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Lounis Aït Menguellet : le poète aveugle ceux qui refusent de voir !

Lounis Aït Menguellet.

Lounis Aït Menguellet sera à l'Arena Accor le 26 novembre.

Lounis Aït Menguellet. Crédit photo Hayat Aït Menguellet.

La force d’une poésie réside dans la profondeur de l’inspiration du poète qu’est Lounis Aït Menguellet, le sens donné à son œuvre par sa société n’est pas toujours la copie de sa propre pensée. Ce qui me semble normal dans un monde normal.

Lounis Aït Menguellet est l’artisan de son œuvre, quant à la réussite poétique de cette dernière, elle dépend de l’oreille qui écoute et de la tête qui pense. A chacun son oreille, à chacun sa pensée !

Le poète est capable d’aspirer à la démocratie, mais il ne peut pas l’instaurer. Il est en mesure de crier à l’injustice, mais il ne peut pas l’éradiquer. Il a la possibilité d’incarner à travers sa poésie le sens de la fraternité, mais face à l’obstination et à l’égo démesuré des frères, la rendre possible se révèle une tâche périlleuse.

Il peut faire vivre l’espoir par sa mélodie, quant à sa réalisation, elle dépend de l’oreille qui veut bien l’écouter. Il peut contribuer à l’épanouissement de sa société, mais il n’est pas tenu de l’édifier seul.

Le poète peut s’inspirer de la vie politique afin de traduire ses répercussions négatives sur sa société, ce qui ne lui donne pas le statut d’un d’homme politique, mais juste un être humain sensible à la détresse de ses semblables dont il en fait partie. Il n’est pas responsable devant la politique, il est juste responsable devant sa poésie !

Lounis Aït Menguellet, un verbe puissant, un personnage discret

Le poète parle, car il a une sensibilité à exprimer, il parle, car il a une émotion à partager, il parle, car souvent, il est le phare des désespérés, des mélancoliques, mais aussi des égarés de la vie, une vie dénuée de clémence et de tendresse.

Le poète est finalement, porteur d’espoir et un inconditionnel adepte de la vie. Il réfléchit seul, mais il parle pour tous !

Nous voulons que le poète insuffle l’espoir, par notre exigence souvent injustifiée, nous le poussons au désarroi. Nous voulons qu’il soit l’étendard du vivre ensemble, par notre pensée irrationnelle nous le poussons à l’autarcie malgré lui.

Dans un monde de plus en plus virtuel, il s’avère que la virtuosité du poète est tout ce qu’il nous reste de rationnel, de consistant et de réel. Et Si par moment certains esprits éparpillés de la société considèrent, à tort, que le poète manifeste une fragilité supposée, en réalité, si cette fragilité existe, ce n’est que l’expression d’une défaillance sociétale avérée. Force est de constater qu’il existera toujours des petites pensées étriquées, qui s’obstineront à se focaliser sur le doigt du sage poète, pendent que les autres s’émerveillent de la poésie aussi radieuse que la lune !

Au cours de sa longue et foisonnante carrière artistique, Lounis Ait Menguellet a puisé énormément son inspiration poétique dans la culture kabyle, une culture riche et valorisante. Il a chanté la Kabylie en tant que terre et civilisation. Pour le poète et à travers son œuvre, la Kabylie a toujours occupé une place  majeure dans sa vie artistique, mais aussi dans sa vie tout court.

De surcroît, « la poésie philosophique » de Lounis est extra-académique certes, mais tellement utile et bénéfique à une société qui voit ses repères sectionnés par de multiples raisons, où l’art semble être remplacé par un phénomène « de guinguettes musicales » qui brassent énormément de monde mais aussi, beaucoup de vent défavorable !

Dans son nouvel album intitulé : Snitra-w, Ait Menguellet nous émerveille avec une poésie profonde aux multiples sens. Il nous chante ses textes avec une voix qui a perdu de sa jeunesse certes, mais une voix qui a gardé intacte toute sa sève et sa sensibilité.

En réalité, Lounis n’a jamais eu besoin de hausser la voix, car nous l’avons toujours écouté, et encore aujourd’hui avec le cœur.

Finalement, nous arrivons bien à voir que le poète est un être ordinaire par nature, et exceptionnel par la noblesse de sa sensibilité. Une sensibilité qui force le respect, car elle véhicule la fraternité, l’espoir et la liberté pour tous.

Yacine Cheraiou

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