Les exécutions par décapitation en Arabie saoudite prennent des proportions effrayantes ! Ces dernières années leur nombre ne fait que doubler, passant de 37 en 2020 à 69 en 2021 et 138 en 2022 ! Une évolution arithmétique des plus renversantes.
À ce rythme, la décennie 2020 s’achèvera avec des dizaines de milliers de têtes tranchées !
Qui a dit que le prince d’Arabie était un grand humaniste !
Pourtant le régime et Mohamed Ben Salmane lui-même s’étaient plusieurs fois engagés à respecter un moratoire sur les peines de mort et les restreindre aux assassinats (*).
En novembre dernier, 12 personnes, dont des étrangers, ont été exécutées en Arabie saoudite… sans que cela ne suscite la moindre indignation dans le monde. C’est que le pétrole coule à flot. Le record a été atteint le 12 mars 2022, avec 81 hommes exécutés, dont 41 appartenaient à la minorité chiite du pays (10% de la population), victime de persécutions systématiques.
Cette pratique barbare est toujours justifiée par l’application de la charia : ce qui est appelé en langage juridico-théologique «la désobéissance du tuteur » (ici le roi ou ses représentants) est assimilée à un crime de lèse-majesté, puni de la peine de mort.
Il faut savoir que s’opposer aux gouverneurs en islam est un « péché capital » et la peine de mort, infligée aux personnes (ainsi qu’à leurs adeptes) accusées de contester publiquement le pouvoir en place, sert à enrayer ce que l’on appelle la « fitna » (discorde).
Les partisans de la peine de mort se basent essentiellement sur une citation du prophète, dans laquelle celui-ci suggérait aux fidèles de «ne pas contester l’autorité à ceux qui la détiennent sauf à la vue d’une mécréance manifeste dont Allah nous a fourni la preuve ».
Hahahaha ! Quelle autre preuve de mécréance que la mise à mort d’hommes et de femmes qui n’ont que pour unique tort de contester un régime sorti tout droit des ténèbres ?
De l’autre côté, des prédicateurs dissidents s’appuient sur le même hadith du prophète, ainsi que sur certaines interprétations d’exégètes, pour justifier le droit des musulmans de se rebiffer « pacifiquement » contre un gouverneur jugé « tyrannique » ou « impie ». L’actuel régime à Riyad serait bien, selon eux, dans ce cas de figure.
Allez donc démêler cette khalota (méli-mélo) où des avis contraires sont puisés de la même source : la parole du prophète !
En fait, le débat autour des définitions de « l’imam injuste » en islam demeure à ce jour sujet à controverse et n’est jamais tranché. D’où ces surenchères entre différents courants qui ont fini par profiter aux plus rigoristes et aux plus fanatiques (Al-Qaida, Daech…).
Ce qu’il y a de plus sordide dans cette affaire, c’est qu’aucun dirigeant du monde dit civilisé n’ose monter au créneau pour dénoncer ces barbaries d’un autre âge ! Les risques encourues se chiffrant en milliards d’euros !
Que faire pour stopper le massacre ? Que peut faire la communauté internationale ? Le sentiment le plus partagé dans la population est que le régime des Al Saoud a pu acheter le silence d’une partie des grandes puissances sur la question des droits humains. Des voix s’élèvent épisodiquement pour dénoncer le recours à la peine capitale dans ce pays, mais sans aucun effet contraignant.
Décidément, en Orient ou en Occident, le monde ne tourne pas rond !
Kacem Madani