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jeudi 18 septembre 2025
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Ankara s’invente une 5e colonne en Algérie

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La déclaration de l’ambassadeur de Turquie en Algérie relève d’une stratégie d’affirmation belliqueuse, sous couvert de fraternité historique.

Elle opère une double légitimation de la présence turque : d’un côté, l’ampleur prétendue de ses investissements directs étrangers, chiffrés à 7,7 milliards USD, soit près d’un cinquième du stock total d’IDE estimé à 37 milliards ; de l’autre, l’affirmation symbolique qu’un quart de la population algérienne serait d’ascendance turque ou kouloughlie. Cette rhétorique installe une logique de tutelle historique et de droit de regard politique, comparable à celle mobilisée en Libye, où la justification économique et identitaire a servi de tremplin à une présence militaire durable. La Turquie affiche ainsi son ambition néo-impériale dans l’espace méditerranéen et sahélo-méditerranéen, dissimulée derrière un discours d’unité de destin et de proximité civilisationnelle.

Les chiffres avancés sont invérifiables. L’annonce de 7,7 milliards USD d’investissements relève davantage du slogan que d’une donnée vérifiable. Une part importante pourrait provenir non pas d’apports de capitaux étrangers, mais de crédits consentis par des banques algériennes et de facilités fiscales ou douanières, autrement dit de ressources locales recyclées sous l’étiquette d’« investissement étranger ».

Les grands chantiers confiés à des entreprises turques illustrent ce mécanisme : Ankara y apparaît comme prestataire, tandis que le financement repose sur les institutions algériennes. Le fameux « men lahiytou bekherlou » prend ici tout son sens : le pays célèbre des capitaux qu’il a lui-même fournis, pendant que la valeur ajoutée s’échappe.

Cette logique économique s’accompagne d’une projection géostratégique assumée. La Turquie a installé une unité de production de drones au Maroc et négocie des implantations militaires à Ghat et Ghadamès, à la frontière orientale de l’Algérie. La méthode est claire : pénétration économique, mobilisation symbolique d’une proximité culturelle, puis, en cas de besoin, bascule vers une présence militaire directe.

L’histoire récente rappelle d’ailleurs que la Turquie fut dans les années 1990 une base arrière de financement et de logistique pour le Front islamique du salut, confirmant ses complaisances à l’égard de courants islamistes armés. Elle n’agit donc pas en partenaire neutre, mais en puissance poursuivant ses propres logiques idéologiques et expansionnistes.

À cela s’ajoute un enjeu stratégique majeur : celui des gazoducs vers l’Europe. La Turquie se conçoit comme la plateforme incontournable des flux gaziers européens, cherchant à contrôler les approvisionnements venus d’Azerbaïdjan et du Moyen-Orient.

Dans cette perspective, elle a tout intérêt à contrarier les projets concurrents, au premier rang desquels le Transsaharien, destiné à acheminer le gaz nigérian via l’Algérie. Un tel corridor renforcerait le poids stratégique de l’Algérie et du Sahel comme axe énergétique autonome, réduisant la dépendance européenne vis-à-vis des routes transitant par la Turquie. L’activisme d’Ankara vise donc à préserver son monopole géopolitique et à neutraliser l’émergence de cette alternative.

Or, face à cette offensive, le pouvoir algérien apparaît démuni. Une partie de ses composantes s’aligne docilement sur la Turquie, quand d’autres se placent dans des logiques de dépendance claniques vis-à-vis de Moscou, de Paris ou de Washington. Loin d’un équilibre souverain, cette fragmentation condamne l’État à la paralysie.

Le délitement et la décrépitude de ses institutions exposent le pays aux pires éventualités : instrumentalisation de son territoire comme base d’influence régionale, captation de ses ressources, marginalisation dans la compétition énergétique et mise sous tutelle par des puissances étrangères. Dans ce contexte, la Turquie n’est pas un allié stratégique, mais un compétiteur agressif exploitant les failles d’un système affaibli pour y projeter ses ambitions néo-impériales.

Les organes censés incarner la souveraineté nationale brillent par leur silence. Les parangons, d’habitude, si prompts à invectiver et à insulter, qu’il s’agisse de l’APS, d’El Djeich ou de ce qui reste de la presse officielle, ne semblent pas prêts à porter l’estocade à un ambassadeur qui s’arroge le statut de ministre résident.

Ce mutisme en dit long : il révèle à quel point cette Algérie « dhariba » n’est en réalité qu’une Algérie « madhrouba ». L’absence de réaction ferme conforte Ankara dans sa stratégie d’entrisme et souligne l’affaissement de l’État face aux défis extérieurs.

Mohand Bakir

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