19 mai 2024
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Construire un Golden Gate entre l’Algérie et la Californie

IMPRESSIONS

Construire un Golden Gate entre l’Algérie et la Californie

De tous mes séjours passés aux USA dans plusieurs Etats et villes (Pittsburg, New York, Princeton, Philadelphia, Washington, Chicago, San Francisco, San Jose, San Diego, Los Angeles), il me reste, en définitive, une impression très controversée.

C’est un grand pays composé de 50 Etats, officiellement des Etats-Unis d’Amérique, mais si différents les uns des autres avec tout de même des composantes communes.

Quelles impressions dominantes et marquantes ai-je eu après mon dernier séjour en Californie, visites de grandes universités, de grandes villes et de multiples discussions avec la diaspora algérienne de la Silicon Valley.   

J’exprime d’abord mes observations sur la vie courante en Californie puis les facettes positives dont nous devrions nous inspirer et enfin mon avis sur : Comment profiter des expériences et expertises de notre diaspora établie aux USA. 

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Quelle est la vie courante en Californie ?

Côté jardin :

1/ Respect of the regulation, the rules and laws : j’observe un respect citoyen des lois, des règles et de la réglementation. La grande majorité des citoyens naturellement les appliquent sans un système coercitif de contrôle ou du moins apparent.

2/ Une justice omniprésente avec une stricte application : Elle est toujours et partout présente dans la vie des citoyens. Son utilisation est généralisée dans tous les actes et les rapports de la vie sociale, professionnelle et individuelle. Pour n’importe quelle dispute, on en fait usage. Les plus riches, qui choisissent les meilleurs avocats, remportent plus souvent leurs procès.

3/ Les enfants et les femmes américaines jouissent d’un dispositif légal très efficace qui garantie liberté, préservation et protection. C’est je crois, quasi unique au monde. 

4/ L’organisation administrative des villes visitées, des communes et quartiers où il existe une forte implication des contribuables et des administrés, me paraît excellente et affiche un réel succès.

5/ Système éducatif à plusieurs vitesses qui effectue un tri entre les classes sociales. En fait, on en a pour son argent selon les économies et budget alloué par les parents. De plus les communautés bien organisées ont ouvert depuis longtemps des établissements éducatifs propres à leur culture, langue et religion (indiens, juifs et chinois).

6/ Les minorités et les communautés étrangères sont totalement fluides dans la société en particulier les asiatiques (indous et chinois) qui affichent ostensiblement leurs appartenances. La Silicon Valley m’est apparue largement dominée par une intelligentsia sino-indienne. A cette allure dans 20 ans j’imagine que les américains yankees y seront minoritaires. 

Les problèmes d’intégration, du communautarisme, de menaces de l’islamisme intégriste, la théorie du remplacement, la préservation de la culture et civilisation chrétienne  semblent ici totalement ignorés à l’opposé de l’Europe et la France en particulier. Les étrangers qualifiés, d’où qu’ils viennent, sont les bienvenus et c’est ça la réussite principale de la silicon valley. S’il est vrai qu’initialement les inventeurs étaient des Yankees mais sitôt les collaborateurs et développeurs sont, en grande partie, asiatiques détenteurs de cartes vertes ou binationaux américains.    

7/ Les universités sont des villes ou l’inverse. Je n’ai pu dénombrer les universités publiques et privées de Californie. Des étudiants de tous les continents y étudient et bien sûr nombreux sont ceux qui, à l’issue, élient définitivement domicile. Les boursiers de Sonatrach des années 80-90 en sont un bon exemple. 

cour :

1/ Des laissés pour compte innombrables. Quel triste décor ces SDF en grand nombre dans certains quartiers et chose encore plus terrifiante, des toxicomanes de tout âge errant seuls éperdus dans la ville. Apocalypse bientôt ! Vu le nombre,  la facilité d’approvisionnement en drogues dures, la non intervention de l’Etat pour ces pommés.     

2/Les transports en commun m’ont paru sous développé comparativement au réseau autoroutier moderne et très vaste. On lui a certainement accordé plus d’intérêt pour encourager l’acquisition de véhicules individuels au détriment du transport en commun. L’exercice du lobby des cars et du pétrole.

3/ Les retraités. J’ai posé la question pourquoi des seniors hommes et femmes qui ont visiblement dépassé 70 ans continuent à travailler. Sans détaillé ici le système américain des retraites, sachez que beaucoup de citoyens américains meurent de vieillesse au travail. 

4/ Hausse effrénée des loyers et de l’immobilier. Les grandes firmes du HITEC recrutent sans cesse des ingénieurs et chercheurs qui se comptent par centaines de milliers. Des villages avoisinants (100Km) se sont transformés en villes dortoirs accueillant ces nouvelles recrues et les loyers sont parmi les plus hauts au monde. La colocation est devenue très populaire ainsi que les mobil-homes. 

5/ Le trafic jam. Les embouteillages d’Alger n’ont rien à envier à ceux de Californie à l’exception que certaines autoroutes ouvrent des voies express payantes.

