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Algérie : un pouvoir hors sol coupé du peuple

REGARD

Algérie : un pouvoir hors sol coupé du peuple

En Algérie, la réalité dépasse la fiction. Depuis plusieurs mois, tous les soirs, nous sommes scotchés à nos canapés, observant scrupuleusement les péripéties d’une téléréalité de mauvais goût. Un insipide film où le cauchemar le dispute au ridicule.

Certaines scènes hilarantes nous rappellent des répliques de films westerns digne de ceux tournés par Sergio Léone, d’autres, plutôt tristes et pathétiques, nous font plonger dans les méandres de l’histoire des pratiques tyranniques et machiavéliques ayant secoué la société humaine dans un passé récent et ancien.

Depuis 1962, nous n’avons jamais eu un véritable président. Par ailleurs, ce qui n’est un secret pour personne, cette année correspond à la naissance d’un néocolonialisme. Cela explique le slogan que criaient les manifestants depuis le début : le peuple veut l’indépendance. Les richesses du pays sont devenues le butin que se partageaient les cadres de l’armée des frontières, leurs sbires ainsi que leurs serviteurs. 

Pour maintenir une paix sociale, on a créé une police politique chargée de liquider physiquement tout opposant au nouvel ordre établi. Aussi, on a mis en place un système rentier permettant de corrompre tout citoyen susceptible de se révolter. On attribuait des pensions à des anciens combattants de l’ALN et même à ceux qui ne l’étaient pas (selon M. Bougouba les faux moudjahidines constituent 80 % des effectifs de l’ONM), alors que l’indépendance du pays a été arrachée grâce au peuple dans toutes ses composantes, de la femme au foyer jusqu’au cadre supérieur de l’époque. 

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Rappelons que durant la révolution, les hommes et les femmes ayant été mobilisés dans les maquis percevaient un salaire (voir les résolutions du congrès de la Soummam), ce qui n’était pas le cas des autres citoyens. Si on regarde ce qui se passe dans les autres pays concernant cette question, on remarquera que les anciens combattants ne sont pas indemnisés par l’état. Ils ont droit à une médaille symbolisant la reconnaissance de la nation pour leur engagement dans la lutte armée, en revanche, ceux qui étaient victimes d’une blessure leur ayant causé un handicap, dans ces cas de figure l’état leur verse une pension. Ce qui parait censé et raisonnable. 

Mais, ce pouvoir a ses raisons que la raison ignore. En agissant ainsi, non seulement il arrivait à tuer dans l’œuf toute révolte populaire, mais il a créé également une sorte de caste sociale à sa merci, mobilisable à sa guise et lui permettant de s’octroyer une pseudo-légitimité populaire. Ces faux moudjahidines et une multitude d’opportunistes enrôlés au sein du FLN dont il ne restait que le nom de celui qui avait fait la révolution sont devenus les tentacules du système. En démocratie, un parti politique représente une partie de la population auprès du pouvoir législatif. Or, en Algérie, le parti représente le pouvoir auprès du peuple, idem pour l’UGTA auprès des travailleurs. Comme le décrivait si bien Lahouari Addi dans son article intitulé « Les partis politiques en Algérie » : L’administration gouvernementale, dès 1964 avec la charte d’Alger, confia au parti (FLN) la mission de défendre les options du régime (industrialisation, révolution agraire..) auprès de la population.

Hélas ! pour le régime algérien, ces faux moudjahidines ne sont pas immortels, leur nombre se réduit comme peau de chagrin. Et, il en est bien conscient, car, en octroyant des pensions aux rappelés de l’armée des années 90, et en lançant une campagne de recensement des appelés ayant effectué 6 mois supplémentaires en plus des 18 mois du service national durant cette même période, tout cela n’est pas anodin. Il envisageait certainement de régénérer la caste en question.

