Cinglant ! Le département d’Etat américain a épinglé l’Algérie pour «violations graves» des libertés religieuses. Le département d’Etat place l’Algérie sur une liste cinq pays à surveiller pour avoir commis ou toléré ce genre de dépassement.
Quand les Etats-Unis accusent ou condamnent les autorités algériennes perdent leur morgue habituelle et se veulent consensuelle. Il en est ainsi du communiqué publié à Washington dans lequel le Secrétaire d’Etat Antony Blinken a maintenu l’Algérie sur «la liste de surveillance spéciale pour avoir commis ou toléré de graves violations de la liberté religieuse».
«La promotion de la liberté de religion ou de conviction est l’un des principaux objectifs de la politique étrangère des États-Unis depuis que le Congrès a adopté et promulgué la loi sur la liberté religieuse internationale en 1998», a relevé le chef de la diplomatie américaine. Le chef de la diplomatie américaine avait déclaré, le 4 janvier dernier, que « l’Algérie n’est pas dans la pire catégorie, mais elle figure sur la liste de surveillance spéciale », selon la déclaration mise en ligne sur le site du Département d’État.
Cinq pays sont mis sur la liste de surveillance spéciale « pour avoir commis ou toléré de graves violations de la liberté religieuse », à savoir, « l’Algérie, l’Azerbaïdjan, la République centrafricaine, les Comores et le Vietnam ».
Antony Blinken a désigné comme entités terroristes particulièrement préoccupante, «les organisation Al-Shabab, Boko Haram, Hayat Tahrir al-Sham, les Houthis, ISIS (Daech)-Sahel, ISIS (Daech)-Afrique de l’Ouest, Jamaat Nasr al-Islam wal-Muslimin affilié à Al-Qaïda, et les Taliban ». Quid du Mouvement pour l’autodétermination de la Kabylie que le régime a désigné comme « organisation terroriste » ? Evidemment là aussi aucun pays ni ONG ne suit sa décision.
Que répond l’Algérie ? Bien entendu, il n’est pas question pour l’Algérie de parler d’ingérence dans les affaires intérieures du pays, comme elle le fait souvent quand il s’agit de pays autres ou d’ONG de défense des droits humains.
Le ministre des Affaires étrangères, Ahmed Attaf a eu une communication téléphonique avec son homologue américain auquel « il a rappelé les informations fausses et inexactes contenues dans la récente déclaration du Département d’État américain concernant la liberté religieuse dans le pays ». On est loin des réponses comminatoires habituelles quand un pays étranger accusait l’Algérie. Là le ministère des AE se montre étrangement pacifique. Consensuel, même à la limite compréhensif !
Droits humains en Algérie : constat accablant et recommandations de Mme Mary Lawlor
Dans son communiqué, Ahmed Attaf «a exprimé, à plusieurs reprises, sa disposition à recevoir l’ambassadeur itinérant américain pour la liberté religieuse internationale afin de faire la lumière sur les faits et sur l’engagement réel de l’Algérie à sauvegarder le principe de la liberté de croyance conformément à ses obligations internationales en la matière». De quel respect parle Ahmed Attaf ? Qui veut-il flouer ? En réalité toutes les libertés sont confisquées en Algérie. Alors pour les libertés religieuses, il faudra peut-être qu’il soit moins cynique !
Document. Le rapport du Département d’Etat sur les droits humains en Algérie
Mais une question nous taraude l’esprit : pourquoi Ahmed Attaf, donc le pouvoir algérien, se comporte ainsi avec la première puissance mondiale qui pourtant met l’Algérie au ban des nations qui combat la liberté religieuse ? Pourquoi l’Algérie ne se conduit-elle pas de la même manière avec les pays comme la France ou les pays limitrophes avec lesquels elle entretient des relations orageuses ? D’abord il y a une réalité que les autorités algériennes ne peuvent nier. Il n’y a pas de liberté religieuse en Algérie. Du moins, elle n’est pas reconnue en tant que telle. Plus d’une dizaines d’églises ont été fermées sans aucune explication par les autorités, notamment en Kabylie. Même les Ahmadis sont victimes de la répression religieuse en Algérie.
Des Algériennes et des Algériens sont arrêtés pour leurs convictions religieuses.
Au-delà de ces faits que le régime ne peut nier, malgré son communiqué officiel un tantinet bravache, l’Algérie ne peut s’adresser aux Etats-Unis comme elle s’adresse aux autres pays ou ONG qui l’accusent régulièrement de violations des droits humains et religieux. On ne badine pas avec le département d’Etat ! Alors cette déclaration empreinte de « profonds regrets » n’est qu’un aveu d’impuissance, voire une reconnaissance d’un réalité établie.
Ce n’est pas la première fois qu’Antony Blinken tacle l’Algérie. Et le Département d’Etat a publié l’année dernière un rapport particulièrement cinglant sur les violations des droits humains en Algérie. Pour autant, la situation n’a pas changé depuis.
Yacine K.