6 novembre 2024
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La Kabylie n’est pas un fusible

TRIBUNE

La Kabylie n’est pas un fusible

Nous assistons depuis quelques semaines à des tentatives multiples et insidieuses de placer la Kabylie dans une position du fusible qui éteindrait le mouvement en marche pour la démocratie et la justice sociale en Algérie.

Des manipulations sont régulièrement mises en œuvre par des pseudo-opposants politiques et par les barons du régime en perdition. Dans un premier lieu, des manipulateurs ont essayé de faire croire aux Algériens arabophones que le drapeau amazigh n’avait pas sa place dans les manifestations pour la dignité, la liberté et la démocratie. Ils ont essayé d’isoler la Kabylie par la cause qu’elle a toujours défendue sous l’emblème que ses enfants ont conçu et fait s’étendre sur toute Tamazgha de Siwa aux Îles Canaries.

Ce qui a toujours fait la gloire du Kabyle est sa combativité reconnue par ses compatriotes à travers toute Tamazgha, et bien au-delà, c’est sa capacité à s’unir devant l’adversité et à s’organiser pour combattre ce qu’il perçoit comme une menace. C’est ce que j’ai nommé à quelques circonstances « l’union réactive », dans sa connotation non péjorative.

Il est vrai qu’à travers l’histoire récente de la Kabylie, l’union réactive face à la menace ou à la provocation constituent une force de résistance extraordinaire. L’union réactive a permis à la Kabylie de continuer d’exister en tant que telle, mais elle ne pourra s’en servir avancer et de gagner. La stratégie de l’union réactive est semblable à stratégies adoptées dans plusieurs sports (en l’occurrence le football) pour maintenir le statu quo ou se protéger d’une défaite.

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La Kabylie se doit de passer à « l’union active » basée sur des stratégies gagnantes pour la positionner gagner, pas uniquement à se défendre.

À travers l’histoire récente, les gains réalisés dans les domaines politiques, socio-économiques et identitaires (y compris dans le domaine linguistique) ne sont pas à la mesure des investissements et des sacrifices consentis. La Kabylie a dépensé une énergie considérable à défendre Tamazight, l’identité commune à tous les Algériens, la démocratie et la justice sociale pour tous les Algériens, après avoir payé le prix le plus élevé pour la décolonisation territoriale de l’Algérie.

Seulement, après la décolonisation, la Kabyle s’est retrouvée seule face à un régime qui l’a sans cesse réprimée, et à plusieurs reprises dans le sang.

Aujourd’hui, le régime qui a toujours réprimé la Kabylie est en train de se débattre pour sa propre survie face à une jeunesse algérienne qui a enfin compris que son avenir ne peut pas s’accommoder de la survie d’une mafia politico-financière qui l’a appauvrie sur les plans matériel, identitaire et moral.

Ce régime a épuisé le capital sympathie de la guerre de libération dans laquelle la Kabylie a joué un rôle d’avant-garde indiscutable. Aujourd’hui, ce régime fait face à tout le peuple qu’il croyait avoir domestiqué pour toujours. Les graines semées par la Kabylie au cours de son combat solitaire face au régime dictatorial ont finalement germé et sont en train de pousser en révolution pacifique à travers tout le territoire algérien. Le combat de Abane Ramdane pour la suprématie du politique sur le militaire est en train de prendre la forme d’une nouvelle révolution que le peuple algérien mène en 2019.

La Kabylie est bien engagée dans le combat des Algériens pour la dignité et la démocratie qui sont en conformité totale avec ses traditions millénaires de démocratie et ses aspirations légitimes de vivre dans un espace démocratique qui permettrait à son génie populaire de s’exprimer et de s’épanouir.

La Kabylie doit, elle aussi, profiter du fruit de son combat pour l’indépendance citoyenne telle que l’avaient souhaitée ses enfants lors de la création de l’Étoile nord-africaine en 1926. Ceux qui ont toujours combattu les revendications de la Kabylie tentent aujourd’hui de l’isoler pour lui couper tout espoir de profiter de la démocratie comme il l’a empêchée de jouir de l’indépendance qu’elle a chèrement payée.  Elle a été marginalisée et privée de développement, et ses élites accusées de menacer l’unité du pays à chaque fois qu’elles tentent de dénoncer ces mesures punitives en raison de ses aspirations démocratiques et identitaires.

La Kabylie ne peut pas accepter d’être isolée et surtout pas être utilisée pour diviser le combat actuel pour la démocratie en Algérie. Elle n’acceptera jamais de porter l’odieux du sabotage du mouvement. Elle ne doit pas accepter pas le de fusible qu’on veut lui faire jouer.

La Kabylie saura faire les choix qui lui garantiront une place digne des grands peuples qui se tiennent toujours du côté des causes justes. Elle saura défendre intelligemment ses intérêts et ses enfants dignes, à l’image de M. Issad Rebrab, mais elle laissera tous ceux qui ont accepté de jouer contre elle au jugement par l’histoire ou par les tribunaux.

Le combat pour la démocratie a toujours le sien et celui de ses enfants qu’elle a sacrifié lors de tous les combats contre la colonisation, l’assimilation, la dictature, puis l’obscurantisme. Les Kabyles d’aujourd’hui, quels que soient leurs choix politiques, sauront mettre leurs intelligences en commun pour que la Kabylie sache préserver ses acquis obtenus dans la douleur et espérer en réaliser d’autres dans la paix et la démocratie.

Docteur Hocine Toulaït

Expert en politiques linguistiques – Canada

Auteur
Docteur Hocine Toulaït

 




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