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Ferhat Mehenni et le racisme anti-kabyle

OPINION

Ferhat Mehenni et le racisme anti-kabyle

Said Bensedira, un blogueur algérien réfugié à Londres, vient de lancer un appel à l’extermination des militants et sympathisants du Mouvement pour l’Autodétermination de la Kabylie (MAK) résidant dans les wilayas de Bejaia et Tizi Ouzou.

Il a, par ailleurs, traité ses cibles de chiens, de terroristes et d’autres noms qui servent à rabaisser ces militants, pourtant pacifistes, au rang de sous-humains, voire de pestes dangereuses et néfastes, dont il faut se débarrasser au plus vite pour le bien du pays – un procédé commun à toutes les entreprises génocidaires. 

Avant de devenir président du MAK, Ferhat Mehenni était connu pour son activisme politique, notamment à travers ses chansons, pour la reconnaissance de la langue et de la culture berbères. Les textes de ses chansons reflètent une sensibilité de gauche décomplexée et un internationalisme assumé. Le contraste est frappant entre le projet du MAK et les convictions passées du « maquisard de la chanson », comme l’a surnommé Kateb Yacine.

N’y a-t-il pas de meilleure vision pour la Kabylie que de vouloir l’enfermer derrière des frontières gardées par une armée et une police, présidée par une élite nationaliste, haranguant les foules sous un drapeau ethnique, et, sans doute, promulguant une économie de marché au service de nouveaux oligarques ? Ne serait-il pas préférable de s’inspirer des idées anarchistes et écologistes de Murray Bookchin et Abdullah Ocalan, mises en pratique, avec plus ou moins de succès, par les Kurdes du Rojava, au nord de la Syrie, par exemple ? Mais c’est là un autre sujet.

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Le fait est que depuis la crise berbériste de 1949 au sein du mouvement national, à chaque fois qu’un kabyle ait ouvert sa bouche pour prononcer le mot « tamaziɣt », on l’a réduit au silence à l’aide d’une muselière, parfois meurtrière, qui consiste à l’accuser, à tort, d’être un séparatiste, un agent de l’étranger, un ennemi de l’islam et de la langue arabe. 

Le génie politique de Ferhat Mehenni est d’avoir incarné l’image parfaite projetée par les racistes de tous bords sur les habitants de sa région natale. Il semble leur dire : « vous m’accusez d’être un séparatiste ? Eh bien, je le revendique. Vous dites que je suis un agent de l’étranger ? Mais oui, du moment que les ennemis officiels du pouvoir, Israël et le Maroc, sont mes meilleurs amis. Je suis contre l’islam ? Assurément puisque c’est ce que vous appelez un laïc. Je rejette la langue du Coran ? Parfaitement, parce que vous l’utilisez comme une arme contre ma langue maternelle. » 

Pour Saïd Bensedira, Naima Salhi et leurs semblables, Ferhat Mehenni est un don du ciel. Sous prétexte qu’ils veulent défendre le pays contre ceux qui cherchent à le diviser, ils déversent toute leur haine anti-kabyle, tous leurs fantasmes meurtriers, toutes leurs frustrations personnelles, sur les militants du MAK et son président.

Il est impossible d’imaginer ces gens en train de cracher les mêmes insultes et de proférer les mêmes menaces contre un mouvement équivalent du MAK, mais islamiste et baathiste, prônant l’indépendance du Constantinois ou de l’Oranie. Ferhat est à créditer du mérite d’avoir offert à ces gens une opportunité de se découvrir au grand jour. 

Auteur
Kamel Boukherroub

 




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