29 mars 2024
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Lettre ouverte au général-major Gaïd Salah

TRIBUNE

Lettre ouverte au général-major Gaïd Salah

Mon Général,

Depuis quelques semaines et plus spécialement ces derniers quinze jours vous vous retrouvez sans cesse sous les feux de la rampe dans la presse nationale, sur les plateaux de télévisions nationales et étrangères, à travers le web.

Les journalistes, politologues, observateurs, personnalités nationales et étrangères ne cessent de disséquer vos paroles et déclarations, de scruter vos faits et gestes. Certains d’entre eux vous reprochent votre hésitation, d’autres votre ton et d’autres enfin votre attitude.  Si beaucoup d’entre eux n’ont ni la connaissance ni la maîtrise du sujet dont ils traitent certains par contre plus pondérés, plus sages et plus pertinents cernent la problématique et se posent les bonnes questions. La question qui revient le plus souvent et qui interpelle les acteurs et les spectateurs est celle de vos intentions réelles et celle de l’institution que vous commandez.

Si la psychologie du militaire et son état d’esprit sont familiers pour les militaires de carrière, les contractuels, les appelés du contingent, le personnel civil assimilé reste flou pour la plupart des civils. Pour le militaire il y a l’armée d’une part et le reste d’autre part. Il y a le civil et le militaire. Au-delà du statut il y a toute une vision de la vie qui les sépare.

Pour des raisons culturelles et historiques le militaire chez nous et dans beaucoup de pays comme le nôtre, qu’on se l’avoue mon Général, s’est toujours considéré au-dessus du civil. Une supériorité que confèrent probablement le sentiment d’appartenance à une institution prestigieuse dédiée au combat, la possession d’une arme ainsi que le port d’un uniforme dans un pays colonisé depuis des siècles et une population dompté par le feu depuis toujours. Il semble donc peu aisé pour un militaire d’accepter le fait d’être dirigé par un civil.

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Ce sentiment de supériorité du militaire sur le civil, amplifié par d’autres facteurs inhérents à la conduite de la révolution et aux luttes fratricides a inévitablement joué lors de la réunion du CNRA au Caire en août 1957. C’est durant cette réunion historique qu’au sein du CEE, organe éminemment politique dirigeant la révolution, composé essentiellement de civils depuis sa création en 1956,  que le pouvoir politique a commencé à se confondre avec le pouvoir militaire.

C’est à partir de cette date que  les militaires ont commencé par occuper une place prépondérante dans l’exercice du pouvoir politique. Nous connaissons tous l’ampleur des pertes occasionnées durant la révolution et après l’indépendance à cause de cet état de fait.

Cette situation, mon Général, est exclusivement due à l’histoire. Vous la subissez, le peuple algérien en a lui aussi hérité. Il n’y a ni responsables ni coupables. C’est le propre d’une révolution. Mais n’oublions pas mon Général que ce sont des civils qui ont déclenché le 1er Novembre 1954 et que ce sont ces même civils devenus militaires pour la cause, qui ont composé, organisé et mené le combat au sein de l’ALN pour arracher l’indépendance de notre pays sept années plus tard.

Il incombe aux algériens des générations post révolutionnaires aidés de leurs ainés  encore en vie et ayant participé à notre glorieuse révolution de changer cette état de fait qui n’a cessé d’empoisonner les relations entre les différents centres décisionnels et de perturber le bon déroulement de  la vie politique.

Aujourd’hui les Algériennes et les Algériens ont manifesté leurs désirs, leurs volontés : l’armée les a entendus. Vous les avez compris mon Général.

Notre population a toujours été proche et à l’écoute de son armée.  Durant la révolution elle a soutenu l’ALN avec dévotion, en a rempli les rangs de ses enfants, nourri les soldats, soigné les blessés, caché les moudjahidines, perdu ses enfants maris et pères tués lors des combats et subi l’innommable de la part des troupes d’occupation. Pendant les années de braise elle s’est rangée dans sa grande majorité du côté de son armée fournissant ses fils et ses patriotes payant ainsi le prix de milliers de morts et de disparus.

Aujourd’hui cette même société civile, en grande partie composé de jeunes ayant une idée plus ou moins lointaine de la teneur et de la grandeur de ce que fut notre révolution de Novembre et ayant peu connu les années de feu scande à travers tout le territoire national « Djeich Chaab Khaoua Khaoua ». Elle est fière de son armée. Elle aime son armée. Et vous en êtes le Chef d’Etat-major mon Général.

Réciproquement, dans ce moment crucial durant lequel notre pays se retrouve à la croisée des chemins, l’ANP se range du côté de son peuple. L’heure des grands choix a sonné. Notre armée a le pouvoir et le devoir de tracer la voie du changement.

Le train de l’histoire est là mon Général, à votre portée. Il attend dans la gare que vous le preniez, que vous redressiez l’histoire, que vous redonniez à notre armée la place qui doit être la sienne dans notre pays comme dans toutes les sociétés modernes pour que nos jeunes manifestants puissent aborder le troisième millénaire sans complexe, comme les citoyens à part entière d’un état moderne.

L’ANP n’en sortira que plus grande et l’Algérie que plus forte.

Et vous mon Général, vous occuperez ainsi une place de choix, méritée et privilégiée, tant convoitée par beaucoup de mortels,  aux côtés de nos héros dans le panthéon de l’histoire pour avoir réconcilié les algériens avec eux même et les avoir propulsé vers le futur.

Gloire à nos martyrs

Que vive l’Algérie

 

Auteur
Djalal Larabi

 




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