6/ Salaires plus élevés mais coût de la vie aussi. Je n’ai pas fait un calcul précis mais si les salaires sont des plus élevés pour les grosses pointures du HITEC les coûts de la vie suivent la même tendance. 

7/ Les produits frais et naturels Bio sont intouchables. Pour nous algériens un couscous avec des légumes frais habituels et de l’agneau hallal non congelé devrait coûter à San Francisco, pour 4 personnes pas loin de 120 US$ soit 24.000DA.       

Quelles sont les facettes positives dont nous devrions nous inspirer ? 

1/ Respect des règles, des lois et de la régulation: Apprendre la citoyenneté par le respect des règles, des lois et de la réglementation. Ce chantier devrait concerner les parents d’abord puis le système éducatif et enfin tous les élus, l’administration et la société civile à condition qu’eux-mêmes puissent en donner l’exemple.   

2/ Une justice omniprésente avec une stricte application : Je n’insiste pas sur l’indépendance de la justice et sa stricte application à tous les citoyens de la base au sommet de l’Etat, demande tant décriée par le Hirak. Mais contrairement aux USA, justice et argent devront tenir leurs limites. Ce chantier devra prendre au moins 10 ans et venir apporter une thérapie énergique à notre société décadente et utiliser l’expérience de 40 années de «fassad» pour moraliser les comportements, protéger les femmes et les enfants, criminaliser le harcèlement et la violence faites aux femmes en particulier. La professionnalisation des magistrats en matière financière, comptable et fiscale est aussi à l’ordre du jour et enfin relever leurs rémunérations pour attirer les compétences. 

Enfin, ce n’est une blague ! J’ai vu un tribunal dans le même bâtiment d’une grande maison d’arrêt privée. On optimise tout aux USA (diligence et efficience).      

3/ Protection de l’enfance et des femmes algériennes. Nous pouvons largement explorer le dispositif  légal très efficace qui garantie liberté, préservation, intégrité et protection. Jamais l’Algérie ne se relèvera sans une totale participation de ses filles libres, respectées, non soumises et sereines. Rappelons encore et toujours que sans   sans elles, nous serions toujours colonisés et/ou une dictature islamiste.  

4/ L’organisation administrative : Nos villes, nos communes et nos quartiers devront revivre au rythme de l’implication des contribuables et des administrés. La   solution évidente est de confier la gestion de façon directe et pratique aux habitants de la cité, du village et du quartier. C’est un chantier titanesque en apparence mais les exemples ici et là en Kabylie en particulier sont là pour démontrer la faisabilité et rompre avec l’administration d’élus véreux. Le modèle américain où la décentralisation est complète serait ici aussi largement applicable en Algérie. 

5/ Système éducatif  algérien = nivellement par le bas, le système américain = un nivellement par le haut. Oui l’argent et au cœur de ce dispositif ! Dans certaines nations avancées à l’instar du Japon, Corée du sud, Singapour, le nombre d’enfants est limité (1 max 2) et l’éducation c’est avant tout un choix d’investissement pour les parents. Dans d’autres pays le modèle de «Jules Ferry» l’instruction obligatoire et l’enseignement public laïque de 1882 semble battre de l’aile. Dans ces pays les écoles catholiques, juives et musulmanes tolérées semble faire recette. En Algérie, nous avons laissé le système éducatif dans l’informel s’auto développer dans tous les sens. 

Les écoles publiques, privées, l’idéologie islamiste, l’idéologie de la langue, du CNED, formation pour un départ à l’étranger, école française, école spéciale pour enfants de diplomates, égyptienne et bientôt chinoise. En fait tout et n’importe quoi ! L’argent est omniprésent et sans le dire l’argent reste l’arbitre avec un système de cours de rattrapage scandaleux. L’avenir de l’Algérie se joue aussi dans ce théâtre.    

Ce que je retiens du système américain c’est d’abord un système ou les parents sont pleinement impliqués financièrement et sur le choix du système éducatif. Les écoles privées foisonnent côtoyant les écoles publiques de la région.  La compétition est rude pour attirer les meilleurs professeurs et vendre plus cher les places.

Il est certain qu’en Algérie notre système éducatif est à revoir entièrement ainsi que le rôle de l’Etat : Régulateur ou Mauvais tuteur

6/  Aux USA, les universités sont des villes ou l’inverse. Le niveau des universités d’un pays le place directement sur un curseur de développement. Nos universités sont cloisonnées en marge de la vie économique du pays et du monde en général. Le méthodes et techniques de fonctionnement sont archaïques. Une refonte profonde des enseignements, une mise à niveau des enseignants, des programmes et des équipements, ainsi qu’une revue des programmes de recherche devront être inscrites à un programme spécial doté de budget conséquent avec l’assistance technique de pays étrangers (Europe, Canada et USA). Le modèle américain me séduit à plusieurs titres. La recherche est pour une grande part liée aux activités économiques (Industrie Services, TIC, Agriculture, Energie, etc.). Cette dualité universités privées et publiques entretient un climat de compétition saine mais de plus il y a une compétitivité et émulation entre les villes et les états. Pour les étudiants, il y a certes, une sélection par les prix mais des bourses dédiées  et les prêts bancaires y figurent pour rétablir les équilibres. Quels sont les aspects ou composantes qui peuvent intéresser l’Algérie ? Tout et rien à la fois !

