Lundi 28 janvier 2019
Pluralité des propositions politiques, pluralité des chances ?
Nous venons d’apprendre le projet d’un nouveau parti algérien pour la démocratie. Il s’appelle Démocratie en Mouvement.
Ce n’est pas le premier, bien d’autres se sont fracassés aux réalités avant même leur maturité alors que d’autres se sont fourvoyés rapidement dans une compromission mortelle. Mais il n’est pas interdit que ceux qui ont subi un grand échec puissent faire bénéficier de leur expérience les nouveaux venus.
Je ne les connais pas, leur programme est loin d’être rédigé mais il n’y a aucune réticence de ma part à adhérer aux valeurs et objectifs du court extrait que j’ai lu. Il n’y a effectivement aucune raison d’avoir des a priori envers une démarche aussi louable dans son aspect premier. Nous verrons bien ce qu’il en sera.
Des personnes comme moi n’ont aucune envie ni ambition de reprendre le flambeau dans une bataille politique structurée. Ils n’en ont ni l’âge ni la force, surtout après notre échec retentissant auprès d’Ait-Ahmed.
Je ne renie rien, pas un seul mot ni action, de ma démarche en tant que membre de la direction nationale. Mais nous avons échoué et nous devons encourager les initiatives nouvelles. Nos anciens amis se sont vendus dans la compromission en participant aux institutions, ils ont un strapontin auprès du régime militaire, je ne partage pas cette honte car je n’en suis pas responsable
Le poste que j’occupais dans cette direction nationale et, surtout sa mission première, fut de préparer la « Constituante », chose que nous n’avions même pas commencé à rédiger dans sa première ligne.
Comme pour le mouvement El Mouwatana, je reprends le chemin de la mise en garde car même si nous ne sommes plus en course, loin de là, il nous reste néanmoins notre expérience, elle peut servir. Autrement, toutes ces propositions d’avenir démocratique risquent de s’enliser dans des généralités qui n’aboutissent pas à grand chose.
Je n’irai donc pas par des circonvolutions théoriques et générales qui n’ont aucun intérêt. Ces propositions sont directes et tranchantes car il ne faut pas reproduire la perte de temps qui fut la nôtre à l’époque.
Pour cela, je me permets, très modestement, de déposer au pied de leur berceau ma contribution sous forme de points très courts. Ils sont accompagnés de commentaires pour les justifier et les préciser.
1ère proposition :
Supprimer la référence à Dieu dans la constitution. Le mot laïcité doit le remplacer.
Il est absolument salutaire de le faire disparaître de là où il n’aurait jamais du figurer, il a assez fait de dégâts. L’objectif est de le transférer dans sa place naturelle et légitime, c’est à dire dans les positions individuelles et privées.
2ème proposition :
Supprimer, sans délai ni discussion, le code de la famille.
Supprimer et non modifier car un texte aussi barbare et moyenâgeux risque de laisser les traces de son empreinte pestilentielle dans le nouveau texte.
3e proposition :
Demander des comptes judiciaires à tous les détenteurs de biens mal acquis lorsque la fortune est supérieure à un seuil décent et suspectée de ne pas être compatible avec les règles de droit.
Adhérer à la convention internationale sur l’échange automatique des données bancaires.
C’est un point très épineux car il ne s’agit en aucun cas d’une chasse « aux riches ». Le comprendre de cette manière serait absolument contraire dans son esprit avec la proposition.
Les fonds recueillis, nationaux ou offshore, devront alimenter le financement d’urgence de toutes les populations fragiles : handicapés, orphelins, mères célibataires abandonnées…etc.
4e proposition :
Convoquer une commission nationale de réconciliation pour auditionner les membres responsables du régime militaire.
Aucune société au monde ne peut faire l’impasse sur son passé. L’épurer est la plus grande garantie de ne pas le voir revenir en boomerang. Nelson Mandela en a donné l’exemple, nous devons le suivre. Mais en aucun cas cette rétrospection du passé ne doit faire abstraction de la 3è proposition.
5e proposition :
Bâtir la zone du Maghreb démocratique.
Il faut absolument arrêter le plus vieil instrument des dictatures militaires soit l’appel à la résistance face à un « danger frontalier » qu’il alimente lui-même. Les marocains et les tunisiens sont notre plus grande chance comme nous pourrions être la leur. Les guerres et haines ne sont qu’un prétexte pour unifier les peuples dans un soutien aux pouvoirs en place.
6e proposition :
Ne surtout pas rédiger une nouvelle constitution en pensant que le juridique prime sur le choix politique.
C’est l’une de mes expériences personnelles qui m’avait marquée. Les militants pensaient que les compétences du droit constitutionnel étaient primordiales. Il n’en est rien même si elles sont éminemment importantes pour accompagner la rédaction du texte.
Nous leur souhaitons, de tout cœur, une bonne chance en espérant que dans quelques mois, dans quelques années, certains ne se retrouvent pas à l’assemblée nationale d’une république bananière et militaire.
L’histoire a ceci de particulier est qu’elle bégaie souvent.