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Le président de la république a recadré le PDG de Sonatrach

Les experts algériens s’inquiétaient de la révision de la loi sur les hydrocarbures

Le président de la république a recadré le PDG de Sonatrach

Le président Bouteflika a ménagé son ami Chakib Khelil dans l’affaire de la loi sur les hydrocarbures.

Ce n’est  pas par hasard qu’Abdelmoumène Ould Kaddour a évoqué la révision de la loi sur les hydrocarbures dans un entretien qu’il a accordé à l’APS.

En effet, ce dossier qu’hier était simple est devenu aujourd’hui non seulement « lourd » mais demande aussi du  « temps » et pour lequel  il serait « difficile de fixer une échéance ». On comprend par là qu’il pourrait être renvoyé aux calendes grecques. Il avoue implicitement qu’il n’y a personne en Algérie qui pourrait diagnostiquer ce qui ne va pas dans la loi de 2005 amendée à deux reprises par ordonnance en 2006 et par une autre loi en 2013. Pour lui « il faut qu’on cherche des gens qui connaissent bien le domaine ». Il oubli dans ce cadre justement que l’ancienne loi sur les hydrocarbures a été élaborée par un Américain du nom de « BOB» et sous l’entière contrôle des départements US qui se sont déplacés au moment de son élaboration et quelques jours seulement  avant l’adoption de son amendement.  

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Alors de quels spécialistes parle-t-on ? De toutes les manières, cette sortie du PDG de Sonatrach est venue quelques jours seulement après que le président de république ait interpellé  les responsables par une lettre lue par son ministre de l’Energie « l’Algérie n’est pas contrainte à se précipiter pour lancer le  développement de ses ressources en hydrocarbures non conventionnels et que le gouvernement s’attelle à revoir le cadre juridique à travers la  refonte de la loi sur les hydrocarbures afin de rendre l’amont pétro-gazier algérien plus attractif en matière des ressources conventionnelles ». C’est exactement ce que n’arrêtent pas de proposer les experts algériens depuis 2001, date à laquelle ce débat a débuté. La vérité est qu’à partir du moment où le président a fait un moratoire informel sur le gaz de schiste, il ne reste plus rien à changer dans l’ancienne loi.

Elle était effectivement non favorable fiscalement et contractuellement aux blocs contenant des ressources non conventionnelles dont la rentabilité s’évalue par puits et en moins de temps que celles conventionnelles sur le profit de production du gisement qui peut s’étaler sur plusieurs années voire deux à trois décennies. Cette réponse politiquement correcte du PDG de Sonatrach, montre qu’en effet si l’on se limite comme veut le président de la république aux ressources conventionnelles, il n’y a rien à changer dans cette loi car elle est à rejeter dans son ensemble pour revenir à l’ancienne loi de partage de production qui a été à l’origine de plus 450 découvertes. Pour rappel, cette nouvelle loi amendée à deux reprises non seulement n’a rien attiré comme investisseurs mais aussi n’a été à l’origine d’aucune découverte. Comment ?  Pourquoi ?

La loi 05-07 est incompatible avec une économie totalement rentière        

Il est clair que les responsables d’Alnaft n’ont pas raté l’occasion à travers cet état de fait pour expliquer le marasme de l’activité en amont par l’attente  comme toujours les nouvelles dispositions.  En terme simple, la loi a toujours servi d’alibi à l’incompétence et au manque de créativité. Il faut souligner que ce texte a entretenu sciemment ou inconsciemment une légère confusion sur la question du régime juridique des activités de recherche et d’exploitation.

En effet, la loi sur les hydrocarbures de 2005 et son ordonnance modificatrice abrogent toutes les dispositions, notamment la loi 86-14 du 19 août 1986 instaurant le partage de production. Par contre, l’ordonnance n° 06-10 du 29 juillet 2006, dans son article 02, confirme la concession mais modifie légèrement le terme concessionnaire en désignant Sonatrach SPA, et c’est là où commence cette ambiguïté. Actuellement, dans le monde, il n’existe pas de régime de concession hybride spécifique à chaque pays. Le contour typique général est bien défini. L’Etat octroie au titulaire un titre minier exclusif d’exploration.

En cas de découverte commerciale, il obtient un ou des titres exclusifs de développement et d’exploitation. Le titulaire de la concession est propriétaire de la totalité des hydrocarbures produits à la tête des puits. Il est aussi propriétaire des installations de production jusqu’à l’expiration de ses droits miniers. A l’expiration de la concession, les installations fixes reviennent à l’Etat sans indemnité pour le titulaire. Il est possible pour l’Etat de participer dans le cadre d’un accord d’association sans aucune contrainte de l’une ou l’autre des parties. En contrepartie, le concessionnaire finance entièrement à sa charge toute la phase d’exploration en plus d’une partie des investissements de développement dans le cas où cet accord d’association se concrétise. Il paye, durant ces opérations, un bonus, une redevance superficiaire, une redevance de production en nature ou en espèce, un impôt sur le bénéfice et d’autres taxes supplémentaires spécifiques à chacun des pays où ce régime est pratiqué. Il reste bien entendu que l’Etat dispose d’un droit de regard sur le profil de production et parfois même la commercialisation de la production.

