24 avril 2024
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« La belle de la source » d’Armand Vial

Quel joli bijou que ce roman d’Armand Vial, publié aux éditions Tafat, en mars 2021! « La belle de la source », un écrit savoureux, aux sonorités orientales, qui se lit d’une seule traite.

Pas tout à fait récit, pas totalement roman, le livre est, en quelque sorte, une prospection dans l’intimité du sculpteur Francis de Saint-Vidal, avec description historique, artistique et littéraire de son époque.
L’auteur, photographe et écrivain né à Constantine, y revient sur cette fameuse fontaine d’Ain Fouara à Sétif, fantasme de son enfance, réalisée par ce sculpteur-là en 1898. Il contextualise les faits historiques, notamment l’atmosphère dans laquelle aurait vécu et travaillé son sculpteur.
Au début du texte, Armand Vial donne libre cours à son imagination, en campant le personnage de Francis Saint-Vidal.
Le vécu du sculpteur est passé au peigne fin, avec ce regard littéraire aussi subtil que curieux des détails de A. Vial. Le « je », dénominateur exclusif de l’écriture autobiographique caractérise surtout les premiers chapitres du livre qui appâtent le lecteur, au fur et à mesure que ce dernier avance dans la découverte du personnage.
Puis, c’est la sculpture, elle-même, qui fut dépeinte, sans cesse interrogée, passée aux aveux et située dans le contexte bouillonnant de l’époque.
La belle dame sétifienne, toute en panache, symbole ancestral, s’il en est un, d’une cité aux mille facettes ; puits de mythes et d’histoires de toutes sortes, oeuvre architecturale qui, dans l’imaginaire collectif, colle intrinsèquement à Ain Fouara, « la source jaillissante », traverse de bout en bout l’écrit de Vial pour la recentrer autour de l’histoire de la célèbre « Amélie », une suissesse d’origine, qui a servi de modèle au sculpteur. Qui est-elle? Comment a-t-elle pu connaitre, puis inspirer Francis de Saint-Vital? Qu’est-ce qui l’a poussé à poser nue pour lui? La nudité, sans être l’objet principal de cette oeuvre semble y être pleinement liée.
Armand Vial nous emmène, en effet, dans un voyage onirique, entre mythes et réalités, nous replongeant dans « ce petit monticule de pierre brute qui semble descendre vers nous […] de cette femme assise, en équilibre, légèrement penchée sur sa droite.
Son corps, partant de sa tête à sa cuisse et sa jambe gauche, jusqu’à son pied, suit une ligne en diagonale. Elle est nue, d’une nudité naturelle, hors du temps. Son physique est réaliste, mais pudique, sans effet particulier. Sa cuisse droite, légèrement repliée, cache son sexe. Elle porte une longue chevelure, recouvrant à peine ses épaules et suivant le mouvement de ses bras jusqu’à ses mains, une étoffe légère, sans motifs, aux nombreux plis d’ondulations… (p.106) ».
C’est, sans doute, dans toutes ces ondulations-là, -le mot n’étant pas du tout approximatif en effet-, qu’Armand Vial nous entraîne, non sans un brin de génie et de virtuose. Une écriture au long souffle qui nous jette à la figure toutes les nostalgies artistiques du passé et puis nous fait revisiter la célèbre belle de la source. Cette oeuvre, tant de fois saccagée, profanée et détruite, par les mains de ceux qui ne connaissent de l’art que « l’obscène », « le salace » et le « pervers ». Des gens incultes, en rupture avec toute notion de civilisation. Bref, ce livre est tout simplement un bijou, à lire et à découvrir aussi vite que possible!
Kamal Guerroua
Armand Vial, « La belle de la source », Tafat éditions, mars 2021, p 198. Prix public : 600 DA/16€.

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