Vendredi 20 novembre 2020
Pourquoi Alnaft ne s’était-elle pas adressée à Sonatrach pour ses études ?
Dimanche 29 septembre 2019, l’Agence nationale pour la valorisation en hydrocarbures (Alnaft) avait annoncé dans un communiqué avoir signé une convention avec le géant américain ExxonMobil portant sur la participation de cette compagnie à «l’étude d’évaluation du potentiel en hydrocarbures des bassins du domaine minier algérien.»
C’est, lit-on dans cette annonce la quatrième compagnie multinationale à rejoindre l’agence dans cette étude après l’Italien ENI, la française Total et la norvégienne Equinor. (01) L’objectif laisse t- on entendre est de consolider et de compléter le travail en cours confié à Beicip-Franlab dont le contrat a été signé le 10 septembre 2017 pour obtenir un livrable définitif en octobre 2020 car l’agence a jugé ces quatre compagnies comme leaders dans ce domaine notamment l’exploitation du gaz de schiste.
Il faut souligner que la compagnie française Beicip-Franlab a fait une évaluation dans une première étape qu’elle a clôturée en juin 2019, phase qui a montré un potentiel qui «place l’Algérie aux premiers rangs mondiaux en termes de ressources en hydrocarbures mais ne précise pas leur nature conventionnelle ou pas. Ce qui a été déjà identifié selon ce communiqué, c’est l’ensemble des bassins du Sahara avec les gisements les plus prometteurs.
Les détails de ces zones sont prévus être livrés durant le premier semestre 2020 pour lancer les appels à la concurrence pour la conclusion des contrats conformément à la nouvelle loi sur les hydrocarbures dont les textes sont encore en cours d’élaboration.
Selon le nouveau ministre en charge du secteur, Abdelmadjid Attar, 17 sur 43 textes d’application sont prêts et se trouvent actuellement en cours pour avis et appréciation des autres secteurs conformément à la procédure en vigueur. Est-ce cela les fameux 150 gisements dont n’arrêtait pas de parler son prédécesseur Mohamed Arkab ?
1- Examinons d’abord la consistance de cette étude
Ce contrat avec le consultant français (Beicip-Franlab) qui en a fait toute une publicité sur son site pour certainement attirer une clientèle, a tout révélé sauf le montant que le site e-bourse évalue à 3,69 millions de dollars (02). En quoi consiste cette étude exactement selon le consultant lui-même ?
Il s’agit d’une mise à jour et d’une synthèse pétrolière des bassins du Sahara algérien dans « une opportunité multi-clients» qui est intégrée en 3G géologie-Géophysique-Géotechnique (03) et basée sur 262 000 km de sismique 2D, 1800 puis et 70 000 km2 de sismique 3D pour livrer lit-on sur ce site 230 cartes géologiques et géophysiques, 50 résultats de modélisation du système pétrolier et « 150 cartes des risques pétroliers. »
Comment procéder ? Interpréter d‘une manière exhaustive les données souterraines, faire de même pour la géologie géophysique du Cambrien au Trias, analyser et cartographier les fairways à jour, enfin modéliser le système pétrolier. Les régions concernées sont les bassins de : Tindouf /Reggan pour 34100 km, Timimoun pour 78100 km, Ahnet /Mouydir pour 26 400 km, Oued Miya pour 16500 Km, Berkine /Illizi 804 000 km et Hassi Messaoud pour 27 300 km. Le consultant français déclare avoir mobilisé 25 000 heures –Hommes, consacrées uniquement à l’évaluation du potentiel d‘hydrocarbures dans ce domaine.
2- Une redondance par excellence d’études réalisées par Sonatrach
Le plus curieux dans cette affaire est que le même consultant français a déjà réalisé pour le compte des différentes structures de Sonatrach les études de ces régions séparément. Il existe donc une base de données exhaustive pour que les ingénieurs de la direction exploration de Sonatrach puissent exploiter sans apport extérieur de consultations. Il est clair et établi que ces bassins sont connus en détail par les équipes de Sonatrach. Comment peut-on concevoir que la dixième compagnie mondiale confie son domaine minier déjà étudié à un consultant français pour réorienter sa stratégie pétrolière et gazière.
Il faut souligner par ailleurs que le cambro-ordovicien renfermant les hydrocarbures conventionnels est parfaitement maitrisé par les équipes géologiques de la direction exploration de Sonatrach depuis des décennies pour ne pas dire depuis sa création.
Maintenant en ce qui concerne le gaz de schiste ou les bassins shale gas, une équipe pluridisciplinaire sous la conduite de SH/PED (production-Engineering-développement) a été chargée en février 2011 d’évaluer le potentiel du point de vue production et économie des bassins Shale Gas en Algérie. De manière globale, ce projet a été subdivisé en deux phases complémentaires.
La première était réservée à l’estimation du potentiel des bassins Shale Gas en Algérie et leur évaluation économique préliminaire. La deuxième de confirmer le potentiel par région pour leur développement et exploitation éventuelle.
Ce travail été finalisé dans les détails et qui a permis une publication par l’Agence américaine d’Information sur l’énergie (EIA), en avril 2011, de chiffres tendant à démontrer que l’Algérie occuperait la 3éme place dans les réserves de gaz de schiste et serait l’un des pays les mieux doté dans cette ressource.
Cette agence reprend le document des équipes de Sonatrach pour donner les moindres détails par niveau producteur Dévonien / Silurien : superficie totale, celle prospectée du réservoir, la profondeur du réservoir, le Total Organic Carbon TOC, les réserves en place et celles récupérables. Les régions visées sont Tindouf, Reggane, Timimoune, Ahnet, Mouydir Ghadamès/ Berkine et Illizi. Il est très difficile avec ces détails d’attendre ce que vont donner ces nouvelles études conduites par cinq géants pétrolier et un cabinet de consulting qui n’a jamais quitté l’Algérie ?
Rabah Reghis
Renvois