Marcus Hönig a publié un livre-récit, Les larmes de Jimmy, sur son équipée en Algérie en août 2024. Il livre ici à sa manière – avec tact et sensibilité – ses impressions et réponses à des questions qui nous sont venues après lecture de son livre.
Le Matin d’Algérie : Comment vous, Ardéchois, êtes arrivé à faire ce voyage en Algérie ?
Marcus Hönig : Dans mon parcours d’écriture, j’envisageai une suite au roman Planète Verte* qui illustre la vie en régime autoritaire. Cette suite devait pour partie se dérouler en terre d’Islam. J’ai appris, je pensais, qu’il est impossible d’écrire et d’évoluer dans un sujet dont on n’a aucune connaissance personnelle. L’idée d’aller voir, l’autopsie, est restée en attente.
Je trouvais à me documenter sur tel ou tel pays, quand l’Algérie restait aux contours flous, mystérieuse, ne laissant rien entrevoir de son actualité. Plus j’avançai, plus ma propre ignorance à son sujet se dévoilait concernant la vie des Algériens aujourd’hui.
Ce « trou noir » finit par devenir magnétique. C’est alors qu’a eu lieu la rencontre à Briançon avec un membre bénévole d’un centre d’accueil pour réfugiés qui m’affirmait que oui, des Algériens fuient leur pays. Ma curiosité prit alors une nouvelle tournure. C’était d’abord l’Algérie, c’est devenu les Algériens. J’ai débarqué, carnet à la main comme prévu, mais c’est un autre livre, plus urgent, qui s’est imposé.
Le Matin d’Algérie : Qu’est-ce que vous connaissiez de l’Algérie avant ?
Marcus Hönig : J’évoquais mon ignorance, elle était grande et l’est toujours. Il m’a fallu des mois pour y voir plus clair avant d’abandonner la quête d’éclairer le passé sans connaître le présent.
Je ne peux, en tant qu’écrivain, n’être que l’élément sensible, pas celui qui ambitionne d’expliquer. C’est à croire que le nom même d’Algérie est synonyme de passé. Je me lassai des disputes d’experts qui si elles étaient éclairantes nous auraient tous aveuglés depuis longtemps. J’interrogeai autour de moi, chacun avait finalement un lien avec l’Algérie, lien solide, mais muet. Je ne savais pas à quoi m’attendre, si sur place j’allais être plongé dans cet illisible brassage des passés. Il n’en a rien été, pas un mot de la guerre ou de colonie, en dehors d’évocations songeuses.
L’heure est réglée sur le présent, présent, présent.
Le Matin d’Algérie : Quelles furent vos appréhensions premières ?
Marcus Hönig : Les premières n’étaient pas les miennes. Elles m’étaient généreusement transmises par un entourage qui, sous prétexte de bienveillance, m’aura organisé quelques sueurs froides. Naïf, inconscient, tête brûlée, je paraissais être tout cela. Des velléités de renoncements m’ont effleuré. Malgré cela, une attraction irrépressible m’obligeait. Je pensais dès janvier 2024 qu’une rupture entre la France et l’Algérie n’était pas à exclure et qu’il fallait se dépêcher.
Je ne me suis senti nulle part en danger, de jour, de nuit, à Alger ou ailleurs. Sitôt le pied posé à Alger je me suis senti entouré. Je n’ai jamais donné tant de mains, jamais dit autant merci, jamais été à ce point bienvenu quelque part. Leurs mains sont venues au contact de mon cœur avec une force inouïe.
Un homme, à Alger, après une longue discussion, me dit ceci : « En France, Marcus, tu es Français, mais en Algérie et es un Algérien ».
Ces mots sont puissants.
Un policier, toujours à Alger, à qui je demandais mon chemin, m’a donné sa main et s’est excusé de ne pas mieux parler le français ! C’est la métamorphose des craintes, ce voyage m’a conduit de la peur de à la peur pour.
Le Matin d’Algérie : En arrivant à Alger, qu’est-ce qui vous a le plus surpris ?
