Le procès en appel de l’enseignant universitaire de en histoire, Mohamed Lamine Belghit, n’aura pas lieu ce mardi comme prévu. La chambre pénale du Conseil judiciaire d’Alger a décidé de reporter l’audience au 9 septembre prochain, a annoncé son avocat, Me Toufik Haichour, sur sa page Facebook.
Belghit, qui comparaissait en appel après une première condamnation, avait été jugé le 3 juillet dernier par le tribunal de Dar El Beïda (Alger) à cinq années de prison ferme. L’universitaire avait été placé en détention provisoire dès le 3 mai, au lendemain d’une déclaration polémique faite sur la chaîne « Sky News Arabia ». Lors de cet entretien, il avait qualifié la langue amazighe de « construction judéo-française », des propos qui ont suscité une vive indignation et une vague de critiques au sein de la société civile et du monde académique.
Les autorités judiciaires lui reprochent plusieurs chefs d’inculpation : « atteinte à l’unité nationale par des actes visant les symboles de la Nation et de la République », « atteinte à l’intégrité du territoire national » ainsi que « diffusion de discours de haine et de discrimination par le biais des technologies de l’information et de la communication ».
Ce report laisse en suspens un dossier qui dépasse largement la seule dimension judiciaire. En effet, les déclarations de Belghit ont ravivé le débat autour de la mémoire nationale et des fractures identitaires, tout en mettant en lumière la sensibilité des questions liées à la langue et à l’appartenance culturelle en Algérie. Pour ses soutiens, il s’agit d’un universitaire dont la liberté d’expression est réprimée. Pour ses détracteurs, Belghit se livre à une entreprise révisionniste visant à délégitimer un pan essentiel de l’identité nationale.
La prochaine audience du 9 septembre sera donc observée avec attention, dans un contexte où la justice est appelée à fixer la frontière entre liberté d’expression et incitation à la haine.
Mais au-delà de l’aspect pénal, ce procès prend une dimension politique et sociétale : il interroge la capacité de l’État à contenir la banalisation des discours stigmatisants contre la Kabylie et de remise en cause de la profondeur historique amazighe de l’Algérie de plus en plus présents sur les réseaux sociaux, et à préserver la cohésion nationale face au risque d’une réactivation des fractures identitaires.
Samia Naït Iqbal