Bassirou Diomaye Faye est élu président du Sénégal. Son principal adversaire a reconnu, ce lundi, la victoire de l’opposant dès le premier tour de la présidentielle. C’est un peuple fou de joie qui est sorti dans les rues pour célébrer la victoire de son candidat antisystème.
Ailleurs, des démocraties de façade !
Etre en crise économique n’est pas une fatalité. Le Sénégal vient de le prouver. Il a donné une énième leçon de démocratie aux autres pays africains encalminés par des système politiques corrompus et souvent héréditaires. A l’exemple du Tchad, grand ami de la France. Le fils Deby qui a pris le pouvoir à la suite de son père (resté 30 ans au pouvoir) vient d’invalider toutes les candidatures de ses opposants à la presidentielle.
Il y a eu Ali Bongo (Gabon) dégommé du pouvoir, (Faure) Gnassingbé (Togo) ou Joseph-Désiré Kabila (RD Congo). Au Maroc, le roi, tout commandeur des croyants qu’il est, est au-dessus du peuple. En lévitation, il choisit son premier ministre pour gérer les affaires avec une marge de manœuvres très réduite.
Deuxième mandat présidentiel : le ni oui, ni non de Tebboune !
En Algérie, l’armée choisit son candidat et le présente au peuple pour un simulacre de présidentielle. Abdelmadjid Tebboune en est la dernière et vivante illustration. Est-ce possible que ce qui s’est passé au Sénégal ait lieu en Algérie le 7 septembre prochain ? Autrement dit qu’un candidat hors-système se hisse à la tête de l’Etat. Peu sûr, car contrairement au Sénégal, l’écosystème qui dirige le pays a étendu ses ramifications dans toutes les sphères de décisions, nationales et locales.
En Tunisie, devenu président démocratiquement (une première dans l’histoire du pays, Kaïs Saeid s’est transformé en un autocrate qui n’a rien à envier aux autres dictatures arabes. Autour de nous, ce sont des juntes militaires qui dirigent les pays d’une main de fer.
Le Sénégal, un exemple !
Macky Sall, l’ex-président, a bien tenté de brouiller les cartes de la présidentielle au début de l’année, mais la mobilisation populaire lui a fait changer d’avis. Alors, l’élection du jeune Bassirou Diomaye Faye à la présidence est un signal fort pour les autres pays rongés par le népotisme et l’autoritarisme.
Le vainqueur de la présidentielle au Sénégal, Bassirou Diomaye Faye, 44 ans, a effectué une apparition publique lundi soir, après l’annonce de sa victoire spectaculaire, dès le premier tour du scrutin.
« Je voudrais dire à la communauté internationale, à nos partenaires bilatéraux et multilatéraux, que le Sénégal tiendra toujours son rang : il restera le pays ami et l’allié sûr et fiable de tout partenaire qui s’engagera avec nous dans une coopération vertueuse, respectueuse et mutuellement productive », a-t-il dit devant la presse.
M. Diomaye Faye entend porter l’idée de changements au sein de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest, la Cédéao : « Je lance un appel à nos frères et sœurs africains pour qu’ensemble, nous consolidions les acquis obtenus dans les processus de construction de l’intégration de la Cédéao tout en corrigeant les faiblesses et en changeant certaines méthodes, stratégies et priorités politiques.»
À Dakar, ce lundi 25 mars, ses partisans affichent leurs espoirs pour l’avenir du pays, tandis que ceux du candidat de la majorité, Amadou Ba, saluent le vainqueur. Témoignages.
Au Sénégal, Bassirou Diomaye Faye a été élu président du pays dès le premier tour, son adversaire, le candidat du pouvoir sortant, Amadou Ba, ayant reconnu sa défaite.
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Au lendemain du vote, quelques militants se sont retrouvés dans le quartier de Dieupeul, au siège de la coalition qui l’a porté au pouvoir, pour savourer la victoire. « On est vraiment content d’avoir élu un jeune président de notre génération, quelqu’un comme nous », lance une supportrice au micro de Théa Ollivier.
« Montrer à la jeunesse africaine qu’il y a une autre voie pour le changement »
Un autre abonde : « Je me sens fier, vraiment fier, d’avoir assisté à un moment historique, parce que c’est la première fois au Sénégal qu’on a un président aussi jeune, qui est vraiment souverainiste. C’est pour montrer aussi à la jeunesse africaine qu’il y a une autre voie pour un changement, que ce n’est pas la voie des armes, que ce n’est pas la voie du putsch. Il y a la voie électorale, démocratique, qui est possible. »
Un troisième ajoute : « Nous croyons au président Bassirou Diomaye Faye et au fait qu’on aura un Sénégal meilleur avec lui. On attend qu’il mette de la justice, qu’il crée des emplois, que les ressources qu’on a – nous avons le gaz, nous avons le pétrole, nous avons le zircon, nous avons tout cela – que toutes ces ressources nous reviennent. »
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Une dernière indique : « Je m’attends à ce qu’il réinitialise les institutions, à ce qu’il rétablisse la justice, à ce qu’il mette en place le projet de société mis en avant par le parti Pastef, pour que nos populations puissent avoir un meilleur niveau de vie. »
« Amadou Ba a reconnu sa défaite : voilà la démocratie !»
Au siège du parti d’Amadou Ba, l’Alliance pour la République, l’ambiance était tout autre, même si les partisans de l’ancien Premier ministre assurent ne pas être trop déçus. « Non, c’est le meilleur qui a gagné, réagit l’une d’elle au micro de notre correspondante à Dakar, Léa-Lisa Westerhoff. Nous sommes tous des Sénégalais ! Je suis fier d’Amadou Ba. Et la stabilité du pays, c’est ça qui m’intéresse, qui nous intéresse. »
Un deuxième insiste : « C’est une tradition républicaine : à chaque fois, après une élection, le vaincu félicite le vainqueur. Aujourd’hui, les Sénégalais, dans leur écrasante majorité, ont décidé de confier la destinée de ce pays pour les cinq ans à venir à M. Bassirou Diomaye Faye. Donc, le président Amadou Ba, en tant que républicain convaincu, ne pouvait faire autrement que d’accepter notre défaite et de féliciter le nouveau président que les Sénégalais, dans leur majorité, ont décidé d’élire. »
En dépit donc de sa crise économique aiguë, le peuple sénégalais vient de faire montre d’un immense respect des standards démocratiques. Bien loin de l’écrasante majorité des pays africains dirigés par des potentats corrompus et particulièrement autoritaires.
Une nouvelle génération de dirigeants est arrivée au pouvoir dans plusieurs pays africains. Si seul Bassirou Diomaye Faye a arraché son élection par les urnes, les autres sont des putschistes. On retrouve ainsi Ibrahim Traoré, président du Burkina Faso (36 ans) ; le président autoproclamé du Tchad Mahamat Déby (39 ans) ; Assimi Goita, colonel-président du Mali, (41 ans) ; le président guinéen Mamady Doumbouya (ex-colonel devenu général à 44 ans) et le plus méritant Bassirou Diomaye Faye (44 ans) élu démocratiquement à la tête du Sénégal.
L.M. avec Rfi