Marcus Hönig : J’ai su dans l’instant que j’étais au bon endroit. En partant, je recherchai à me mettre en situation d’insécurité, culturelle, émotionnelle, affective, à aller exactement là où on ne va pas. D’Européen, sac au dos et content d’être là, je n’ai croisé aucun autre. Tant mieux, je n’avais pas le choix que d’encaisser à 100% tout ce qui allait laisser sa marque. Et les marques sont profondes.
…30 gamins courent après un ballon dans une rue barrée pour qu’ils aient un endroit où jouer, se défouler sous le regard amusé des policiers qui se régalent du spectacle, sur fond de sirènes hypersonores à l’américaine des voitures de la Chorta.
…Après 3 jours on ne sent plus la pollution délirante dont j’ai pris une immense tarte dès la première rue.
Être comme un poisson dans l’eau, dans le chaudron algérois de 4 millions de personnes, c’est surprenant, oui.
Le Matin d’Algérie : Vous étiez en Algérie au moment où les relations avec la France avaient commencé à se brouiller avec notamment le rappel par l’Algérie de son ambassadeur à Paris. Aviez-vous ressenti quelque animosité pendant votre séjour ?
Marcus Hönig : Ma présence à Alger coïncidait avec le lancement de la campagne électorale pour les présidentielles. Il y avait de l’électricité dans l’air ! Aucune animosité à mon égard, pas directement. Un accrochage seulement, un peu rude, avec un policier en civil, place des Martyrs. Comme je l’indique dans le livre, il a mal agi, très mal, à l’égard de la personne avec qui je me trouvais. De plus, il était mécontent d’avoir été pris en photo, ce qui lui a donné l’occasion de vociférer. À cet instant, j’ai plutôt eu l’impression que mon passeport français m’avait sauvé la mise.
J’ajoute que cet homme m’a, par son attitude, tellement mis en colère, que je lui ai souhaité un affreux châtiment que je décris dans le livre. J’espère qu’il y aura survécu !
Le Matin d’Algérie : Après Alger et Tipasa, vous avez rejoint Bejaia. Peut-on avoir, avec le recul, vos impressions sur ces trois villes ?
Marcus Hönig : Il y aurait à dire sur Alger, Tipasa, Bejaia, Tigzirt, mais je ne peux me permettre d’exprimer un jugement sans le contexte de l’instant tel qu’il est décrit dans le livre.
Il y a de l’ombre partout, de la lumière sitôt qu’on convoque des espoirs avec les habitantes et les habitants. Partout, en chaque lieu, des Algériennes et des Algériens, différents, mais avec le souhait partagé de (re)voir un âge d’or pour leur ville, quelle qu’elle soit.
Le Matin d’Algérie : « Voyageur, je te le dis, s’il te prend l’idée de jouer les routards en Algérie, si on te donne un contact, accepte-le, ces gens ont une parole et te sauvent la mise ! » Avez-vous écrit à un moment. Cela vous a surpris ?
Marcus Hönig : Au débarquement à Alger j’avais déjà 7 numéros de téléphone de gens prêts à me sortir de n’importe quelle situation, n’importe où en Algérie ! Les paroles, et les actes.
Cela ne m’a pas surpris, mais autant, c’est invraisemblable. C’est un incessant courant de générosité. Et je ne parle pas ici de cette petite affaire de confiture sur le quai de la gare de Bejaia, qu’il faudra découvrir à la lecture !
Le Matin d’Algérie : Qu’est-ce qui est le plus difficile pour un touriste lambda qui arrive dans le pays ?
Marcus Hönig : J’ai envie de dire que probablement, pour le touriste, il n’y a aucune difficulté particulière.
Je ne suis pas très représentatif du touriste, sans doute. Ceux, rares, croisés en ville, logeaient à l’extérieur d’Alger, dans de grands hôtels sécurisés.
