L’Algérie vient de lever sa « réserve » sur l’article 15 alinéa 4 de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDAW). En fait, il ne s’agit pas d’une réplique lourde d’un humoriste de boulevard mais bien d’une réalité car les deux ont les mêmes ressorts de provocation d’une sensation forte.
Pour créer cette sensation forte il faut que l’effet comique sorte du rationnel, se focalise sur les mimiques grossières, sur les voix surjouées et les situations décalées. Quoi de plus conforme à cette recherche que ce qui est immonde. Cela fait rire car à certains niveaux du comique il faut du sordide.
On ne rit que parce que le personnage se casse une jambe en ratant la marche, qu’il est sordide dans les films d’épouvantes ou insaisissable dans bien d’autres registres.
L’Algérie vient de lever sa réserve sur un texte d’une convention internationale sur les droits des femmes, c’est qu’elle nous prouve qu’elle ne les a jamais respectés. Et on nous dit ça avec un sérieux insolent.
L’Algérie avait opposé lors de la ratification du texte en 1996 une réserve pour la non compatibilité de l’Article 15-4 avec le code de la famille en vigueur à ce moment. En quelque sorte le régime militaire algérien nous dit, avec l’assurance de celui qui peut nous dire des monstruosités sans crainte car il dispose de la force brutale, que ce code de la famille était incompatible avec les droits des femmes.
Ah bon ? Alors tout ce qui nous avait été bassiné sur ce code serait contraire aux droits fondamentaux d’un être humain ? On ne s’était pas rendu compte lors de son écriture que la femme était un être humain ? À leur crédit, comment voulez-vous qu’ils le sachent lorsque cette « chose » se couvre d’un drap noir ?
Précisément, la réserve avait été formulée pour incompatibilité de l’article 15-4 avec l’article 37 du code de la famille de l’époque. Mais la réserve est levée car le code de la famille avait été abrogé en 2005. C’est vrai qu’il faut au moins vingt ans pour s’en rendre compte.
Croyez-vous qu’il en est un seul dans cette armée de guignols qui ait été lire la constitution ? Il se serait rendu compte qu’elle avait de plus longue date encore déclaré l’égalité des sexes. Une petite erreur de frappe des grands constitutionnalistes de l’époque, salariés de ce régime. Les mêmes ou leurs doubles sont toujours présents avec la même rigueur de pointage salariale.
Résumons cette situation. Voilà un code de la famille de 1996 qui n’avait pas lu tout le baratin depuis 1962 sur les moudjahidates vaillantes, au cœur de l’avenir algérien, dignes de leurs droits et blablala. Mais en 2005 ils se sont dit que ce code disait des bêtises et qu’il fallait le modifier pour l’adapter aux droits des femmes. Ce sera désormais cinquante coups de fouet pour adultère et non pas cent.
Ouf ! Ce sont dit les constitutionnalistes, ils n’auront pas à modifier la norme suprême. Ils s’étaient donné tellement de mal, avec des nuits harassantes de recherche, des tonnes de consultations et des dizaines de séminaires pour en conclure que l’homme et la femme étaient égaux.
Dans ce travail gigantesque, ils avaient retrouvé, comme les archéologues, une trace de la convention des droits de l’Homme de l’Onu que l’Algérie avait ratifiée. Le boulot d’archéologue est long et dur et puis, il y a un tel fouillis dans les archives algériennes qu’il faut s’y retrouver.
La barbarie des dictatures a toujours ce côté burlesque. Charlie Chaplin avait si bien capté la chose dans son inoubliable film Le dictateur. Personnage aussi clownesque que terrifiant.
Il avait si bien mimé les gestes comiques et les discours enflammés et ridicules de Mussolini puisque dans ce film il s’agissait de lui sans le mentionner. On retrouvera la même correspondance chez Hitler, Franco, Fidel Castro ou leur Canada Dry, un certain Boumédiene.
Bon, que les femmes algériennes soient maintenant rassurées, le maillage des textes est aujourd’hui cohérent, leurs droits sont les égaux de ceux des hommes.
Mais je ne conseillerais pas à une femme voilée de dire à son mari qu’elle a les mêmes droits que lui et que les trois autres femmes. Elle apprendra immédiatement ce qu’on appelle dans les études de droit, la force légitime de la loi.
Boumediene Sid Lakhdar