8 février 2025
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La persécution des savoirs : les éditions Frantz-Fanon dans le collimateur

« Être libre, ce n’est pas seulement se débarrasser de ses chaînes ; c’est vivre d’une façon qui respecte et renforce la liberté des autres. » Nelson Mandela

À Boumerdès, au cœur d’une Algérie en quête de sens, les éditions Frantz Fanon rayonnent depuis des années comme un phare dans l’obscurité culturelle. Fondées et dirigées par Amar Ingrachen, cette maison d’édition familiale a su imposer sa marque dans un paysage éditorial souvent hostile.

Avec une quinzaine d’ouvrages publiés chaque année, elle incarne une vitalité rare dans un secteur fragile. Mais aujourd’hui, ce fleuron de l’édition se trouve dans la ligne de mire d’un pouvoir qui, à défaut d’arguments, multiplie les sanctions arbitraires.

La publication d’un livre qui dérange

 C’est l’ouvrage L’Algérie juive de l’auteure Hédia Bensahli qui semble avoir déclenché les foudres du régime. Un essai audacieux, certes, mais publié depuis plus d’un an sans susciter le moindre émoi.

Le livre, explorant une histoire occultée de la diversité algérienne, a soudainement attiré l’attention des autorités, non pas pour sa qualité intellectuelle, mais en raison de séances de dédicaces organisées récemment dans des librairies.

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D’abord à Alger, à L’Arbre à dire, puis à la librairie Cheikh de Tizi Ouzou, ces événements ont suffi pour que la machine répressive se mette en marche. Les deux librairies, accusées de ne pas avoir inscrit la mention « dédicaces de livres » sur leur registre de commerce — une exigence absurde nulle part prévue par la loi — ont été contraintes de fermer leurs portes. Ces sanctions surréalistes relèvent d’un délire kafkaïen : aucun établissement culturel au monde ne possède une telle mention.

Amar Ingrachen dans le viseur

Le coup de grâce est venu lorsque Amar Ingrachen, le directeur des éditions Frantz Fanon, a été convoqué au tribunal et placé sous contrôle judiciaire. Une sanction déjà lourde pour avoir osé publier un ouvrage jugé subversif. Mais cela n’a pas suffi : la préfecture de Boumerdès, dans un acte de mépris flagrant envers le système judiciaire, a scellé les locaux de la maison d’édition. Une double peine qui viole non seulement la loi, mais aussi les principes les plus élémentaires de justice.

Une répression sans limite

Cette attaque contre les éditions Frantz-Fanon s’inscrit dans un contexte plus large de répression. Après l’arrestation de l’écrivain Boualem Sansal, l’incarcération de centaines de prisonniers d’opinion, et la condamnation du jeune poète Mohamed Tadjadit pour un simple hashtag, c’est désormais la culture et les semeurs de savoirs qui sont ciblés. Le pouvoir semble décidé à étouffer toute voix dissidente, tout espace de liberté, qu’il soit politique, intellectuel ou artistique.

Une attaque contre l’intelligence collective

Ce qui se joue ici dépasse le cas d’une maison d’édition ou d’un livre. En frappant les éditions Frantz Fanon, le régime s’attaque à l’intelligence collective, à la transmission du savoir, à la mémoire. Il s’attaque à ce qui permet aux peuples de réfléchir, de comprendre, et donc de résister.

Pourtant, l’œuvre d’Amar Ingrachen et de ses semblables est essentielle. Ce sont eux qui, envers et contre tout, portent la lumière dans une époque sombre. Ce sont eux qui refusent que l’Algérie cède à l’obscurantisme, qui rappellent que la diversité et la liberté d’expression sont la sève d’une nation.

Un appel à la solidarité

Face à cette répression croissante, la solidarité est plus que jamais nécessaire. Chaque voix qui s’élève, chaque geste de soutien, chaque mot écrit pour dénoncer ces abus est une pierre posée sur le chemin de la liberté.

Les éditions Frantz-Fanon, malgré les scellés sur leurs portes, continueront de vivre dans l’esprit de ceux qui refusent de se taire. Et tant qu’il y aura des gens pour lire, pour écrire, pour créer, aucun pouvoir ne pourra éteindre cette flamme.

Aujourd’hui, c’est notre devoir de la raviver, de la protéger, pour que demain, l’Algérie retrouve la voie de la justice et de la dignité.

Kamel Bencheikh

9 Commentaires

  1. Je suis en France depuis l’âge d’1 ans , mes parents paix à leurs âmes étaient de anciens moudjahidines, j’ai fais mon service militaire en Algérie 🇩🇿, pour l’honneur de mes parents, j’ai 70ans toujours Algérien sur les papiers,carte de résidence et passeport algérien,j’aime mon pays, je serais toujours le rempart de l’obscurantisme, et l’intégrisme, et je suis pour la liberté d’expression, je dis le peuple algérien est solidaire avec le gouvernement, mais LA je dis STOP

    • SALAM KHEMIS
      Il ne faut pas confondre la PARTRIE et l’ETAT.
      On peut aimer, chérir, mourir pour son pays, sa terre natale voir d’adoption et vomir sur les dirigeants et l’ETAT.
      Je n’ai pas FAIT mon service national je le revendique haut et fort mais je peux mourir pour un centimètre carré de l’Algérie.
      Je n’ai jamais aimé le pouvoir algérien ; que je considère qu’il a été et il est composé d’IGNARES et de militaires arabisants (au lycée les plus nuls étaient orientés vers les études en arabe) maintenant ils se vengent….