Peut-être une question à poser serait : qu’en est-il pour une touriste ? Celles, arrivées de France pour visiter la famille, s’exprimaient ainsi à Alger : « On se met en mode caméléon pour ne pas avoir d’ennuis. Se couvrir de la tête aux pieds par cette chaleur, ce n’est pas un plaisir, mais il le faut ».
Le Matin d’Algérie : Avez-vous gardé des contacts sur place ?
Marcus Hönig : Les paroles rapportées dans « Les larmes de Jimmy » sont vraies. Ce qui est vrai également est qu’elles peuvent à elles seules provoquer perte d’emploi, harcèlement policier, prison et je ne sais quel autre déferlement malsain. Cela même je le sais de mes contacts, qui sont protégés par une anonymisation dans le récit. Pour cette raison ces liens sont à présent coupés. Si l’un ou l’autre souhaite me trouver, ou si je souhaite retrouver quelqu’un, nous saurons le faire. C’est le prix pour que la promesse faite soit tenue.
Ce ne sera que temporaire. Le vent tournera aussi pour ceux qui ont un pouvoir d’emmerdement maximal aujourd’hui sur les autres, pour le dire crûment, ils finissent tous par disparaître l’un après l’autre, c’est une affaire de patience.
Le Matin d’Algérie : Serez-vous prêt à retourner ? Et si oui pourquoi ?
Marcus Hönig : Est-ce que je veux revenir ? Oui ! Continuer la route, écouter encore, être traversé encore.
Je ne suis sans doute pas très objectif et cela n’a aucune importance. Mon intuition est que la situation de l’Algérie aujourd’hui est un oracle pour elle et nous demain. En France, la politique intérieure se fait à l’extérieur. À deux ans des présidentielles, aller poser son oreille sur la porte du sud peut avoir du sens.
Tout le monde est fragile, chacun à sa manière. Je ne suis pas politologue, ni économiste, mais un glissement ne s’arrête jamais au milieu de la pente. Si un effondrement devait avoir lieu en Algérie, tel que les Algériens eux-mêmes le pressentent, nous serons cette fois tous dans le même bateau. Harraga pour tout le monde, sans plus savoir où l’on va.
Ma place pour cet été était réservée, j’ai annulé. C’est une décision avec laquelle je ne suis pas à l’aise, je la regrette. Je n’ai personne qui sonder, personne à qui confier cette décision. Pour être sincère, je crois qu’il est impossible de faire bien actuellement à la place qui est la mienne. De plus, pendant un temps au moins, je dois m’effacer pour laisser aller le livre qui doit se défendre seul pour grandir.
Est-ce je peux revenir ? J’aimerais avoir un signe clair, mais comment le reconnaître ?
La surdité d’un pouvoir susceptible, qui recourt pour un oui pour un non à la démesure contre ses citoyens, ne donnent pas envie d’engager le débat avec lui. S’il savait, ce même pouvoir, à quel point son peuple est plus ouvert et lucide que lui. J’imagine que ce petit livre a des chances de déplaire à ceux qui aiment à fermer la bouche de leurs opposants. Je me trompe peut-être. Que nous soyons de force inégale est évident, mais rien ne m’interdit la réciprocité pour affirmer que bâillonner est pour me déplaire aussi.
Je souhaite pour moi comme les autres la liberté.
Un signe clair, donc ? Il arrivera.
Entretien réalisé par Hamid Arab
Note infos
*L’édition anniversaire des 10 ans de Planète Verte sera publiée dans les prochaines semaines. Infos et actualités www.marcushonig.com et facebook
Je cite: « On se met en mode caméléon pour ne pas avoir d’ennuis. Se couvrir de la tête aux pieds par cette chaleur, ce n’est pas un plaisir, mais il le faut ».
