6 mai 2024
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Clarifications à M. Mourad Remaoun

Rebond

Clarifications à M. Mourad Remaoun

Je prends acte, comme simple citoyen, de vos affirmations qui concluent votre « droit de réponse » : « 1) Le Cnapest représente l’une des plus belles et des plus authentiques expériences syndicales vécues par l’Algérie depuis l’accession à l’indépendance nationale. – et c’est un tel sentiment qui m’a fait écrire l’article tant incriminé par M. Naimi. ». Je lis également votre autre jugement concernant votre article : « une défense – on ne peut moins hésitante et on ne peut plus cohérente – du Cnapest, contre la puissante tentative qui a consisté à réduire ce dernier, afin de le discréditer, et à l’islamisme et à une volonté de faire –dans un but de privatisation- échouer l’école publique.»

Dès lors, soit je n’ai pas su lire votre article (vous me reprochez « l’ignorance de ce que Lire veut dire ») (1), soit son contenu ne m’a pas convaincu. Dès lors, pour juger de notre divergence de point de vue, reste le lecteur, et d’abord le travailleur de l’éducation nationale qui a subi les sanctions du ministère du même nom suite aux actions revendicatives en matière de conditions de travail. Permettez-moi donc de douter encore du but réel poursuivi par votre article. Je n’étais et, même suite à votre « droit de réponse », je ne demeure pas convaincu de votre réel soutien au Cnapest, celui qui a subi toutes les punitions de la part de la Ministre parce qu’il revendiquait de légitimes droits afin d’accomplir correctement son travail.

Dans votre article mentionné et dans ce « droit de réponse », j’aurais souhaité trouver des réponses concrètes aux questions concrètes soulevées par les publications suivantes : d’abord, mon article « Éducation nationale : Des vraies questions » (2) ; ensuite, mon autre article « Éducation nationale, Santé, Culture, privatisations en Algérie et dans le monde : Courants de surface et courant de fond » (3), et, enfin mais surtout, aux propos de l’interview dans laquelle j’avais donné la parole à un syndicaliste, « Syndicalisme autonome algérien dans l’éducation : Bachir Hakem, un syndicaliste au long cours » (4). Dans ces publications, il n’y eut nul besoin d’invoquer Rosa Luxembourg, nul besoin de considérations telles celles contenues dans votre article, mais simplement de faits concrets. J’aurai souhaité que vous y répondiez, et notamment au syndicaliste Bachir Hakem. Or, ces réponses, je ne les trouve pas, ni dans votre article, ni dans votre « droit de réponse ».

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Votre référence à Rosa Luxembourg ne me parait pas suffisante pour me convaincre de vos bonnes intentions vis-à-vis des syndicalistes qui se battent dans le secteur de l’éducation pour une instruction réellement émancipatrice, du point de vue social, et performante, sur le plan technique et scientifique.

Évoquer la lutte contre l’obscurantisme clérical pour justifier les actions de la ministre de l’éducation nationale n’est pas suffisant, ni les enseignants partisans de la privatisation du secteur éducatif. Tellement de personnes luttent, certes, contre l’obscurantisme clérical et la privatisation, mais demeurent bien installés dans des privilèges au détriment du peuple. Je préfère, en ce qui me concerne, également constater, non pas les paroles, mais les actions concrètes de cette même ministre de l’éducation vis-à-vis des enseignants. Concernant des travailleurs en grève, trouvez-vous normal, dans une république « démocratique et populaire », de les menacer de licenciement, de radiations, puis, constatant leur fermeté, de passer à l’acte ? Avez-vous constaté, en Algérie comme dans le monde, des travailleurs qui se mettent en grève simplement parce qu’ils seraient manipulés par d’autres, dans le cas algérien par des « islamistes » ou par des partisans d’une privatisation du secteur de l’éducation ? Et même s’ils l’étaient (ce dont je n’ai pas lu quelque part la fourniture de preuves concrètes et convaincantes, sinon des allégations), peut-on justifier des représailles consistant en licenciement et radiation de l’emploi ?