  2. Le directeur des éditions Frantz Fanon, Amar Ingrachen est un homme sans honneur.
    Cet homme sans honneur a menti, a sali la mémoire d’innocents morts et qui ne pouvaient se défendre.
    Cet homme a agi sur ordre et sans discernement, cet homme a menti, manipulé, sali des hommes morts et enterrés.
    Cet homme n’a pas de valeur, n’a pas de dignité, n’a pas de d’honneur.
    Le sort que lui réserve ses maîtres, il le mérite!
    Vous vous rendez compte, il n’a même pas épargné les morts.
    Malgré toutes les babesses, le pouvoir le récompense par la fermeture des éditions Frantz Fanon et le contrôle judiciaire pour ce sinistre personnage.
    Voilà le sort que le pouvoir réserve aux KDS une fois utilisées et essorées par ce dernier.
    Après Ouyahia et Sellal, au tour d’amar Ingrachen.

    • En effet, quelque soit ce que le KDS fera a ses maitres, il sera toujours mal vu et le temps le ratrappera toujours.
      Cette metalité changera le jour ou le destin du pays sera pris en main par ses enfants.
      Ce jour la, il n’y aura plus de « diviser pour régner ».
      Qui fera confiance a des mercenaires qui machent sur leur ventre comme des serpents ?

  3. Autant la librairie de si Ali ou cheikh me concerne personnellement car juste après l’indépendance j’étais à l’école takoucht, pas loin de cette fabuleuse librairie où on allait trainer nos guêtres, il y’avait aussi la Sned pas loin où ils nous laissaient lire nos premières bande dessinée.
    C’était le bon vieux temps où le marché couvert de Tizi ressemblait à tous les marchés qu’on voit aujourd’hui dans toutes les petites villes en occident. Il y’avait un vieux juste devant le café de la place qui vendait des escargots, des cuisses de grenouilles, du cresson, et aussi des champignons. Il y’avait le novelty, chez Bob, le Djurdjura ou tout les week-end ends c’était apéro. On avait des enseignants Français, avec des encriers, avec un livre fabuleux  » le Monde merveilleux ».
    Et puis un jour sans crier gare, les cordonniers Egyptiens et bien d’autres sont arrivés en nous disant que nous étions Arabes. La suite tout le monde la connait.
    l’Algérie fût un pays magnifique, et si nous avions continué sur cette voie ce pays aujourd’hui avec toutes ces richesses serait l’un des meilleurs pays du monde. Malheureusement les kharabo islamistes ont fait ce qu’il est devenu,un enfer et une prison à ciel ouvert avec des tubes digestifs ambulants qui applaudissent à tout va des hommes en couches culottes.

    • Azul Vrirouche,
      C est peut être la nostalgie qui te fait écrire que « l’Algerie fut magnifique »
      C’est sans doute les années 70 ou fin 60 début 70.
      A l époque un certain boukharouba faisait de l Algérie son terrain de jeu.
      A l époque le minimum n existait pas.
      Un algérien ne pouvait pas construire un e maison.
      Je suis comme toi ce fut magnifique car on avait l espoir

      • Azul El Hassi, je parle de ce qui se passait juste après 63. J’étais encore jeune, donc pas assez politisé, mais une chose est certaine et je ne parle Que de Tizi, pas de mon vrai village natal. L’air était serein et les gens se sentaient en liberté. Boumediene a commencé quelques années après.
        Eh oui c’est aussi la nostalgie, car imagine que depuis les années 70 je n’ai plus jamais pu remettre un pied dans mon village,ni à Tizi. Et ce n’est pas par choix, malheureusement.
        Thanemirth.

  4. Je ne connais pas bien Amar Ingratchen mais j’ai eu à faire avec lui. En 2022, un ami àlgerien et moi avons publié un ouvrage collectif sur la réconciliation des mémoires franco algériennes auquel ont participe des personnalités diverses. Nous voulions que ce livre sorte le méme jour en France et en Algérie. Nous n’étions pas sûrs que la censure algerienne le laisse passer mais nous nous sommes adressés à lui et il reussi a le publier sans problème. Il a juste changé la couverture en chosisissant une photo du pont de Constantine et le titre qui était Mémoires en miroir Algerie- France par un vers d’Anah Greki  » Je suis vêtue de peau fraternelle ». J’ai croisé Ana Greki à la fac à Alger et j’étais donc ravi de ce changement. Il ne m’ donc laisse qu’un bon et amical souvenir

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