Ca je trouve bizarre… Mais ne se couvre-t-on pas pour se proteger, du soleil? Ca va vous etonner, mais c’est souvent que je suis tombe’ sur des tenues Nomades, genre Iraq, aussi bien aux USA qu’en Australie… L’apprehension ou si vous voulez « la peur » est peut-etre imaginaire… Mais comme dirait l’autre « C’est votre droit absolut d’avoir peur, c’est un droit constitutionnel guaranti ! «
Une autre citation: « En France, la politique intérieure se fait à l’extérieur. À deux ans des présidentielles, aller poser son oreille sur la porte du sud peut avoir du sens. »
Je pense que le president Francais sais comment que ca va et que se doit finir. Les pays occidentaux ou est-ce plutot de l’Ouest Europeen(une geolocalisation est plus juste) vont demonter la republique islamo-stalinienne, c.a.d. type Iran. Pour cela, il vont biensur allumer un incendie avec le Maroc. Ce qu’ils ont commence’ a faire d’ailleur. Des Musulmans « modere’s(Oxymore) » ne sont pas interessants, pour la simple raison qu’ils peuvent et risquent de s’emanciper et s’averer une rude competition – d’ou donc le risque. Ne s’effrayent-on pas deja que la tomate Egyptienne fait la concurence a l’Italienne et la Marocaine(tomate) a la Francaise deja. Bref l’agriculture. Et pire, le Teboune a repris le projet du Ble’ pour nourir toute l’Afrique qu’a ose’ le Gadafi. Bref, des Musulmans fonctionnels c’est dangereux. Il faut donc des ABRUTIS, c.a.d. des Musulmans gere’s d’une main de fer, genre les Emirats, Sultanats d’Arabie et biensur le Maroc. Ne sont-ils pas presque arrive’s a faire de Bouteflika un Sultan?
Mais puisque vous cherchez l’Oracle, alors le voici. Pour sortir de l’impasse, l’Algerie a besoin d’effectuer une operation: Cesser de sponsoriser la religion Islamique. Ce qui doit se suivre de 2 autres petites modifications, a savoir:
a. Completer le remplacement du Francais par l’Anglais universel comme langue de travail, de gestion et de gouvernance et mettre a meme pied d’egualite’ Tamazight, l’Arabe et le Francais. En termes reels, il s’agit de l’Ecole. Il faut en finir avec l’Ecole de la Republique telle COPIE’ BETEMENT de la France. Se pose le probleme du corps d’enseignement des 4 langues, depuis les curriculum jusqu’aux personnels enseignants – Ce qui necessite la 2eme modification: Separer le Curriculum de la gestion de l’enseignement et de la logistique(moyens). Pour se faire, il y a lieu de baser les budgets sur les nombres d’ecoliers, lyceens et etudiants. On budgete par tete. Ainsi, le gouvernement central doit s’occuper de gerer 4 Academies qui font de la RECHERCHE et NON de la Gestion. Leurs produits seront des Curriculums et des Examens correspondents. Et la mise en pratique? me dites-vous – Et bien d’est le role des Wilayas – qui elles-meme doivent s’autonomiser en corrigeant la fonction Wali, pour qu’elle s’aligne plus avec la notion de Gouverneur aux USA. Cela implique son election c.a.d. qu’il rende compte aux populations concerne’es, directement ou indirectement. L’ideal serait le direct mais, il serait peut-etre pratique de passer par un Scrutin indirect(du Gouverneur/Wali). En d’autres termes, le President de la Republique propose et les Elus Locaux(des Wilayas) valident ou rejetent – en toute transparence. Ainsi, la flicaille et services incapables de quoi que se soit a l’etranger, trouvera des missions legitimes. Construire des dossiers sur les politiciens – a mettre a la disposition d’elus locaux. Mais pas que !!! Et la Presse aussi ! Cette presse-la se mettra a defendre le pays en exposant les politiques qui lui sont nuisibles(a la republique). Les abattre avec des mots, des documents et videos.
C’est la seule facon d’en sortir saint et sauf, et le plutot le mieux. Sinon, un beau minuit le Maroc commencera son « Operation Speciale » et la republique s’ecroulera a coup de coups d’etats entre generaux, commandants et colonels… Le regime se reforme de vrai ou se suicide !
Comment gerer l’Education Localement? Voila qui fait appel a la Notion de Referendume Local.
b.