Puisque vous citez Rosa Luxembourg, relisons ses écrits et essayons de trouver ce qu’elle aurait répondu à ces questions. En réalité, nul besoin de Rosa Luxembourg. La raison et le sens de la justice sociale suffisent pour répondre.

Voilà donc les observations essentielles qui me paraissent justifier le fait de ma part d’avoir considéré votre article (et non votre personne, faut-il le préciser ?) comme défendant apparemment les travailleurs mais, en réalité, justifiant les actions anti-travailleurs de la ministre de l’éducation nationale. Vous avez le droit de l’objecter, et j’ai celui de ne pas être convaincu par votre objection. Aux travailleurs de l’éducation de juger de nos pertinences réciproques.

Ceci dit, vous écrivez : « J’ai décidé de rédiger cette réponse, après avoir appris que la Ministre dont je serais un Avocat (5) par ma plume, selon M. Naimi, serait programmée pour prendre la tête du Ministre de l’Enseignement supérieur [Ministère auprès duquel, j’ai deux requêtes en cours]. » J’avoue ne pas comprendre votre motivation, ni pourquoi vous n’avez pas répondu à mon article juste après sa publication.

Concluons par des clarifications.

En employant de ma part, en ce qui vous concerne, le terme « un certain », il n’y avait nulle ironie, encore moins un « étrange mépris » pour votre « personne ». Simplement, j’ignorais et j’ignore encore qui vous êtes. J’ai cherché sur internet, sans trouver. Précisons que je ne considère pas Face-book comme une référence pour connaître les personnes. Sur Linkedin, à votre nom et prénom, je n’ai pas trouvé d’information pertinente (6). J’ai, alors, demandé à des amis algériens. L’un d’eux m’a répondu : « Peut-être un parent de la ministre, puisqu’ils s’appellent tous les deux Remaoun ». Bien entendu, je n’ai pas tenu compte de cette information, au demeurant ne disposant pas de preuve. En outre, on peut être parent d’une personne et ne pas partager ses vues ni ses actions.

Ceci étant dit, je suis d’accord avec vous que le terme « un certain » est à exclure, même quand on ignore l’identité et les travaux d’une personne, à moins de vouloir la « diminuer ». Ce n’était pas mon intention, et je vous prie de m’excuser pour vous avoir laissé croire à ce « mépris ». En outre, je viens de supprimer l’expression inopportune et désobligeante dans mon blog. Par ailleurs, j’ai constaté qu’«un certain » ne figure pas sur l’article publié sur « Le Matin d’Algérie ». Je ne l’avais pas remarqué. Il faut donc attribuer le mérite de cette heureuse correction au rédacteur du journal, et je l’en remercie. Précisons que la présence de « un certain » dans mon blog, et non dans le texte publié dans le journal, s’explique par le fait que j’insère dans le bloc la version envoyée au journal, et non celle qu’il publie.

Vous me reprochez ceci, à votre encontre : « Effarante absence de la moindre trace (renvoi, référence, citation) de nul détail de ce que j’ai pu écrire, et qui pourrait ne serait-ce qu’illustrer le trop dont je suis jugé coupable. » Mon article n’avait pas comme thème fondamental tout ce que vous énoncez, mais simplement votre texte auquel je faisais référence. J’estimais celle-ci suffisante dans mon texte, d’où le renvoi à une note qui dit : « Un exemple récent de ce langage est le texte de (je viens de supprimer « un certain ») Mourad Remaoun en défense de la ministre de l’ «éducation» nationale. » Et j’en donnais le lien, afin que les lecteurs puissent en prendre connaissance et avoir leur opinion. C’était la preuve que je fournissais ; je l’estimais suffisante dans le cadre de mon article.

Quant à juger que par ce que j’ai dit de vous, je visais à me « montrer doté d’une ‘méprisante’ supériorité intellectuelle », je ne vois nul part ce fait ; je laisse donc au lecteur le soin d’en tirer sa propre conclusion.

