23 avril 2024
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L’anglais en primaire au pas de course en Algérie

L’Algérie, où le français reste très ancré soixante ans après la fin de la colonisation, vient d’introduire l’anglais à l’école primaire, une démarche saluée par les détracteurs de l’emprise de la langue de Molière, mais décriée par d’autres pour sa mise en œuvre précipitée.

En Algérie, la question linguistique fait régulièrement l’objet de débats. Si le statut officiel de l’arabe fait consensus, la place du tamazight (berbère), devenu langue officielle en 2016, et du français, langue de l’enseignement scientifique et des affaires, héritée de l’ancienne puissance coloniale, soulève des polémiques sans fin.

Les enfants, qui ont repris le chemin de l’école le 21 septembre, démarrent désormais l’apprentissage de l’anglais dès la 3ème année de primaire, comme c’est déjà le cas pour le français, alors que jusqu’à présent ils ne le commençaient qu’au collège.

« Cette décision constitue une évolution, mais il aurait fallu bien préparer son introduction dans l’enseignement », réagit auprès de l’AFP Farouk Lazizi, père de deux élèves d’une école primaire à Alger.

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C’est Abdelmadjid Tebboune qui a pris cette décision en Conseil des ministres le 19 juin. « Le français est un butin de guerre mais l’anglais est la langue internationale », a-t-il expliqué fin juillet.

Pendant l’été, le ministère de l’Éducation s’est engagé dans une course contre la montre pour mettre en oeuvre les instructions présidentielles.

En moins de deux mois, 5.000 enseignants contractuels ont été recrutés et ont reçu une formation express. Un manuel scolaire a été élaboré et distribué aux écoles en un temps record.

Précipitation 

« Quand on se précipite sans réunir les conditions nécessaires, il y a lieu de s’interroger sur la réussite de cette mise en oeuvre », regrette Messaoud Boudiba, porte-parole du Cnapeste, un important syndicat du secteur.

Le linguiste Abderzak Dourari déplore le recours à des traducteurs pour combler le manque de professeurs.

« Faire appel à eux n’est pas le meilleur moyen d’enseigner la langue puisque le traducteur n’est pas formé pour enseigner », remarque-t-il avant d’ajouter: « si on n’a pas suffisamment d’enseignants compétents, il vaut mieux ne pas se lancer tout de suite ».

Quelque 60.000 personnes ont postulé pour rejoindre le corps enseignant. Le ministère a exigé qu’elles produisent une licence en anglais ou en traduction.

« Enseigner quatre langues (arabe, berbère, français et anglais) dès le primaire va créer une confusion dans l’esprit » des enfants, estime le pédagogue et ex-enseignant d’anglais Ahmed Tessa.

En revanche, ceux qui souhaitent la fin de l’enseignement en français sont comblés.

« Nous nous félicitons de cette décision qui a tardé à venir », se réjouit Sadek Dziri, président de l’Unpef, un autre syndicat influent, arguant que « l’anglais est la langue des sciences et de la technologie ».

Professeur d’anglais dans un collège algérois, Abdelhamid Abed salue lui aussi la décision de M. Tebboune, estimant que le « français a fait son temps ».

« Il faut suivre le développement technologique. Il ne faut pas voir cette question sous l’angle de la rivalité entre le français et l’anglais mais d’un point de vue pragmatique », estime-t-il.

L’Algérie va pouvoir « renoncer au français qui est la langue du colonisateur et dont l’enseignement n’a pas donné de bons résultats », ajoute un parent d’élève.

Pris au dépourvu

Depuis des décennies, milieux conservateurs et laïcs se livrent une bataille acharnée autour de la place du français dans l’enseignement en Algérie.

L’introduction de l’anglais en primaire a relancé le débat, certains y voyant une volonté des autorités de remplacer le français par la langue de Shakespeare. Mieux elle constitue une victoire du courant islamo-baâthiste.

« Le président de la République a été clair. Il l’a qualifié de +butin de guerre+. Ce qui signifie que l’Algérie bénéficie de cette langue dans sa vie institutionnelle et socio-économique », rétorque M. Tessa.

« Les cercles hostiles au français ont été pris au dépourvu par cette affirmation. Ils croyaient que le français allait être supprimé du primaire. Ils rêvent de le voir disparaître », analyse-t-il.

Pour le linguiste Dourari, « il serait vain et très difficile de substituer une langue à une autre dans le cas de l’Algérie », en raison du contexte « culturel, linguistique, historique mais aussi géographique ».

« Nous avons plus de 8 millions d’Algériens qui vivent en France, des familles mixtes qui viennent, qui repartent. L’essentiel des contacts touristiques se font d’abord avec la France et pas avec l’Angleterre », a-t-il souligné.

Avec AFP

2 Commentaires

  1. En 1962, les réfugiés venant de Tunis et d’ailleurs, arabophones, voulaient tout de suite remplacer tous les fonctionnaires en place ( Francophones naturellement…puisque nous étions en octobre 1962 ) Ils ne comprenaient pas que tous ces Algériens en postes puissent travailler…alors qu’ils peuvent les remplacer, eux arabisants prêts à tout !
    Si le retour de la langue arabe, après l’indépendance est normal, naturel et attendu, souhaité etc…Le manque d’enseignants a été mal « résolu » par le recrutement massif d’individus en grande majorité incompétents ( les Egyptiens ) d’autres étaient d’une qualité remarquable des Palestiniens, des Tunisiens…
    Maintenant on ne remplace pas une langue par une autre du jour au lendemain par soucis idéologique pour faire plaisir à la galerie de gens non éduqués ou idéologiquement marqués !
    Tenez ! essayer d’écouter un Algérien responsable politique et autre parler en Arabe ( que je ne comprend pas, car loin de l’Arabe Algérien ) il ne se passe pas un moment sans que la personne dise 10 mots en Français dans le texte arabe…
    Le président connait son affaire et il a raison, le Français restera un butin de guerre estimable car il permet à l’Algérie de briller dans le monde à travers ses étudiants et toutes les personnes originaires d’Algérie vivant ailleurs.
    La langue Française est une langue utile donc importante surtout que nous avons été un temps après la France, 1er pays Francophone devant le Canada…il y a quelques années…Il ne faut pas confondre la langue Française , langue de savoirs et les problèmes politiques anciens ou nouveaux…Qui ne doivent pas polluer les apprentissages pour tous les Algériens. L’Allemand, l’Italien, l’Espagnol des langues d’échanges et de libertés !

  2. Si on veux maîtriser une langue c’est dès le berceau qu’il faut l’apprendre! parce que le cerveau des enfants est une vrai éponge à savoirs!! plus tôt on apprend une langue mieux c’est! on peux même apprendre plusieurs langues! donc pourquoi pas le français et l’anglais dès l’âge de 2 ans! faites l’expérience et vous verrez que c’est efficace!

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