Planète verte est une fable politique d’anticipation. D’une écriture tantôt nerveuse et tantôt contemplative, ce roman nous fait évoluer sur le fil du rasoir d’un monde que nous nous tuons d’ignorer.
Ce roman dont le titre est déjà un sacré contrepied est le premier de Marcus Hönig (*), paru aux éditions Books on Demand. Resserré comme un poing sur 180 pages, Planète verte convoque des éléments d’un monde dystopique, mais pas impossible. La construction de ce récit politico-social aux accents engagés a lieu dans un pays qui s’appelle la France, dirigée par Marion S (suivez mon regard), une présidente diablement autoritaire pour qui le contrôle total de la population n’est pas qu’une simple lubie. «Marion S, en dirigeante avisée et réaliste sur les faiblesses et la corruptibilité des hommes, appliquait un système des plus judicieux pour éviter tout problème avec le personnel de confiance…»
L’enjeu ? Nourrir la population. En filigrane du sujet, se pose la question des choix agricoles dans le pays mais au-delà aussi. Avec l’utilisation industrielle des pesticides et son corollaire l’agriculture intensive, c’est non seulement la question de la santé mais aussi une terre devenant de moins en moins productive.
Alors comment faire ? Là intervient un projet industriel fou, devenu vite incontrôlable. «Marco se mordillait la main.
– Seulement, je te l’ai dit, il est impossible d’envisager des produits d’origine animale pour ça, à cause du risque de provoquer une crise sanitaire
– OK, pas d’animaux dans l’engrais, pigé.
– Bien. Avant de lancer la production de l’engrais, Ferkel, toujours au nom de S., avait annoncé à un cercle restreint la construction d’une usine expérimentale de fabrication de ciment biologique. Ciment révolutionnaire pour le bâtiment».
Dans ce monde qui perd la tête, on retrouve un homme, Marco, que rien ne prédestinait à mettre le caillou dans le rouage complexe de cette machine arbitraire. Marco élève seul son fils. A son corps défendant, il se retrouve au cœur d’une grosse opération où l’avenir de la société était en jeu et qui va mettre en défi ses convictions.
Le récit s’affole quand il croise dans cette aventure une femme, Tania, qui, elle aussi, élève seule sa fille Louise. L’improbable duo se voit mêler au combat du Chef. Un homme surgit comme un météorité pour déstabiliser la vie pépère d’un village pour un idéal autrement plus grand.
L’intrigue de cette satire politique est compartimentée de chapitres tressés d’une écriture rythmée avec des vas et viens entre les différents protagonistes de l’histoire. Marcus Hönig livre ici une exploration d’un monde autoritaire dont les pratiques constituent une menace sérieuse pour l’humanité. Même grave, le roman n’est pas dénué d’humour. Planète Verte mêle avec une certaine gourmandise l’introspection philosophique et l’engagement politique. Il nous invite à la vigilance sur les menaces écologico-politiques qui ne sont pas sans péril.
Loin d’être un livre fataliste prêchant le renoncement, Planète Verte se veut un appel à regarder le monde qui vient et à lutter, chacun à son niveau, pour le rendre meilleur.
Hamid Arab
Planète verte par Macus Hönig. Editions Books on Demand.
(*) Marcus Hönig est aussi l’auteur de l’ouvrage « Les larmes de Jimmy ».

