22 novembre 2024
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Le paysan algérien à travers les âges

Paysan algérien

Depuis l’antiquité tous ceux qui ont successivement gouverné l’Algérie, ont tenté de cherché une solution à son agriculture, chacun à sa manière bien sûr.

Carthage a commencé. Elle s’est installé et s’est mise à observer ses voisins numides. Elle conclut qu’ils sont parfois paysans sédentaires, parfois éleveurs nomades. Vivant en bonne intelligence avec eux, elle les embarquait quelquefois dans ses guerres contre Rome. Comme ces paysans nomades aimaient bien ça la guéguerre, ils y allaient gaiement.

Ensuite, Massinissa tente de créer un Etat en Numidie en sédentarisant les nomades pour en faire des paysans agriculteurs mais il s’est cassé les dents. Les nomades, par nature tribaux et récalcitrant à toute forme d’Etat, préféraient leur liberté.

Les Romains sont venus et transformèrent les paysans en esclaves pour travailler dans les latifundia attribué par César à ses généraux pour services rendus.

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Les Vandales sont venus. Ils ont continué en moins bien, ce que les Romains faisaient.

Les Byzantins sont venus. Ils se sont barricadés à Carthage et on ne sait pas trop ce qu’ils ont fait des paysans.

Les Arabes sont venus, ils ont mis dehors les Byzantins et ont composé la valse des roitelets. Ces derniers se succédaient par coups d’Etat successifs. Aghlabides, Hafsides, Zirides, Rostomides, Hamadites, Zianides, Mourabitines, Mouwahidines et … j’en oublie.

Les paysans, à la fois placides, stupéfiés et terrorisés, regardaient tous ce monde défiler. Ils ne comprenaient pas pourquoi, pour ramener une lettre (rissala), les Arabes ont déplacé tout une armée, sabre toujours au clair !

Quand le calme fût revenu, les paysans lisent la lettre et conclurent qu’elle n’était pas très différente de celle que Saint-Augustin leur a déjà envoyée à quelques détails près. Alors naïvement, ils l’adoptèrent mais ils n’avaient pas vu que dans les détails se logeait le diable. Leurs petits enfants le paieront très cher plusieurs siècles après.

Les Turcs sont venus. Trop tournés vers la mer car plus lucrative, ils s’en foutaient de la terre et des paysans,  sauf une fois par an, pour prélever l’impôt.

Les Français sont venus. Ils ont examiné la situation qui prévaut dans la colonie fraîchement acquises et conclurent que le paysan algérien étaient trop stupides pour lui confier la chose agricole. Ils importent des paysans européens et leur confient les paysans algériens pour travailler dans leurs domaines fraichement acquis par multiples confiscation de terres et manipulation des lois de propriété.

Enfin, les Algériens sont venus et par vague successives, ils ont régné. Les premiers ont placé les paysans algériens dans des domaines autogérés. Les seconds  ont trouvé encore une pléthore de paysans non placés.

Sous le slogan de la terre à celui qui la travaille, ils ont récupéré autant de terres qu’ils pouvaient, les ont mis dans des coopératives auxquelles les paysans n’ont jamais compris comment elles fonctionnaient. Pas grave, on a finit par leur demandé juste de s’aimer, de travailler tous ensemble et de vivre d’amour et d’eau fraiche jusqu’à la prochaine récolte.

Enfin, les troisièmes sont venus. Ils défont tous ce que les premiers et les seconds ont fait. Ils toisent les paysans, encore une fois déboussolés et leurs disent la même chose que les Français ont dit à leurs grands pères. « Vous êtes trop stupides pour qu’on vous confie la chose agricole ». Mais là ils ne sont pas parti chercher les paysans français, orgueil oblige, ils ont préféré du « made in bladi ».

Par quelques entourloupettes juridiques, ils foulent au pied considérations sociales ou socialistes, et confient la chose agricole aux « investisseurs » et autre hommes d’affaire sous le slogan foutoir et trompeur de l’indépendance alimentaire. Les paysans déchus, pour un total d’environ 12 millions de personnes, se retirent et se mettent à l’ombre des « zones d’ombre ».

Voilà et depuis 2000 ans on cherche une solution à l’agriculture algérienne mais toujours en évitant que le paysan ne soit au centre de la décision, sauf durant l’infiniment courte et timide tentative des deux premières dynasties post-indépendance. Pour le moment, wait and see, en attendant Godot et la chute du prix de l’oignon.

El-Hadi Bouabdallah, agronome à la retraite

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