Il y a quelques jours j’avais écouté les paroles d’un invité sur un plateau d’une chaîne d’information en continu. Comme les connaissances apprises ont cette particularité d’être répétées, c’est leur raison d’être, j’avais l’impression d’assister à mon très ancien cours d’histoire des idées politiques.
Bien que cela soit annexe et marginal dans ce cours, quelques éléments constitutifs des discours politiques ont été étudiés. L’intervention de l’invité sur le plateau concernait le discours de Donald Trump lors de son intronisation.
Un discours politique à destination d’une foule doit impérativement être simple, dans son contenu comme dans ses mots. La raison est assez logique, il faut s’adresser à des publics très variés dont le rapport à la compréhension d’un exposé oral n’est pas identique.
D’autant que le discours adressé aux foules n’a absolument pas le même objectif que celui prononcé devant un public plus restreint que la complexité n’effraie pas si elle est utile aux arguments qui se veulent précis et convaincants.
Les foules sont présentes pour être entraînées, galvanisées et soulevées par un discours qui veut les rassurer et les convaincre de la force du personnage politique à affronter les difficultés, combattre les opposants et faire face aux fléaux qui s’abattent sur un peuple qui attend son guide, son sauveur.
En fait, en légère précision de ce qui a été affirmé précédemment, si le même principe s’applique aux publics plus confidentiels, il s’exprime dans des gradations plus adaptées. S’il peut être déclamatoire avec des tonalités et une gestuelle enflammées, il reste dans une marge convenue. C’est le cas d’un discours au parlement, dans des institutions importantes ou lors d’une rencontre internationale.
Pour revenir au discours destiné aux foules, à la simplicité il faut ajouter la répétition. Il faut marteler les points forts dans tous les discours, dans une fréquence qui peut être journalière lors des campagnes électorales.
L’un des messages martelés avec plus de force que les autres est celui du slogan de campagne, une idée simple à retenir en quelques mots. Ce slogan peut être également celui exprimé spontanément dans un discours et retenu car les médias l’ont capté et en fond une base de leurs résumés et comptes rendus.
Le martellement doit être accompagné par une tonalité et une gestuelle identiques à chaque intervention devant les foules. Il faut qu’elles deviennent la marque de la personnalité politique qui s’exprime. Cela peut être une marque vestimentaire, couleur, forme, ou même une coiffure. Tout cela forme un tout qui identifie l’homme politique.
On apprend également, ce qui est facilement observable, que les champions de l’exercice sont les populistes qui ont toujours existé dans l’histoire mais qui reviennent avec force dans notre monde contemporain. Haranguer la foule, la prendre pour témoin en désignant l’intelligentsia comme responsable de tous les maux et demander au peuple de l’aider dans son combat pour en être le sauveur, c’est la parfaire définition du populisme.
Simplicité, répétition, slogans courts et percutants, tonalité et stature, ils en sont les champions. Et nous voilà dans le cœur de notre réflexion, ce discours populiste aux foules est identique aux comportements des enfants à vouloir exprimer avec force leur demande, leurs arguments ou leurs sentiments, joie ou colère.
C’est aussi, même si nous sortons là également, comme pour les enfants, du cas des populistes, le discours simpliste et répétitif des élèves et étudiants qui n’arrivent pas à aller au-delà des affirmations répétées dix fois dans une copie ou lors d’un exposé oral.
L’empereur de ce discours populiste à destination des foules est bien Donald Trump. Martèlement des slogans, extrême simplicité des prises de position jusqu’aux mensonges, vocabulaire limité à un élève de sixième.
Et dans la simplification, il y a un mode très distinctif, le langage binaire. Pour Donald Trump, le discours binaire, identique à celui d’un collégien, est frappant. De là à affirmer qu’il a un niveau cognitif très bas, le pas n’est pas grand à faire, d’ailleurs beaucoup de ses compatriotes le disent.
Ils sont nos amis ou nos ennemis, nos partenaires ou nos concurrents, notre chance ou notre danger, je suis content ou en colère, mes collaborateurs sont fidèles ou infidèles. Jusqu’au langage binaire enfantin très surprenant « « it’s a good guy ou it’s a bad guy ». On a même entendu au lendemain de l’investiture « L’Europe n’est pas gentille avec nous ».
Tous les discours des hommes politiques aux foules ont par nature cette tendance à se rapprocher de cette tentation, nous en avons expliqué les raisons. Sauf que s’ils restent juste une tentation de facilité, ils sont dans des cas clownesques comme celui de Donald Trump, tout autant très dangereux.
Boumediene Sid Lakhdar