Donc assimiler l’obligation du contractant de prendre Sonatrach SPA comme associé avec un minimum de 51% à un retour vers le partage de production, peut constituer une déviation du régime, voire même commettre une confusion contractuelle.

Tout porte à croire que le président Bouteflika, en signant l’ordonnance en 2006, a voulu ménager son ministre et en même temps stopper la grogne autour de la privatisation de Sonatrach. C’est la raison pour laquelle on peut aisément constater, à la lecture de cette ordonnance, l’empreinte de Chakib Khelil et celle de Louisa Hanoune.
En effet, l’article 2, non amendé de la loi 05-07 du 28 avril 2005, précise «le principe de mobilité et d’adaptation qui caractérise l’action de l’Etat, et dès lors, à restituer à ce dernier celle de ses prérogatives autrefois exercées par Sonatrach SPA». C’est ce même principe qui a constitué l’ossature de l’exposé des motifs de l’ancien ministre de l’Energie et des Mines. Il reste incontestablement contradictoire avec les dispositions contenues dans l’article 32 de l’ordonnance n°06-10 du 29 juillet 2006 qui restitue à Sonatrach le droit exclusif d’agir pour le compte de l’Etat dans sa participation avec le concessionnaire devenu maintenant contractant. Cela ressemble à un partage de production mais ce n’en est pas un.

Ce rafistolage dans une loi cadre a quelque peu brouillé la vision stratégique de l’Algérie en matière de politique pétrolière. Il a peut-être fait douter les entreprises internationales. Pourquoi ? Parmi les fondamentaux de l’industrie pétrolière et gazière, il y a l’importance des capitaux et le risque de les investir. Le risque géologique étant favorable à l’Algérie et les entreprises pétrolières notamment françaises et, partant américaines, connaissent bien, même mieux que les Algériens, le terrain. Cela explique le taux appréciable de réussite en exploration, environ 2,5/5 contre un ratio moyen mondial de 1/5. Par contre, ces compagnies sont à cheval sur le risque «pays», lié aux relations internationales, souveraineté, stabilité politique et surtout fiscale. Il est clair que l’article 101 bis, inséré au sein de la loi n°05-07 du 28 avril 2005, instaurant une taxe non déductible sur les profits exceptionnels, n’a pas été du goût des associés mais n’explique qu’en partie leur boycott actuel de l’application des nouvelles dispositions. Il va de la crédibilité de l’Algérie d’assurer une cohérence de ces textes pour la clarté qui instaure une relation de confiance avec ses partenaires. Ils peuvent avoir un choix et dans des conditions meilleures. C’est certainement ce déficit de cohérence qui a été à l’origine de la défection de nombreux investisseurs pour au moins deux raisons :

1- Où trouver cet «agneau» d’investisseur qui viendrait en Algérie risquer ses capitaux, et quand il découvre du pétrole et valide commercialement sa découverte, céderait la majeur partie de sa concession à Sonatrach SPA aux conditions validées par une agence de l’Etat Alnaft (article 48 de l’ordonnance 06-10 du 29 juillet 2006). Même si ces conditions sont fixées d’avance, elles restent étrangères à la pratique mondiale en la matière ;

2- Au début de l’application de ces nouvelles dispositions, un appel d’offres, dit de manifestation d’intérêt, a été lancé pour apprécier, selon les propres termes de son initiateur, la capacité des futurs partenaires de transférer de la technologie. Lorsqu’on sait qu’à la moindre ouverture, les cadres de Sonatrach passent de l’autre côté de la barrière pour rejoindre les compagnies étrangères, on peut se demander qui capitalise, qui consolide et qui fertilise le savoir transféré.

De nombreux partenaires dans ces conditions n’arrivent pas à circonscrire avec précision la forme de ce transfert. Ensuite, les instruments de formation et de recherche, qui auraient pu assurer cette tâche, ont été totalement marginalisés comme le Centre de recherche et de développement de Sonatrach (CRD) ou  l’Institut algérien du pétrole (IAP), pionnier dans la formation et la recherche dans la chaîne pétrolière et gazière.
Les experts, qui sont intervenus pour dénoncer la loi sur les hydrocarbures au moment même où son initiateur était sur place, avaient recommandé son retrait pur et simple, pourquoi ? 

Parce que le régime de partage de production est de plus en plus pratiqué en Asie, au Moyen-Orient et en Afrique et il a donné ses fruits pour peu qu’on l’améliore.                                                                                           

Auteur
Rabah Reghis, consultant et Economiste pétrolier

 




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