26 avril 2024
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Création d’une banque d’import-export : la fausse solution

DECRYPTAGE

Création d’une banque d’import-export : la fausse solution

La récente décision, entérinée par la Banque d’Algérie, de créer une banque, entièrement dédiée à l’import-export, proposée par le CNESE, est tout simplement une hérésie économique et financière, une de plus, que propose cette institution (1) qui n’arrive toujours pas à trouver ses marques, dans le concert des institutions, après que les pouvoirs publics ont décidé d’en faire un bureau d’études pour son propre compte.

Cela me rappelle, ce qui s’est passé en 1981, lorsque j’ai été désigné par le Ministre des finances, « Président de la commission sectorielle de la restructuration organique des entreprises » ! En effet, notre pays ne tire jamais les leçons de ses échecs et persiste à les rééditer, puisque qu’à cette époque déjà, le principe de la création d’une banque ex nihilo par secteur avait été imposé par le tout puissant Ministère de la planification et de l’aménagement du territoire, à la tête duquel trônait un certain A. Brahimi dit « la science » et qui va devenir, peu de temps après, un puissant Premier ministre (2).

Défendant le principe, que le système monétaire et financier (banque et assurance) ne pouvait faire l’objet d’un traitement commun, appliqué aux autres secteurs (3) mais qu’il fallait le concevoir à travers la création de nouveaux produits financiers plutôt qu’à travers la création de nouvelles banques et par conséquent, que les difficultés sectorielles (industries, agricultures, transport, PME PMI…), ne pouvaient être résolues par la démultiplication de « banques spécialisées », je fus violemment désarçonné par ce dernier, qui voyait en moi un « contre-révolutionnaire et un révisionniste ». 

Le résultat est connu, le secteur a été découpé, au bistouri et deux institutions bancaires nouvelles ont été créées ex nihilo (BADR et BDL) ainsi qu’une compagnie d’assurance (CAAT)… Pour autant, les problèmes sectoriels de notre économie ont-ils été résolus ?

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C’est le contraire qui s’est produit, accentuant la crise économique et retardant la mise en œuvre des réformes structurelles, tant attendues. Comment donc expliquer aux décideurs, que l’objectif n’est pas de créer d’autres institutions financières ex nihilo mais d’au contraire, procéder à leur concentration (par fusion acquisition) tout en mettant sur le marché de nouveaux produits financiers spécialisé, capables de répondre aux besoins spécifiques des secteurs économiques !

Ces fausses solutions ne vont qu’aggraver le niveau de l’intermédiation financière de notre économie qui peine à jouer ses rôles essentiels d’octroi des crédits et de mobilisation de l’épargne, d’autant que la ressource humaine est rare et à migrer vers les institutions bancaires internationales accréditées en Algérie.

En effet, à l’exportation (90% d’hydrocarbures et de produits dérivés), cette nouvelle banque sera-t-elle capable de mieux dynamiser les exportations de Sonatrach, que ne le fait la BEA actuellement ? A-t-elle un réseau d’agences bancaires, à travers le territoire national, les ressources humaines, la logistique, la monétique, les correspondants bancaires internationaux…

A l’importation, cette nouvelle banque, pourra-t-elle rivaliser avec les banques internationales de notre place financière ? Quelle analyse avantages inconvénients a été réalisée par le CNESE pour arriver à cette fausse solution et a-t-il les prérogatives pour la faire ?

N’aurait-t-il pas été plus judicieux de la commission d’évaluation de cette institution, se penche sur l’audit des politiques publiques antérieures pour proposer des solutions nouvelles, construites sur des expériences réelles et non fictives ?

Le flou artistique, entretenu volontairement, entre produits financiers nouveaux et institutions financières nouvelles, illustre clairement un manque de vision stratégique pour le secteur, ce qui laisse une place béante aux apprentis sorciers qui prodiguent des talismans (Harz) pour apporter des solutions miraculeuses aux problèmes structurels que vit notre économie.

Quand cette cécité stratégique prendra-t-elle fin et qui aura le courage politique de siffler la fin de la récréation monétaire et financière que vit notre économie ? Attendons, sagement, la venue du nouvel exécutif ! 

M. G.

Notes    

(1) Le nouveau CNESE n’arrive pas à comprendre qu’en se mettant sous la coupe du pouvoir exécutif, comme bureau d’études, il ne pourra jamais faire preuve d’originalité et d’efficacité comme une force de propositions, réunissant les acteurs économiques et sociaux.

(2) L’ironie du sort a voulu que je devienne, par la suite, Directeur à la Présidence de la République, services du Premier ministre. 

(3) Le CNRE a décapité les entreprises publiques en plusieurs morceaux selon la région, les produits, les filières, les métiers… Mais le crime économique le plus désastreux fut celui d’avoir isolé les bureaux d’études et d’ingénieries, de leur donneur d’ordre, les condamnant à une mort programmée, alors qu’au niveau mondial l’heure était à la concentration de la matière grise !    

Auteur
Dr Mourad Goumiri, Professeur associé.

 




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