Il serait ridicule de tenter de transposer de but en blanc le système américain en Algérie.  Cependant certains principes et méthodes me semblent indispensables. J’en donnerai ici que quelques idées :

1/ En matière de recherche et développement : placer au cœur de notre développement économique les instituts spécialisés et universités.

2/ En matière d’enseignement : Inviter périodiquement les enseignants algériens non résidents  et étrangers et faire aussi des mises à niveau pour nos enseignants à l’étranger dans le cadre d’accord internationaux et bilatéraux.

3/ Développer de suite le e-learning

4/ Ouvrir l’enseignement supérieur aux privés et étrangers. Je pense tout de suite à l’ouverture d’une université africaine des techniques avancées anglophone, utilisant en partie notre diaspora des USA et UK,  financée par l’UA et la BAfD pour recevoir des étudiants de tous les pays africains si l’on veut demain rayonner sur l’Afrique. 

Comment profiter des expériences et expertises de notre diaspora établie aux USA ? 

Il y a eu plusieurs initiatives et visites dans les deux sens depuis 20 ans. Certaines furent organisées par notre ambassade à Washington, d’autres par le FCE et enfin des initiatives de consultants ou divers associations. Dans l’ensemble, je n’ai pas entendu parler d’opérations probantes et concluantes pouvant servir de schéma directeur pour l’avenir. Dans plusieurs pays en quête de technologies et de savoir-faire, ce sont les Etats qui investissent dans des opérations ciblées pour acquérir grâce à leur diaspora des technologies avancées ou pour faire redémarrer une industrie frappée d’obsolescence. Les pays les plus actifs sont l’Inde, la RP de Chine, la Corée du sud, la Turquie, l’Iran et Israël qui, en la matière, ont fait recette. Chacun de ces pays a utilisé des moyens et liens, propre à sa situation, son implantation, sa diaspora, ses relations politiques avec les USA et enfin leurs lobbies solidement implantés.

Pour l’Algérie, beaucoup s’accordent à considérer l’apport de notre diaspora comme importante mais peu s’attellent à analyser les expériences précédentes, tirer un bilan et proposer une démarche plus efficiente. Pour ma part, je vais livrer mon approche :

Notre diaspora bien installée n’a pas vraiment besoin de l’Algérie mais c’est l’Algérie qui demain aura vraiment besoin d’elle. L’Algérie rentière n’a jamais eu besoin de son intelligentsia résidente pourquoi selon vous, ira-t-elle vers la non-résidente ? Un pays qui offre l’exil comme futur à ses propres diplômés ne peut qu’arriver là où nous sommes. 

Je pose d’abord une dernière question : l’Algérie nouvelle que le peuple dans les rues appelle à  gorge déployée, va-t-elle se reconstruire en une Algérie du savoir ? Sait-elle le prix à payer ? 

Si la réponse est oui, alors voici mes premières suggestions :

  • Il est important de sensibiliser à notre jeunesse qu’une économie du savoir est bâtie sur le travail, l’ordre du mérite, l’effort, l’engagement, des sacrifices, une ferme volonté et détermination de réussir, l’acharnement pour la connaissance et l’innovation. 

  • J’invite à effectuer un travail de fond conjoint sur des dossiers vitaux pour l’Algérie. La partie algérienne en établira d’abord un point de situation documenté puis exposera ses solutions. La partie américaine après examen confortera l’approche ou bien présentera d’autres alternatives documentées.

  • Je suggère que l’Etat offre des conditions d’accueil à nos experts non-résidents pour leur permettre de s’y rendre souvent pour des ateliers, des conférences et pour dispenser des cours spécialisés aux universitaires et professionnels. 

  • J’invite l’ambassade d’Algérie à Washington d’ouvrir à San Francisco ou San Diego une «maison des sciences & techniques» permettant l’établissement d’un pont entre l’Algérie et la Silicon Valley.

  • J’ai bien noté le souhait de managers algériens et de patrons de start-up d’ouvrir des postes aux USA à des jeunes diplômés algériens surtout dans l’informatique. 

  • Je rapporte ici des propos de seniors non-résidents qui proposent de se rendre en Algérie pour des périodes plus longues 6-12 mois pour diverses missions bénévoles d’encadrement, d’accompagnement  si les conditions d’accueil et d’hébergement sont assurées. La résidence du «Club des pins» y serait parfaitement adaptée.

  • Un groupe d’experts de la Silicon Valley propose de créer un incubateur (start-up) dans les TIC et les technologies avancées dans un établissement public ou privé en Algérie.

En définitive, nous mettons en place un petit groupe mixte d’Algériens universitaires et professionnels et de non-résidents qui va élaborer un document qui reprend en autres, ces idées de manière structurée. Ces travaux seront diffusés pour enrichissement et enfin transmis aux dirigeants de l’Algérie nouvelle et aux associations intéressées.       

Auteur
Dr Llies Goumiri, Senior Consultant

 




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