Autre clarification. Vous affirmez, à propos de mon article que vous citez « Littérature et engagement. Pour qui et comment écrire » (7) que c’est un « titre aussi foncièrement militant que hautement philosophique ». J’ignore si votre appréciation est sincère ou ironique. Ceci dit, oui, j’aspire (j’ai bien dit « aspirer », et non pas « prétendre »), depuis mon enfance (ce fut le mérite de la guerre de libération nationale), à la philosophie et à la militance les plus authentiquement émancipatrices. Je les résume dans l’expression que j’utilise de manière permanente, au risque d’ennuyer : « liberté solidaire ». Je sais le prix à consentir quand on a ce genre d’aspiration là où cette liberté solidaire est contrastée par ceux dont elle remet en question les illégitimes privilèges.

Au sujet de mon article, vous parlez de « inédite et révolutionnaire théorie de l’Ecrit » (8). Dans mon texte, il n’y a rien d’ « inédit ». Je reprends ce qui se trouve, depuis l’antiquité, en Europe comme en Chine, dans tous les écrits d’autres auteurs. Ils avaient à cœur de s’adresser d’abord aux exploité-e-s de cette planète, et à ceux qui voulaient se solidariser avec ces victimes d’un système social inique.

Cependant, oui, cette « théorie » est révolutionnaire (quoique ce mot est, désormais, dévalorisé), en ce sens qu’elle vise à changer la base sur laquelle fonctionne toute société humaine : non plus l’exploitation-domination de la majorité des êtres humains par une minorité d’entre eux, mais établir une coopération libre et solidaire entre toutes et tous.

Vous me prêtez également, M. Remaoun, la « volonté » de « fonder la science positive de « Pour qui on écrit ». Dans aucun de mes textes, ni dans mon article que vous mentionnez, je ne vois nulle expression d’une telle volonté. Je ne fais qu’exprimer mon opinion sur les buts de l’écriture, et sans aucune prétention à l’originalité, puisque je ne fais que reprendre des idées précédentes, en m’efforçant de les adapter au contexte actuel.

Vous objecteriez : pourquoi, alors, ne pas citer ces auteurs ? Voici ma réponse. 1) Chaque fois que je le juge nécessaire, je les mentionne, en dépit du fait que certains lecteurs me reprochent de « jouer à monsieur-qui-sait-tout et veut nous en épater ». 2) Cependant, en sortant de ma jeunesse intellectuelle, j’ai appris à ne pas présenter mes vues en les protégeant derrière des « autorités » illustres. Je me dois de connaître, bien entendu, leurs idées, de m’en enrichir, de les nommer quand c’est nécessaire, mais, finalement, d’en dégager mes propres opinions à ce sujet. Je ne suis pas un perroquet, ni un adorateur d’icônes.

Mes opinions sont, évidemment, discutables ; je rappelle souvent, au risque de paraître banal, qu’elles ne sont que des propositions dans un débat démocratique et collectif. Ce que j’affirme clairement dans mes écrits est ceci : mon premier et principal souci est l’intérêt du peuple, et contribuer, selon mes possibilités, très limitées (certains de mes amis les jugent « dérisoires » et « inutiles ») à ce que ce peuple parvienne à cette liberté solidaire. De mon point de vue, elle représente le plus bel idéal humain, tant pour l’individu que pour la collectivité toute entière.

Ceci dit, je l’ai écrit plus d’une fois dans mes contributions, je le répète : je ne prétends pas « enseigner ». Le motif est simple. Je suis et serai toujours un étudiant jusqu’à ma mort. Je fais partie de ces êtres humains conscients de l’immensité de ce qu’il y a à connaître, et qui savent qu’en mourant, ils demeurent ignorants de beaucoup de choses, peut-être même de l’essentiel. Ma conviction était et demeure : l’humanité, et donc moi qui en fait partie, ne procède pas vers plus de vérité, mais vers moins d’erreur. Si les gens qui ont voulu enseigner avaient donné son importance à ce principe, tellement de maux auraient été évité à l’espèce humaine. Certes, j’eus ma phase – juvénile – de croire à des « enseignants » et à leur « vérité », et, en les suivant, de le devenir à mon tour et de prétendre à cette « vérité ». Heureusement, la priorité que j’ai toujours accordée à la réalité concrète (mérite de mon père ouvrier et de ma mère paysanne pauvre), même quand cette réalité contredisait mes « convictions », cette priorité m’a permis deux découvertes. 1) Le meilleur et le plus authentique des instruits n’enseigne pas ; simplement il communique ses expériences pratiques et les observations théoriques qu’il en a tirées, quitte aux destinataires à en faire l’emploi qu’ils jugent utile ou non pour eux. 2) La personne, y compris la plus bardée de diplômes universitaires, qui prétend « enseigner », finit par imposer de manière dogmatique et totalitaire ses vues, même quand elle prétend « éclairer et sauver l’humanité de ses erreurs » (9).

