Les téléphones portables du Premier ministre espagnol, Pedro Sanchez, et de sa ministre de la Défense, Margarita Robles, ont fait l’objet d’écoutes « illégales » et « externes », au moyen du logiciel israélien Pegasus, a affirmé lundi 2 mai le gouvernement espagnol.
L’affaire du logiciel espion israélien Pegasus connaît un nouvel épisode en Espagne. « Il ne s’agit pas de suppositions », a déclaré lors d’une conférence de presse convoquée avec un caractère d’urgence par le ministre de la présidence, lundi 2 mai. Félix Bolaños a parlé de faits « d’énorme gravité », lesquels se sont produits en 2021. Le porte-parole indique que cette information est incontestable dans la mesure où elle lui a été fourni par le Centre national de christologie, indique François Musseau à Madrid.
« Nous avons la certitude absolue qu’il s’agit d’une attaque externe (…) parce qu’en Espagne, dans une démocratie comme la nôtre, toutes les interventions sont effectuées par des organismes officiels et avec une autorisation judiciaire », a-t-il affirmé. « Dans le cas présent, aucune de ces deux circonstances ne s’est produite. C’est pourquoi (…) nous n’avons pas le moindre doute qu’il s’agit d’une intervention externe », a poursuivi Félix Bolaños.
Trois intrusions entre mai et juin 2021
Le ministre n’a pas précisé si les autorités espagnoles avaient une piste sur l’origine de cette intervention, et notamment si elle émanait d’un pays étranger : « Quand nous parlons d’intrusion externe, ce que nous voulons dire est qu’elle n’est pas le fait d’organismes d’État et qu’elle n’a pas été autorisée par la justice. »
Félix Bolaños a indiqué qu’il y avait eu « deux intrusions » dans le portable de Pedro Sanchez, en mai 2021, et une dans celui de Margarita Robles, en juin 2021. Dans les deux cas, les interventions ont permis d’extraire « un volume déterminé de données des deux téléphones mobiles », a-t-il encore déclaré. « Il n’y a pas de preuves qu’il y ait eu d’autre intrusions après ces dates », a-t-il poursuivi.
Conçu par l’entreprise israélienne NSO, Pegasus permet, une fois installé sur un portable, d’accéder aux messageries, aux données ou d’activer l’appareil à distance à des fins de captation de son ou d’image. NSO a toujours affirmé que Pegasus ne pouvait être vendu qu’à des États et que ces ventes devaient obtenir le feu vert préalable des autorités israéliennes.
Selon l’ONG Amnesty International, ce logiciel pourrait avoir été utilisé pour pirater jusqu’à 50 000 portables dans le monde.
Les recommandations de RSF pour les journalistes potentiellement “espionnés” par Pegasus
Ces révélations surviennent alors que l’Espagne est en proie à une crise entre le gouvernement central de Pedro Sanchez, un socialiste, et les milieux indépendantistes de Catalogne, qui accusent le Centre national du Renseignement (CNI, les service espagnols de renseignement) d’espionnage.
L’affaire a éclaté le 18 avril, lorsque Citizen Lab, un projet sur la cybersécurité de l’Université canadienne de Toronto, a rendu public un rapport identifiant 65 personnes de la mouvance indépendantiste – pour la plupart des Catalans – dont les portables auraient été piratés entre 2017 et 2020 par le logiciel israélien.
Aussitôt, l’opposition de droite a réagi en ironisant sur cet incroyable hasard ; une façon de ne pas vraiment y croire. Quant aux indépendantistes catalans, ils mettent totalement en doute les paroles du gouvernement national.
RFI