21 novembre 2024
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Le sacrifice du progrès

Intégrisme
L’intégrisme ronge la société algérienne;

Combien faudra-t-il de temps à l’Algérie pour avoir un génie comme le dramaturge Abdelkader Alloula, ou un poète aussi combatif qu’engagé comme Kateb Yacine ? Ce n’est pas du tout facile de répondre à une telle interrogation, quand on voit le grand fossé dans lequel est tombé aujourd’hui notre pays.

Désert culturel à ciel ouvert, ce dernier est exposé à tous les pièges de l’extrémisme. Une société où le tabou est presque sacralisé ne peut prétendre à la modernité. D’autant que cette dernière demande des sacrifices et surtout de la douleur.

La douleur, c’est cette déchirure qu’on éprouve quand on se sépare de nos fausses idées, de nos faux repères, de nos stéréotypes. Le dogmatisme, c’est l’ennemi n° 1 de la diversité. La doxa, qu’elle soit religieuse, idéologique ou partisane, freine l’ouverture de la société et lui met des œillères.

Le citoyen, devenu malgré lui, sujet marche alors à tâtons, dans le noir des incertitudes. Il cesse de s’interroger sur son destin et croit à tout ce qu’on lui fait gober comme mensonges institutionnalisés. C’est l’impasse des idées, c’est l’impasse de la lumière, c’est l’agonie.

Former le citoyen de demain dans une société rentière « tabouisée » est plus qu’un pari. Il ne s’agit pas de copier un tel modèle ou un autre pour l’appliquer sur nous, mais d’inventer sa propre recette de changement.

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Inventer une manière nouvelle de voir le monde, de regarder la modernité, de s’ouvrir et de sacraliser l’altérité participe de cette « dynamique d’espoir », pour reprendre un mot de feu notre cher anthropologue Malek Chebel, à l’origine du progrès social.

L’espoir de voir s’émietter « nos mythes dévoyés », pour mettre à la place nos vrais « mythes fondateurs ». Ce qui devrait nous fonder, ce n’est plus « la philosophie de croire », mais bien au contraire « la philosophie de penser ».

Penser permet de discuter, de débattre, de donner son avis sans être taxé de traître, d’infidèle ou de renégat. C’est un processus fécond de l’acceptation de l’autre, sans que l’on tombe dans le labyrinthe de l’intolérance. Car, l’intolérance est le creuset de l’intégrisme et pire, de sa sœur jumelle : la dictature. L’une ne va pas sans l’autre, décidément. En cela, le rôle des élites est éminemment important dans le rayonnement des sociétés…

Kamal Guerroua

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