Rosa Luxembourg, puisque vous la citez, n’a-t-elle pas été, dans le camp marxiste, l’une des très rares personnes à critiquer les vues du « génial » Lénine en matière de révolution sociale ? Elle lui reprochait, justement, de tenir en piètre estime la spontanéité et la créativité des travailleurs, au profit de l’appareil bureaucratique du parti, formé de privilégiés. Nous avons constaté le résultat. En 1921, les membres des soviets authentiquement soviétiques (à Kronstadt et en Ukraine) furent… massacrés par milliers, sur ordre de… Lénine, et l’armée « rouge » était commandée par… Trotski. Ils accusèrent ces travailleurs d’être de connivence avec la « réaction interne et étrangère » (10). Et, pendant le massacre de ces travailleurs, Lénine, Trotski et leurs collaborateurs ont fêté l’anniversaire de la… Commune de Paris !… Incroyable mais vrai !… En 1871, à Paris, l’armée bourgeoise massacra les travailleurs sous le prétexte qu’ils menaçaient la « nation » (en réalité, la domination capitaliste) ; en 1921, à Kronstadt et en Ukraine, les bolchéviks massacrèrent les travailleurs, sous le prétexte que ces derniers menaçaient la « révolution prolétarienne » (en réalité, la dictature de l’appareil bolchevique contre les travailleurs). Voilà les faits concrets, dotés de preuves irréfutables. Et voici la leçon que j’en ai (très amèrement) tirée : il ne me suffit pas de lire, dans votre « droit de réponse », votre éloge du Cnapest ; j’ai besoin de lire vos réponses concrètes et circonstanciées aux aspects concrets et circonstanciés présentés par le syndicaliste Bachir Hakem, ainsi qu’à ceux des travailleurs qui ont subi les mesures de rétorsion de la part de la ministre de l’éducation.

Pour le reste, de votre article et de votre droit de réponse, ainsi que de mon article et de ma mise au point, laissons au lecteur le soin de se faire sa propre opinion, et, surtout, aux travailleurs et travailleuses du secteur de l’éducation. Ce sont elles et eux qui vivent la situation concrète.

K.N.

Email : kad-n@email.com

Notes

(1)  Mais pourquoi la majuscule au mot ?… Je vous prie de ne voir dans cette interrogation aucune manifestation, de ma part, de ridicules et stupides malignité, « mépris » ou prétention à une « supériorité intellectuelle ». Mon unique motivation est de comprendre votre motif d’accorder à un mot une première lettre en majuscule. Je poserai la même question à mon plus cher ami, s’il recourt à ce procédé. J’ai le souci du correct emploi des mots, au nom de la nécessaire clarification des idées.

(2) Du 14 février 2018, https://lematindalgerie.comeducation-nationale-les-vraies-questions

(3) Du 26 février 2018, https://lematindalgerie.comcourants-de-surface-et-courant-de-fond

(4)  Du 10 février 2018, https://lematindalgerie.combachir-hakem-un-syndicaliste-au-long-cours

(5) Voir note 1.

(6) https://www.linkedin.com/in/mourad-remaoun-3abb133b/

(7) https://lematindalgerie.compour-qui-et-comment-ecrire

(8) Voir ma note 1.

(9)  Sur ce thème de l’«enseignement», permettez-vous de vous renvoyer à une prochaine contribution que je publierai : « La dette d’un dinosaure ».

(10) Voir Voline, «La révolution inconnue », librement accessible sur internet.

Auteur
Kaddour Naïmi

 




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