20 avril 2024
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Là où passe le pétrole, l’herbe ne repousse plus ! 

REGARD

Là où passe le pétrole, l’herbe ne repousse plus ! 

« Quand ils auront coupé le dernier arbre, pollué le dernier ruisseau, pêché le dernier poisson, Alors ils s’apercevront que l’argent ne se mange pas. » Tatanka Yotanka

La rente pétrolière et gazière rend pratiquement inutile la production agricole et la facilité de payer les importations croissantes joue un rôle dissuasif non négligeable vis-à-vis de l’urgence du développement agricole. Alors que pour notre voisin de l’ouest, « gouverner c’est pleuvoir »  pour les algériens, « gouverner c’est importer ». L’ajustement du niveau de consommation aux ressources alimentaires a entraîné un processus d’importation de biens alimentaires de plus en plus chers sur le marché mondial. L’insuffisance de l’offre agricole locale est due essentiellement à la médiocrité des rendements qui n’enregistrent aucun progrès appréciables.

Les superficies consacrées à la céréaliculture n’ont connu aucune augmentation sensible ont au contraire régressées par rapport à la période coloniale. Le facteur explicatif est l’eau car disent les experts au-dessous de 400 mm de pluie la céréaliculture est impraticable et les rendements dérisoires. Si la pluie était un produit fabriqué par les usines occidentales, on n’aurait pas hésité à l’importer pour peu qu’on touche sa commission au passage. Heureusement que l’eau est un don de Dieu et non un produit marchand, que Dieu soit loué. Il est miséricordieux.

La crise qui affecte la production a des origines lointaines : elle découle de la spécialisation à laquelle a été soumise l’agriculture durant la période coloniale vers la satisfaction des besoins de la métropole et donc déconnectée des besoins de la population locale et des causes plus récentes se rapportant à la politique « socialisante » menée aux pas de charge au lendemain de l’indépendance par les pouvoirs publics. Les difficultés du secteur agricole ainsi que la faiblesse de la production céréalière sont à l’origine de la persistance et de l’approfondissement d’un vaste mouvement d’importations massives et coûteuses.

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Ces importations jouent le rôle  de soupape de sécurité pour le pouvoir parce que empêchant que la crise du secteur agricole ne traduise la faillite totale d’une économie largement dépendante de l’extérieur pour sa survie. « Et le cargo diabolique nous enchaîna à tout jamais » tant pour l’exportation de notre seule richesse naturelle exportable (les hydrocarbures) que pour l’importation de notre nourriture et de nos médicaments». Mais l’horrible vérité, c’est peut-être que les gouvernants qui se sont succédé ont besoin des importations pour asservir leur population.

Un peuple de paysans indépendants vivant de ses récoltes pourrait devenir têtu et fier pour demander l’aumône à ses dirigeants. C’est pourquoi les premières victimes des politiques agricoles sont les paysans indépendants et ce, à commencer par la révolution agraire. La révolution agraire a donné l’illusion que la justice sociale est rétablie alors qu’en réalité c’est le travail de la terre qu’on enterre.

La rente pétrolière rend dérisoire le surplus agricole potentiel et la facilité de payer les importations croissantes joue un rôle dissuasif vis-à-vis de l’urgence du développement agricole. Les importations sont un instrument imparable d’aliénation très efficace qui permet aux élites dirigeantes d’accumuler plus de pouvoir et plus de richesses. Mais cela peut également les mener à leurs pertes. La flambée des prix de produits alimentaires sur le marché international a été un des facteurs déclenchant de la chute des dictatures arabes et africaines.

L’Algérie se trouve dépendante du marché international pour son approvisionnement en produits céréaliers dans la mesure où elle est satisfaite par un groupe limité de pays dont la France d’où l’extrême vulnérabilité économique et la fragilité de son équilibre alimentaire.

