27 mars 2024
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L’Algérie sera à nous tous ou à personne !

COUP DE GUEULE

L’Algérie sera à nous tous ou à personne !

Pour dire vrai, et rien ne cacher de mes vingt dernières années de sommeil paradoxal, je ne rêve plus. Je ne fais qu’attendre.

Et voilà que, depuis un mois, l’air vicié qui s’était accumulé dans mes poumons, à force d’étouffer mes envies, se disloque dans mon poitrail comme une mine sur laquelle on met le pied. Invraisemblable que cela puisse paraître, je me sens bien, depuis. Je recommence  à avoir des rêves ou plutôt à rêver. Je m’endors aux trois horloges pour que mes nuits soient hantées de ces âmes qui, trente ans en arrière, un certain 5 octobre 88, ont laissé leur vie pour que l’adolescent que j’étais puisse respirer un air de liberté.

Je me réveille, aujourd’hui, à la place Audin par les voix de ceux qui pourraient être mes enfants , et qui sont prêts à laisser leur vie pour que l’air de liberté que l’on nous a confisqué le 5 octobre 88 et l’air de révolte qui souffle encore aujourd’hui, nous soit restitué.

Aucune force politique ne peut, aujourd’hui, contraindre cette jeunesse à une quelconque régression, fusse-t-elle féconde ; celle que l’on redoutait à notre époque et qui a fini par nous disqualifier du champ politique, la bête immonde, l’islamisme. On a bien vu ce que cela a donné au pays de confier la politique aux gradés. Ils l’ont mise sous scellé, depuis l’indépendance, et ont décidé tout bonnement, durant la décennie noire, de la voiler pour l’envoyer en noces avec les barbus.

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La junte militaire a été plus forte que nous tous, pour nous faire croire que sauver la république passerait par sauver le régime. Le feu incandescent de l’islamisme a été entretenu par eux seuls, dans le seul but d’étouffer toute velléité de liberté .

On égorge à vos portes,  qu’ils nous disaient; les nôtres, pas les leurs, bien entendu. Rien dans cette épreuve de force n’inquiéta ni renversa le pouvoir. Au contraire, fort de son ingénieuse capacité à contrôler les masses, les épier même dans leurs rêves les plus enfouis, il fit le choix d’obtempérer, de laisser faire pour donner l’illusion à l’ennemi que la bataille était déjà gagnée. Plus on les engraisserait, plus leur impatience leur fera défaut, comme aimait le dire un apparatchik du système, un de ces nombreux qui ont troqué le kaki militaire pour le costume cravate du politicien avare. D’autres, plus déliquescents d’esprit, plus perverses que l’ennemi, disaient que le loup pourrait toujours rester dans la bergerie, tant qu’il ne s’en prendra pas aux maitres des lieux, aux anges gardiens des puits de pétroles, lourdement protégés.

Et aujourd’hui, après d’âpres combat contre l’intégrisme, au prix du sang et des larmes, des vies à jamais gâchées, des talents rendus fous ou exilés, des milliers de disparus et des cimetières qui ne désemplissent pas, le choléra tue encore , dans le pays de Ben M’hidi et  Maurice Audin.

Des milliards de dollars, pour ériger des minarets à la gloire d’un Dieu qui n’ose plus se montrer. Dieu, pour cette jeunesse, préfère l’exil aux hommes qui s’accrochent à lui par des livres qu’on lui prête, prêchant comme des polémistes enragés la fin du monde, l’apocalypse, le paradis et l’enfer, alors que tout autour d’eux se meurt sous leurs yeux, faute d’hôpitaux pour se soigner, d’écoles de la république pour s’élever, de travail pour ne plus fouiller dans les poubelles des riches apparatchiks du pouvoir et de l’amour pour que l’on n’hérite pas de leur haine, cette haine qui est le prolongement de la guerre, leur guerre contre nous.  

Il n’y a pas pire scénario qui puisse arriver à l’Algérie que d’être, aujourd’hui, l’ombre de rien, malade de tout, de sa déliquescence, de sa rupture d’anévrisme structurel, de sa jeunesse qui fuit le pays à coups de rames sur des embarcations d’infortune, de son cinquième mandat mort-né et de son quatrième aussi illégitime que tous ceux qui l’on précédés. La junte, a fait et défait l’histoire à sa guise.

En ramenant Bouteflika au pouvoir, celui-là même qui avait posé un regard vachard, un doigt accusateur et une voix dédaigneuse à l’endroit d’un journaliste qui avait osé poser une question sur les sous-sols de la sécurité militaire, la junte pensait effacer l’innommable commis par elle, à toutes les fois où le peuple se levait pour sa liberté, et, par les fous d’Allah, à chaque fois que le peuple se rebiffait à céder une once de ses droits, chèrement acquis. Elle tergiverse et bégaie, aujourd’hui, parce que cette maison de verre que vantait Bouteflika, le concubin, est à terre. Quel dur combat ce peuple a mené.

Oui, notre maison est de verre, elle l’est plus que jamais, aujourd’hui. Non pas, parce que vous avez voulu que cela soit ainsi, mais parce que quand le mensonge atteint son plafond de verre, la vérité éclate. Elle vous éclate en pleine figure, encore ce vendredi, comme une mine que vous avez dissimulée sous nos pieds et qui détonne sous vos yeux.

Alors que je termine de griffonner ces quelques mots, je remets dans ma tête les images enjouées de ces milliers de jeunes scandant « Algérie libre et démocratique », je me dis qu’ils sont heureux ces jeunes-là. Oui, plus que jamais heureux d’être là, dans cette partie incisive de l’histoire de leur pays, celle de tous leurs prédécesseurs, morts pour qu’il soit un jour, libre pour eux.  

Alors, dormons tous à la place Audin et rêvons toute la nuit d’El Mouradia. L’Algérie, sera à nous tous ou à personne!

Auteur
Mohand Ouabdelkader, auteur

 




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