elle ne permet pas aux forces de s’auto-transformer, de s’autoréguler, de s’accroître.

L’intervention de l’armée dans le champ politique remet sans cesse à plus tard le processus démocratique. L’exercice du pouvoir par les militaires (ou les méthodes militaristes) s’est traduit le plus souvent par une concentration des pouvoirs et des ressources, une irresponsabilité dans la gestion de l’économie et de la société, une violation des droits de l’homme, une restriction des libertés publiques et une incapacité à sortir le pays du sous-développement économique et social dans lequel il baigne depuis cinquante ans. Un Etat omniprésent, omnipotent, monopolisant les activités, concentrant les ressources et décidant de leurs destinations ayant fait la preuve de son incapacité de créer des emplois productifs durables condamnant la société à une mort certaine.

L’Algérie s’est engagée résolument dans un processus accéléré de déperdition des valeurs à l’issue duquel les besoins de base de la population (se nourrir, se soigner, se vêtir, s’instruire) ne seront plus satisfaits par des services encadrés par la loi mais livrés à des réseaux mafieux.

Avec la baisse drastique du prix du baril de pétrole et l’épuisement des gisements, le seul palliatif  de l’Etat, c’est un endettement interne sans contrepartie productive ?

A défaut de créer des richesses hors hydrocarbures, il imprime des billets de banque. Il crée l’illusion. C’est un prestidigitateur devant un public infantile. Il feint d’ignorer que la richesse la plus importante de tout pays, c’est le travail de ses habitants, leurs aptitudes, leurs expériences, leurs facultés d’adaptation, leurs comportements, leur sens de l’effort et leur santé mentale et physique.

C’est pour avoir nié cette évidence que des nations disparaissent au profit d’autres plus performantes, plus dynamiques et plus clairvoyantes. Pour des jeunes frustrés et désespérés, humiliés et brimés par des parents narcissiques, déçus par la politique, écœurés par le sport, n’ont pour toute activité que la recherche d’un emploi qui leur procure une certaine dignité. Ils ont conscience que le monde qui les entoure est une jungle, il y a des lions et des renards.

En Europe et au Canada, « tu gagneras ton pain à la sueur de ton front », tu es un lion parmi les lions. Chez toi en Algérie, « tu mangeras du pain à la souplesse de ton échine », tu es un renard parmi les renards.

Il ne ressemble pas à ses aînés qui ont courbé l’échine. Ils sont intelligents. Ils ne sont pas dupes. Ils ne veulent pas un changement de visage mais un changement de système « tetnahaw ga3 ». Leur force réside dans leur union « khaoua khaoua ». Leur mot d’ordre est « salmya salmya ». Leur objectif, « libérez l’Algérie ».

Ils ont la foi en un Dieu unique. Contrairement aux gens du pouvoir, ils craignent le jugement dernier. Ils sont propres. Ils n’ont rien à se reprocher. Ils comptent sur leurs propres efforts pour gagner honnêtement.

Ils sont jeunes ; le pouvoir est vieux. On frappe à la porte, l’âme s’agite. La mort est proche, c’est la fin des illusions, l’heure est à la vérité.

Auteur
Dr A. Boumezrag

 




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