Face à cette situation contraignante où le taux de dépendance croït rapidement et d’une manière alarmante, est-il possible de renverser la vapeur ? C’est à dire d’augmenter l’offre locale. Pour augmenter l’offre alimentaire, on peut, soit étendre la superficie cultivée soit améliorer les rendements. L’agriculture saharienne offre des perspectives rassurantes pour peu que la volonté politique soit manifeste. Les pays développés soutiennent la production, les pays rentiers soutiennent les importations c’est-à-dire financent la dépendance du pays aux variations des prix vers la hausse sur les marchés internationaux rendant vulnérables leurs populations.

L’Algérie est le seul pays au monde à négliger ses paysans, ses artisans, ses travailleurs qualifiés, ses fonctionnaires honnêtes, ses penseurs, ses créateurs alors qu’aujourd’hui en Europe, aux Etats Unis, le revenu des paysans est protégé et subventionné et la terre prend de la valeur. La revalorisation de la terre serait un moyen de redonner à l’algérien le goût du travail et non l’envie de fuir le pays ou de mettre sa vie en péril dans des embarcations de fortune. « La terre est comme la femme, plus on la laboure, et plus elle donne du blé ».

Le recyclage de l’eau permet non seulement de consommer moins d’eau mais de limiter également le rejet des eaux usées et donc de préserver l’environnement. Mais, dites-moi, qui pense inaugurer des stations d’épurations d’eaux provenant des villes et pouvant irriguer des terres agricoles avoisinantes. Cela ne fait pas sérieux, pardi ! Pourtant certains maraîchers peu scrupuleux pour répondre à une demande en fruits et légumes sans cesse croissante n’hésitent pas à irriguer leurs cultures maraîchères avec de l’eau usée non traitée directement pompée d’un oued nauséabond provoquant une véritable « catastrophe sanitaire ». En effet, depuis des années, les eaux usées envahissent les cultures et les terres agricoles et s’infiltrent dans les nappes phréatiques sans que cela dérange qui que ce soit.

Au Japon, l’eau est recyclée par immeuble parce que les japonais considèrent que le traitement de l’eau coûte moins cher que la pose de canalisations qui la transportent. Une étude de la consommation par usager peut donner des orientations des actions à envisager pour limiter le gaspillage. En Algérie, cette nécessité d’une meilleure connaissance des usages de l’eau ne semble pas faire l’objet d’études et de recherches. Pourtant, une connaissance détaillée des différents usages constitue un enjeu stratégique en vue de dégager les priorités d’actions pour une meilleure politique de contrôle des usages de l’eau.

Aujourd’hui, plus que jamais, la question de la légitimité tient de plus en plus à une efficacité des gestionnaires dans la satisfaction des usagers dans leur diversité. Que la gestion concrète soit assurée par un opérateur public ou privé, algérien ou étranger. Là n’est pas le problème. L’essentiel est que la gestion de l’eau soit prise en charge sérieusement et solidairement.

C’est une évidence,  la société algérienne a besoin d’eau « propre » pour étancher sa soif et  « épurée » pour  faire convenablement sa toilette et celle de ses institutions, en commençant naturellement par la tête pour descendre le long du corps et atteindre les orteils, comme elle a besoin d’air pur pour« respirer » et « croître » dans un monde sans état d’âme en perpétuelle agitation où le faible doit céder ses richesses naturelles au plus fort du moment.

Aussi semble-t-elle être prête à céder les réserves de pétrôle et de gaz se trouvant dans le sous-sol contre tout bonnement un peu d’eau et beaucoup d’oxygène car considère-t-elle, que si le pétrole et le gaz « polluent »,  l’eau et l’air « purifient », consciente de plus en plus que la terre algérienne n’a pas besoin du sang des guerriers mais de la sueur des hommes.

Pour ce faire, elle est à la recherche d’une nouvelle idéologie fondée sur le travail créateur de richesses et d’une pensée libératrice productrice de valeurs et de symboles pour la tirer de cette léthargie qui lui colle à la peau depuis plus de cinq décennies. Que de temps perdu ? Que d’énergie gaspillée ? Que d’opportunités ratées ? Dans un pays où s’accumulent des fortunes et où l’homme dépérit, on ne peut que méditer cet adage populaire : « une richesse amassée est un tas de fumier puant et que par contre une richesse répandue est un engrais fertile ».      

 

Auteur
Dr A. Boumezrag

 




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