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vendredi 1 août 2025
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Cinéma algérien : le réalisateur B. Derraïs dénonce le sabotage de la sortie de son film « Ben M’hidi »

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La sortie très attendue du film « Ben M’hidi », consacrée à cette figure emblématique de la Révolution algérienne, pourrait bien être compromise encore une fois, comme le regrette son réalisateur Bachir Derraïs.

Prévu initialement pour octobre prochain, le long-métrage du réalisateur Bachir Derraïs semble aujourd’hui victime de blocages en haut lieu. Le réalisateur, visiblement exaspéré, a choisi de briser le silence en interpellant directement le chef de l’Etat, Abdelmadjid Tebboune.

Dans un message sans détour, il évoque un « sabotage » orchestré non pas par des forces extérieures, mais par l’administration algérienne elle-même — celle-là même que le chef de l’État a nommée. Le réalisateur dénonce une censure larvée, alimentée par des lobbies « arabo-islamo-conservateurs » qui ne supporteraient pas de voir apparaître Abane Ramdane aux côtés de Larbi Ben M’hidi à l’écran. « Faire du mal cinéma, c’est déjà un acte de résistance », écrit-il amèrement, résumant ainsi la violence symbolique à laquelle il fait face.

Un gouffre entre discours et réalité

Alors que les discours officiels sur le soutien à la culture, et notamment au cinéma, se multiplient depuis plusieurs années, la réalité du terrain semble tout autre. «Entre ses discours et la réalité, il y a un fleuve. Un gouffre », assène le réalisateur dans une lettre qu’il dit avoir adressée au chef de l’Etat. Ce constat amer n’est pas nouveau dans les milieux culturels algériens, mais il prend ici une tournure d’autant plus grave qu’il touche à une œuvre dédiée à une figure fondatrice de la nation. Pas seulement, c’est aussi la première qu’un réalisateur s’alarme et dénonce les blocages en haut lieu.

Le film « Ben M’hidi », qui devait être projeté dans plusieurs capitales occidentales (Montréal, Londres, Bruxelles, Paris), se voit donc relégué à une attente indéterminée. Les amateurs de cinéma engagé, comme les passionnés d’histoire, devront patienter davantage — et surtout comprendre que les lignes rouges de la mémoire nationale ne sont toujours pas négociables.

Dans son message, Bachir Derraïs évoque également une autre réalité accablante : le désintérêt croissant des producteurs étrangers pour l’Algérie, qui préfèrent tourner au Maroc ou en Jordanie. Une désertion qui s’explique, selon lui, par un environnement administratif rigide, des entraves idéologiques et une hostilité latente à toute création qui bouscule les récits officiels ou les dogmes conservateurs.

Ce cri du cœur d’un homme de cinéma n’est pas qu’un règlement de comptes personnel. Il révèle les non-dits d’une politique culturelle en panne, d’un pays qui peine à faire la paix avec sa mémoire et à accompagner ses artistes autrement que par des slogans creux et de vaines promesses.

Ce probable ajournement de la sortie de « Ben M’hidi » n’est pas seulement un énième épisode de censure implicite. Il questionne plus largement la capacité de l’État à accompagner une création libre, pluraliste, et fidèle à la complexité de l’histoire algérienne. En boudant des films qui osent réhabiliter des figures comme Abane Ramdane ou qui refusent une lecture manichéenne de la lutte de libération, c’est une partie de la mémoire nationale qu’on bâillonne à nouveau. A ce titre, le black-out sur les archives de la révolution sont aussi l’autre signe de ce refus que les historiens se planchent sur l’histoire de la révolution dans toute sa complexité.

Le message de Bachid Derraïs a-t-il des chances d’être entendu au sommet de l’État ? Il affirme en être convaincu : « Je sais que ce compte rendu lui parviendra. On verra ce qu’il en fera. »

En attendant, c’est tout un public, en Algérie comme ailleurs, qui attend avec frustration de découvrir un film devenu, malgré lui, un symbole de résistance. Car sa sortie est bloquée depuis 2018.

La rédaction

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3 Commentaires

  1. Je pensais qu’il avait reçu le quitus du pouvoir politico militaire et policier d’Alger pour sa diffusion Mais finalement avec lui rien n’est jamais acquis ..

  2. L’évocation même du nom d’Abane Ramdane dérange les grands défenseurs de la « nation algérienne » arabe et islamique. Voici une preuve de plus qu’il n’y a pas de nation algérienne (Ferhat Abbas l’avait dit il y a bien longtemps). Une prétendue nation qui rejette l’histoire authentique de l’Afrique du Nord et qui a peur des martyrs assassinés au nom de cette idéologie arabo-islamiste. Basta ! La farce a trop durée. Pour la Kabylie, l’indépendance devient chaque jour de plus en plus inéluctable.

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