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Il n’y aura pas de révolution sans femme

L’OEIL DE ZINA

Il n’y aura pas de révolution sans femme

« Tu ne devrais pas rentrer seule à cette heure là »… « Fais attention, tu devrais attacher tes cheveux »… « A ta place, le maquillage, j’éviterais ! »

Toutes ces injonctions que les jeunes femmes reçoivent en permanence partent d’un seul et même postulat : la femme est une victime potentielle. Une proie susceptible de tomber dans la gueule d’un prédateur assoiffé, qui n’a d’autre choix que d’assouvir son besoin irrépressible. Les hommes qui sifflent, les voitures qui s’arrêtent, les regards libidineux d’hommes (qui ont parfois 3 fois leur âge) …Voici l’univers normale d’une adolescente de l’espace méditerranéen. Après avoir bravé tous ces obstacles, une fois rentrée à la maison, elle pourrait se sentir soulagée. Enfin en sécurité. Mais les reproches pleuvent.

« Tu es sortie comme ça ? ». Le « comme ça » étant déclinable à l’envie (voile intégrale, string qui dépasse, talons, rouge à lèvres, mèche de cheveux, survêtement volontairement moche…). Tout sera prétexte à commentaire. La société entière se sent autorisée à constater, épier, juger le comportement des femmes.

Il faut être jolie mais pas trop. Intelligente mais pas trop. Avoir de la personnalité mais pas trop. Ces injonctions schizophrènes font le lit de générations entières de femmes qui seront des parfaites consommatrices d’une industrie fondée sur leur insatisfaction entretenue.

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Passer sa vie à se demander ce qu’on pourrait faire pour n’essuyer aucune remarque, à rechercher l’attitude clé, le graal. Ne pas trouver puis avoir peur d’avoir une fille à son tour, et se demander comment la protéger des milliers de cons qui l’attendent dehors.

Et si on repartait de la case départ comme au Monopoly ? Si on changeait le postulat ? Pourquoi ne pas demander aux hommes de changer leurs attitudes plutôt que de demander aux femmes de s’effacer, se broyer, se mésestimer ?

Je vous propose l’exercice dans l’autre sens.

« Tu ne devrais pas suivre des femmes à cette heure-là, tu vas leur faire peur. »

« Fais attention, si tu la touche tu vas en prison. »

« A ta place je ne la sifflerais pas comme ça dans la rue. »

« …Déjà parce que ta frustration ne donne envie à personne, donc si tu n’apprends pas à la contenir, tu ne seras jamais séduisant aux yeux d’une femme. Ensuite parce que si tous tes copains et toi faites pareil, personne n’aura envie de vivre ici. Cette société hyper masculine rend l’air irrespirable. Cette absence de légèreté, cette pesanteur contribue à donner envie à des générations entières de jeunes de mourir en mer plutôt que de rester ici. »

J’ai envisagé de venir vivre en Algérie à la fin de mes études. Apporter une pierre à l’édifice avec ces compétences nouvellement acquises. Retrouver in situ la culture de mes parents. Pourquoi pas après tout ? Les paysages, la langue, la gastronomie familiale. Les arguments étaient nombreux. J’ai coupé court à toute velléité en constant un fait simple, objectif et irrémédiable : mon absence de pénis.  

Auteur
Zina Mebkhout

 




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