Jeudi 28 mars 2019
Désamorcer la violence verbale : un impératif pour la démocratie !
La violence se conçoit et s’épanouit dans le verbe. Les coups de poing, les claques et les attentats n’en sont que des métastases d’une spirale qui s’engendre dans l’opacité insoupçonnable du langage. Ainsi, dès qu’elle voit le jour, la violence s’empresse de couper son cordon ombilical avec l’univers du sens et des mots.
Une fois autonome, elle se duplique pour générer d’autres types de violences qui la dépassent en cruauté et en bestialité. En témoigne le panel de fléaux néfastes de racisme, d’antisémitisme, de sexisme, de xénophobie, de haine, de fanatisme, d’intégrisme, de terrorisme, de colonialisme, etc.
Aussi, un peuple avide de paix devrait-ils songer à désamorcer non seulement les bombes et les mines qui frappent d’effroi ses rues et ses campagnes, mais également toutes celles qui compromettent son langage et son champ lexical. Un discours offensif, discriminant, haineux, rempli d’insultes, de mépris et de contre-vérités n’est-il pas tout aussi funeste et brutal qu’un coup de poignard?
Par une attitude résolument pacifiste, une nouvelle génération de jeunes algériens a captivé récemment les regards du monde. Ce qui est loin d’être anodin d’autant plus qu’une telle posture exige vaillance, humilité et générosité. La cultiver reviendrait à assurer au pays un capital bien plus inestimable que les rentes pétrolières. Cela implique pour cette jeunesse de songer à désamorcer toutes les frustrations nées du déni et de l’exclusion y compris, le déni linguistique et identitaire.
En Algérie, cela se traduira par exemple par l’abrogation du texte constitutionnel qui décrète que le pays est « une terre arable ». Les rédacteurs de ce passage pouvaient-ils prendre la mesure de la violence que cette contre-vérité produirait sur les autochtones de ce pays que nous sommes? Ont-ils conscience du caractère inutile de cette exagération qui en plus les déprave aux yeux de la planète ? L’Algérie et tous ces pays dits « arabes » sont les avatars d’un monde révolu, la dernière espèce étatique à se retrouver sur une base fondamentalement ethnique et raciste?
La violence est une entreprise coupable qu’aucune loi humaine ou divine ne saurait disculper. Au-delà des douleurs qu’elle peut infliger, elle corrompt les âmes et insuffle au médiocre une témérité : un sentiment qu’il n’aurait jamais dû éprouver. Lorsque, à tort ou à raison, elle est associée à la réussite d’un dessein, elle fait encore plus de dommages en se suggérant aux mentors comme la lauréate et la détentrice de tous les mérites.
Bâtir un monde apaisé implique des paroles inspirant la paix et la concorde. Car, si la violence éclot dans le verbe, c’est aussi en son sein qu’elle s’étouffe et souffle son dernier soupir, lorsque les conditions s’y apprêtent.