Pour de nombreux villages de Haute Kabylie durement éprouvés par les incendies du mois d’août 2021 qui ont causé plus d’une centaine de morts et presque autant de blessés ainsi que la destruction de plus de 100 000 hectares de couvert végétal, cette période estivale restera à jamais gravée dans la mémoire comme une véritable saison passée en enfer.
Une année après, la plaie reste vive et la douleur tenace. Beaucoup de familles éplorées par la perte d’un être cher tentent difficilement de faire leur deuil.
Aïn El Hammam, Larbaa Nath Irathene, Azazga, Illoula, Ath Yenni : le temps des chrysanthèmes
Agoulmime, fraction de l’agglomération villageoise des Ikhlidjene, dans la commune de Larbaa Nath Irathene, a revêtu le voile du deuil, en ce 9 août 2022, journée dédiée au souvenir des victimes du terrible incendie.
La petite bourgade haut perchée sur la crête d’une colline surplombant un immense maquis en dénivelé par où est venu le feu ravageur, tôt dans la matinée du 9 août 2021, compte à elle seule 24 morts et près d’une dizaine de grands brûlés dont certains porteront à jamais les stigmates du feu.
Accompagné d’une forte délégation de fonctionnaires et d’élus, le wali s’est recueilli, sur fond de l’hymne national diffusé par une enceinte sonore et de la lecture de la Fatiha, à la mémoire des victimes dont les sépultures sont rassemblées dans un petit carré aménagé dans un coin du village.
Le temps était aussi aux chrysanthèmes et à la célébration des morts dans de nombreuses localités, en cette fin de la première quinzaine du mois d’août,
Du village Irgeb, dans la commune d’Illoula, à At Bouada, près d’Azazga, à Azrou Uqellal et Ighil Bougueni, à côté d’Ain El Hammam, en passant par Ath Yenni et Ath Aggouacha, près de l’ex-Fort National, des cérémonies de recueillement à la mémoire de toutes les victimes qui ont été happées par les flammes durant les journées du 09 au 10 août de l’année écoulée où qui ont succombé à leurs blessures, ont été organisées à l’initiative des villageois.
A Ait Agouacha, le maire a organisé dans la journée du 10 août, une caravane qui a sillonné tous les villages qui compte des morts avec recueillement et dépôt de gerbes de fleurs sur la tombe de chaque victime. Des victimes qui ont droit à des hommages sur les réseaux sociaux.
« Yasmine Chenane, première victime des incendies du 09 août 2021. Vingt-deux ans et beaucoup de courage, happée par les flammes à At Yenni pour avoir sauvé 3 femmes, 4 enfants et 15 moutons. Hommage à toutes les victimes de ces incendies pour lesquels nous attendons vérite et justice », écrira sous forme d’épitaphe l’universitaire et syndicaliste bien connu, Abderazak Adel, sur sa page Facebook.
A Ibouyousfène, dans la commune de Bouzeguène, une chorale de femmes à entonné une ode à la mémoire des victimes, dans une vidéo largement partagée sur le même réseau social.
La chronique de l’horreur
Dans tous les villages où nous sommes passés, les témoignages de l’horreur reviennent comme une triste litanie. Les souvenirs de l’épouvante, du sauve-qui-peut qui s’est emparé des villageois devant l’avancée des murs de feu qui dévoraient tout sur leur passage hantent encore les esprits et reviennent comme poussés par une envie de dire et de verbaliser des peurs qui ne sont pas totalement évacuées. Le temps n’a pas encore effacé les stigmates des événements traumatisants. Les flammes sont encore brûlantes dans les mémoires.
Le besoin de témoigner et de verbaliser ses émotions, ses peurs et son stress est toujours prégnant. Tout ne semble n’avoir pas été dit ou pas suffisamment. Même si certains comme Nacera Haddouche, du village Azrou u Qellal près de la ville de l’ex-Michelet se refusent à l’exercice des questions réponses.
Victime des feux qui ont assailli son village, l’avocate a vu une partie de la maison familiale en proie aux flammes. « Le feu s’est insinué dans une chambre de notre maison, brûlant tout ce qui s’est trouvé. Par miracle, les flammes ne se sont pas déplacées vers les autres espaces de la maison. Des voisins sont vite venus à notre rescousse, ma mère et moi. On est passé près d’une catastrophe, deux bouteilles de gaz butane se trouvant dans un coin de la cour ont manqué d’être la proie du feu. On a frôlé l’explosion », se contentera-t-elle de dire.
Avocate connue du barreau de Tizi Ouzou, Nacera Haddouche avoue ne plus vouloir évoquer les événements de l’été passé et leur cohorte de tragédies et de victimes. Même attitude chez Amar Bensalem, du village Agoulmime/Ikhlidjene. Véritable miraculé, le septuagénaire cache difficilement sa peine visible sur un visage « mangé » par un barbe poivre et sel fournie et grossièrement taillée. Une apparence quasi négligée qui est le signe du deuil permanent porté par ce villageois, mari et père de famille éploré : Amar Bensalem qui en plus de son fils de 16 ans qui figure parmi les grands brûlés a perdu sa femme et ses deux filles. Véritable bréviaire de l’horreur, le récit de la mort atroce de ces trois femmes restera longtemps dans les annales.
Dans leur tentative de fuir, la maman et ses deux filles dont l’une venait d’avoir son bac ont été surprises par le feu alors qu’elles cherchaient à se réfugier dans une salle des fêtes située en hauteur du village, sur la RN15.
Ne pouvant échapper à l’avancée inexorable et ravageuse des flammes, elles périront. Totalement calcinées, le mère et ses deux filles ont été soudées les unes aux autres par la chaleur, comme pour se protéger des flammes qui les a enveloppées de toutes parts. Geste illusoire mais o combien significatif sur la force de l’instinct maternel. Il en dit long aussi sur la volonté inextinguible et farouche de l’être humain à s’accrocher à la vie.
Rien n’est oublié. Il y a des douleurs muettes. Qui demeurent vive à jamais. Ce qu’a vécu la Kabylie en ce mois d’août 2021 est inoubliable surtout que beaucoup de questions restent sans réponses sur la concomitance des incendies.
Reportage de Samia Naït Iqbal
Momo,
Rien qu’à voir le paysage j’ai des crampes dans le ventre, c’est une région mal aimée que les pouvoirs successifs cherchent à détruire et sans jeux de mots à réduire en cendre. Nous n’avons que ce que nous méritons! je ne parlerais pas ici des Hommes et des Femmes que la Kabylie à vue grandir qui lui ont tourné le dos qui ont honte de parler leur langue lors des séminaires, ou avec les officiels du pays ou du monde. Merci à eux de nous avoir enterré vivant.
Une région défigurée à l’image du moyen orient qu’ils veulent imposer chez nous!, Maître d’écoles, Professeurs, Avocats, Maires…. Nous vous demandons à tous de vous réveiller pour diffuser notre belle langue dans les rouages des pouvoirs publics et dans toutes les institutions.
Paix à leur âme. Cette tentative de génocide restera une page noire dans l’Histoire de la Kabylie. Nous partageons la douleur de toutes familles endeuillées et il est difficile de faire le deuil un an après. La visite du wali est tout simplement insupportable; le wali est un larbin du pouvoir algérien qui a organisé ces feux avec des moyens sophistiqués (usage de phosphore blanc). teboun et chiengriha vont bientôt avoir à répondre devant la Cour Pénale Internationale.