26 novembre 2024
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Pourquoi la France multiplie ses ambages diplomatiques sur l’Algérie ?

DECRYPTAGE

Pourquoi la France multiplie ses ambages diplomatiques sur l’Algérie ?

L’ambassadeur de France en Algérie, Xavier Driencourt, ne cesse de mentir et de démentir les différentes positions de la France vis-à vis de la crise que vit l’Algérie ce début  de l’année 2019 et surtout depuis le mouvement de dissidence populaire du 22 février de cette année.

Jeudi dernier à l’issue d’une audience que lui a accordée le chef de l’Etat Abdelkader Bensalah auquel il a remis ses lettres de créances pour sa reconduction à la tête  de l’ambassade de France en Algérie, Xavier Driencourt a contesté, pourtant personne ne lui a demandé, « toute volonté d’ingérence » de son pays dans les affaires internes de l’Algérie. La France a-t-il soutenu, suit « avec beaucoup de respect » la situation qui se passe en Algérie sans porter «  un jugement et sans aucune implication dans les affaires algériennes ». Et de préciser « au même titre que les autres pays européens. »

Toutefois, il ne cache pas « qu’il est parfaitement conscient de se trouver dans une situation et à un moment très particulier de l’histoire de l’Algérie ». Il a multiplié les louanges sur l’Algérie pour prendre le maximum de temps afin d’éviter les questions qui fâchent comme celle dénoncée par le général-major, chef des armées et vice-ministre de la Défense nationale, lors de son intervention fin mars sur l’ingérence d’une main étrangère en collaboration avec certains responsables en place ou en retraite.

Pour l’ambassadeur de France, «l’Algérie est un grand pays que nous admirons et mon souhait est de développer ensemble les relations dans tous les domaines entre les deux gouvernements mais aussi et surtout entre les deux peuples français et algériens amis». Pour  Xavier Driencourt, «le peuple français est impressionné par la maturité politique du grand peuple algérien». 

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Sur le plan diplomatique, on est passé, et c’est la diplomatie française qui le déclare au gré des circonstances d’une «  prudence » à celle de « ni ingérence ni indifférence » en passant par un « observation active » pour arriver aujourd’hui à une admiration d’un peuple qui semble si l’on interprète les propos qui leur donne un exemple de civilité implicitement par rapport à ce qui se passe chez eux avec les gilets jaunes.

Pourtant, les Algériens dont la relation avec la France est effectivement particulière sont persuadés que ces déclarations politiquement correctes, ne sont que la ligne officielle de ce pays qui dans le fond « bouille de l’intérieur » pour ne pas manquer un événement qui se passe en Algérie pour, dit-on, plusieurs raisons : économique social et surtout politique.

De nombreux témoignages rapportés à maintes reprises par la presse françaises elle-même disent que depuis début mars, le président Macron s’est entretenu directement avec l’ambassadeur de France en Algérie, « initiative rare ». Il  a ainsi demandé à Xavier Driencourt de faire un aller-retour à Paris pour évoquer la situation et faire part de ses retours de terrain au ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian. Au Quai d’Orsay, la cellule diplomatique est entièrement mobilisée. Le dossier est hautement sensible. L’histoire de l’Algérie et celle de la France sont intimement liées.

La communauté algérienne est très présente dans l’Hexagone et, à l’inverse, de nombreux ressortissants français vivent en Algérie. 

En tout, plusieurs centaines de milliers de binationaux vivent sur l’une ou l’autre des deux rives de la Méditerranée.  900 000 binationaux recensés et plus de 5 millions ressortissants algériens sont présents en France ? C’est une communauté importante pour que les autorités françaises se préoccupe sérieusement.

Pas seulement. La position stratégique de l’Algérie, qui partage ses frontières avec le Mali, le Niger et la Libye, permet d’apporter une aide précieuse en matière de renseignement. Si bien que le risque d’une déstabilisation de la zone est pris très au sérieux par le pouvoir français. Même si la situation est très différente, le précédent libyen, avec un pays qui a plongé dans le chaos depuis la chute de Kadhafi, est dans toutes les têtes. L’éditorialiste  du quotidien « Le Monde », Vincent Jaubert va plus loin car il aurait posé la question à un haut fonctionnaire très proche d’Emmanuel Macron de ce qui inquiétait le plus, le jeune président et à sa grande surprise ce n’était ni « une nouvelle crise financière », « ni une cyberattaque des Russes » et encore moins une « attaque américaine de l’Iran » mais le cauchemar des résidents de l’Elysée, c’est incontestablement l’Algérie.

C’était aussi le souci de ses prédécesseurs dont le dernier  est arrivé au point où lui-même et les membres de son gouvernement ont fait plus de visites en Algérie que dans leur propre métropole. Ce journaliste, au demeurant de talent, étaye cette thèse anxiogène par un risque d’une rupture de l’approvisionnement en gaz de l’ancienne colonie, le flux migratoire et surtout le spectre des conséquences qu’a connu la France en matière de terrorisme. Seulement ces analyses qui se fondent sur de la littérature, restent très éloignées de la réalité du terrain.

Les Algériens qui sont sortis dans la rue le vendredi 22 février, quand bien même ils se sont attaqués aux portraits de Bouteflika, ne le visent pas en valeur absolue mais pour la première fois dans l’Algérie indépendante le système dans son ensemble. Bien au contraire, ils veulent une rupture pour justement améliorer le bien-vivre pour rester dans leur pays. Si l’on se base sur une information relayée par le quotidien Le Figaro citant une « source sécuritaire crédible », ce n’est pas Bouteflika qui est inquiet mais les pôles du pouvoir qui ont prévu cet événement depuis longtemps et auraient même « averti l’écosystème de Zéralda ».

En somme, l’oligarchie par exemple se prépare pour transférer ses biens à l’étranger, ce qui a fait flamber l’euro ces derniers jours. Donc, en cas de krash, ce n’est pas des harragas qui envahiront la France et les autres pays européens mais l’argent sale que leurs banques protègent à l’insu des pays dont on dénonce tout haut les méfaits de leur flux migratoire mais dont couvre tout bas les sommes considérables que leurs apparatchiks transfèrent.

Dernièrement, l’Elysée a fait revenir le Général Pierres de Villiers qui connaît bien Ahmed Gaïd Salah pour tracer son profil et peut-être même pour rechercher ses points faibles. Ce retour pourrait avoir pour objectif de faire actionner le lobby sur place afin cette fois-ci non seulement de s’ingérer directement dans les affaires algériennes mais conduire carrément la transition avec ses alliés. Enfin, hier on apprend par « Le Point »  qu’avant même que le dossier de Louisa Hanoune soit examiné en appel le 20 mai prochain, un millier de personnalités françaises, militants politiques et syndicaux, défenseurs des droits de l’Homme, universitaires, ont signé un appel réclamant «sa libération immédiate».

Les Algériens eux-mêmes, les plus concernés sont encore en attente pour comprendre ce qui s’est réellement passé et pourquoi cette dame au demeurant respectable, militante de première heure s’associe-t-elle à une réunion douteuse d’abord secrète avec un général en retraite dont on dit qu’il est de connivence avec une main étrangère sous-entendu la France où il aurait fait plusieurs allers- retours. Si tout cela n’est pas une « ingérence directe », alors l’ambassadeur devrait lui trouver une autre expression politiquement correcte.  

 

Auteur
Rabah Reghis

 




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