Si la Russie demeure encore le pays le plus visé par cette cyber-war mondialisé, ses hackers sont les plus redoutés de part la planète. Leur secret c’est d’être former dans les mêmes établissements spécialisés.
C’est en jetant un simple coup d’oeil sur sa Cybermap, que le géant de l’antivirus informatique russe Kaspersky, nous fait découvrir et en direct, qu’actuellement l’Algérie est parmi les 48 pays les plus attaqués au monde par une cybercriminalité utilisant notamment, le programme malveillant Trojan.Win32.Agentb.bqyr atteignant les 35,16 % d’utilisation pour la seule période allant du 25 septembre dernier au 24 octobre en cours.
Une information qui survient au moment où Evgueny Valentinovitch Kaspersky, le co-fondateur du géant de l’informatique Kaspersky Lab., fêtait ses 60 ans le 4 octobre en cours. C’est un homme serein qui arbore à chaque rencontre son téléphone portable analogique pour dire que c’est ici que s’arrête toute cyberguerilla Nordatlantique. En 2024, Kaspersky Lab a atteint les 822 millions de dollars de chiffre d’affaires, sachant que depuis 2022, son entreprise est membre du Conseil des experts du gouvernement russe, faisant du fils de l’ingénieur concepteur et de l’historienne et archiviste de Novorossiyesk ( ville sur la mer Noire), un des hommes les plus redoutés tant en Russie que dans le reste du monde.
Son entreprise est toute sa vie, affirme-t-il au correspondant du quotidien russe Kommersant dans son édition régionale de la ville natale de Kaspersky. Pour cet «archiduc» de l’antivirus informatique, le secteur de la sécurité informatique est d’abord une affaire de confiance, lui, qui ne travaille exclusivement qu’avec des logiciels malveillants. « C’est beaucoup moins complexe que ce que la nature peut créer», estime-t-il avec certitude avant d’indiquer que toutes «les infrastructures du monde, absolument tout, reposent sur des systèmes d’exploitations non sécurisées» et que la technologie numérique ne devient pas seulement coûteuse, elle est aussi cruciale en matière de sécurité.
C’est à travers cette démarche que Evgueny Valentinovitch Kaspersky (EVK) s’est retrouvé le 25 octobre du mois en cours à Hanoï (Viet-Nam) et sur invitation du ministre de la Sécurité, le général Luong Tam Quang, afin d’assister à la cérémonie de signature de la Convention des Nations unies pour la lutte contre la cybercriminalité dite Convention de Hanoï. Un domaine connu de la part de EVK puisque le portefeuille de son entreprise comprend une dizaine de solutions pour la protection d’infrastructures allant des particuliers aux entreprises, en passant par les distributeurs de billets automatiques et les systèmes industriels. Pour lui, la technologie numérique, ne devient pas seulement coûteuse, elle est aussi cruciale en matière de sécurité.
Pour ce géant de l’antivirus informatique, « les pays qui se respectent seront contraints de conserver toutes les informations à l’intérieur de leurs frontières ». Un avis de poids de la part de celui qui, en 2012 figurait au 40e rang mondial parmi les 100 penseurs les plus influents en cette année, selon le magazine Foreign Policy et au 8e rang du classement des « personnes les plus dangereuses au monde » selon cette fois le magazine Wired, pour avoir révélé un programme de cyberespionnage US au Moyen-Orient.
L’homme travaillait 12 à 14 heures par jour, sans un jour de repos ni même de vacances entre 1991 et 1996. Le monde du social impérialisme qui s’écroulait à ses pieds, ne l’intéressait pas. Il préfère ce consacrer à son travail et c’est bien en 1989, qu’il réussit à «attraper» son premier virus informatique dont il est devenu totalement obsédé. Membre de l’Organisation internationale de recherche informatique (CARO), Kaspersky est surtout un style de management où les décisions ce prenaient au sein même du groupe de travail qu’il fond au départ en fixant les orientations générales, mais sans en devenir l’opérateur principal à la différence des négriers de la Silicon-Valley.
À ses débuts, EVK s’occupait de l’aspect technique et n’est devenu PDG de l’entreprise portant son nom qu’en 2007. Sa femme Natalya qui l’accompagnait dès ses débuts, quittera la société en 2011 pour devenir directrice des ventes d’une boutique de solutions antivirus. C’est elle qui proposa le nom de Kaspersky à ce nouveau holding informatique. En 1997, le chiffre d’affaires de la société atteint l’heureux million de dollars et en finalité, on pouvait jouer dans la cour des grands de l’informatique sécuritaire. Chaque jour, Kaspersky Lab détecte plusieurs milliers de fichiers suspectés de contenir des fonctionnalités malveillantes, laissant dire que « le niveau de sécurité des infrastructures est bien inférieur au professionnalisme de ceux qui les attaquent ».
Le cas EVK est surtout à retenir aujourd’hui comme un des faiseurs de la nouvelle géopolitique russe dans le monde. Après le déménagement de sa famille de Novorossiysk vers Dolgoproudny, près de Moscou, le jeune Evgueny s’est inscrit à l’école Gastello n° 3, puis, après avoir remporté une olympiade de mathématiques, il entrera à l’internat spécialisé en mathématiques de Kolmogorov, auprès de l’Université d’Etat de Moscou.
En 1982, EVK s’inscrit au département technique de l’Ecole supérieur du KGB (actuel FSB), où il a étudié la cryptographie et la sécurité informatique. Après avoir obtenu son diplôme, il travailla au sein d’un Institut de recherche top-secret du ministère de la Défense où il a découvert le virus informatique, Cascade, lui permettant de créer son premier et propre système d’antivirus.
En 1991, EVK dirige un groupe de travail au sein du Centre des technologies de l’information (KAMI), développant la sécurité informatique. Trois après, il créera son premier antivirus qui remportera un concours organisé par l’Université de Hambourg (RFA) acquérant depuis, la reconnaissance mondiale.
Aujourd’hui, les entreprises informatiques russes dont Kaspersky Lab, se préparent à augmenter le coût de leurs licences logicielles de 10 à 40 % en 2026, selon le quotidien Kommersant du 26 octobre. Parmi les raisons invoquées figurent la hausse de la pression fiscale, le taux directeur élevé de la Banque centrale, la hausse des coûts de personnel et les investissements dans le développement de nouvelles solutions.
Mohamed-Karim Assouane, universitaire.