Cependant, ce régime est rattrapé par la crise économique et en ayant pillé les caisses de l’état, tous les moyens nécessaires pour réaliser son projet machiavélique lui échappent. Il ressemble à une tumeur ignorant qu’en tuant son hôte, elle met fin à sa vie. La mobilisation insignifiante et risible du dimanche 1er décembre 2019 en est la preuve.

Après toute une campagne médiatique menée tambour battant pour dénoncer une supposée ingérence étrangère de la part d’un régime produit par une véritable ingérence étrangère, les manifestants ayant répondu à l’appel se comptent par dizaines à l’échelle nationale. Cela montre l’insoutenable solitude de ce pouvoir. Ses vieilles propagandes ne font plus recette. Jean Jacques Rousseau disait : « On ne corrompt pas un peuple, mais on le trompe ». À l’issue de 57 ans de mensonges et de pillages, le peuple a posé son diagnostic final ; on est bel et bien devant un pouvoir souffrant de mythomanie et de cleptomanie.

Pendant que des centaines de nos enfants et d’honnêtes citoyens croupissent en prison, 5 gugusses font semblant de mener une campagne électorale. Comme à l’accoutumée, d’emblée, ils sont entrés en scène en annonçant un gros mensonge : avoir recueilli plus de 50 000 signatures d’électeurs chacun ; alors qu’ils peinent à rassembler plus de 1000 personnes dans les marches du dimanche dernier et à l’échelle nationale. Ils sont comparables à l’ENTV que décrivait si bien un internaute dans une publication sur un réseau social : la télévision algérienne débute par une lecture de versets coraniques ensuite elle se met à débiter des mensonges à longueur de journée entrecoupés d’appels à la prière.

Ils font semblant également de confondre entre ingérence et solidarité entre les peuples. Eux, les pantins d’un pouvoir ayant anéanti culturellement et économiquement le pays. Si l’on avait utilisé les richesses nationales à bon escient, l’Algérie serait sortie du sous-développement depuis longtemps. Dès qu’une personne essaie de s’attaquer au problème de la corruption, on sort les couteaux ; Mohamed Boudiaf en a fait les frais.

Quant au volet culturel, on a voulu travestir notre culture et nos croyances ancestrales. Lorsque des citoyens algériens manifestaient leur soutien au peuple palestinien, d’autres subissent le mépris de leurs propres autorités méritant autant de compassion. Il y a quelques mois, un jeune Palestinien a été arrêté dans une manifestation pour port d’emblème berbère. Ce qui me semble un symbole fort. Ce jeune homme, en tant qu’apatride chassé des terres de ses ancêtres, se retrouve certainement dans la lutte que mènent des millions de citoyens algériens pour la reconnaissance de l’identité profonde de ce pays.

On approche de la date fatidique du 12 décembre. En observant le nombre de manifestants lors de la mobilisation du dimanche 1er décembre suite à l’appel de la junte militaire et de leurs serviteurs, on peut estimer le taux de participation à cette mascarade électorale. Celui-ci ne dépassera pas les 2 % de la population, mais, évidemment, dans les communes où les maires FLN et RND ne sont pas élus, mais désignés par cooptation, ce chiffre sera multiplié par au moins 30. Ainsi, on nous annoncera un chiffre proche des 60 % de votants. En revanche, dans les régions kabyles et les grands centres urbains où les maires sont véritablement élus, les autorités auront des difficultés à gonfler leurs chiffres. Les chiffres qui seront annoncés concernant ces communes seront les plus proches de la réalité.

On parle d’élections alors qu’on nous annonce déjà le nom du futur pseudo-président. Comme ce pouvoir est hors sol et coupé du peuple, il n’a pas encore pris la mesure de la prise de conscience du peuple algérien depuis février de cette année. Il y a bien un avant et un après février 2019, et le 12 décembre prochain sera le déclic grâce auquel le Hirac se transformera en une révolution qui s’inscrira dans la durée jusqu’à la victoire…                                                                    

Auteur
M. At Yidir

 




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