À l’heure où les arrestations se multiplient en Tunisie, touchant journalistes, activistes et opposants politiques, le 17ᵉ numéro de Nawaat Magazine braque ses projecteurs sur un sujet brûlant : la situation des prisons tunisiennes. Aujourd’hui, plus de 33 000 personnes sont détenues, souvent dans des conditions que des organismes nationaux et internationaux qualifient d’inhumaines.
Dans plusieurs établissements, le taux de surpopulation carcérale dépasse les 200 %, transformant la détention en une expérience de survie. Les détenus souffrent du manque de soins médicaux, d’hygiène et d’une alimentation correcte. Les entrées en prison ne cessent d’augmenter : 10 000 nouvelles personnes ont été incarcérées au cours des deux dernières années. L’Instance Nationale pour la Prévention de la Torture attribue cette hausse à la prolifération des arrestations arbitraires et à la lenteur du processus judiciaire.
Amnesty International souligne que des mesures de détention préventive floues servent parfois de prétexte pour maintenir derrière les barreaux des figures politiques opposées à Kais Saied. Le constat est clair : la justice tunisienne peine à protéger les droits fondamentaux de ses citoyens, et la prison devient un outil de contrôle politique.
Nawaat Magazine ne se limite pas aux chiffres : le magazine donne une voix à ceux qui subissent directement ces violations. Les journalistes sont frappés, arrêtés, traînés en justice et emprisonnés pour avoir exercé leur métier. De même, les défenseurs de la cause migratoire voient leur engagement se payer au prix de la liberté. Des activistes comme Shérifa Riahi, Imen Ouardani et Saadia Mosbah ont été incarcérées, tandis que plusieurs décès en détention ont secoué le pays. Parmi eux, Hazem Amara, Mohamed Amine Jendoubi, Wassim Jaziri et Montassar Abdelwahed, tous morts dans des conditions jugées suspectes en juillet 2025, ont brisé le silence entretenu par les autorités sur ce phénomène.
Face à cette gravité, Nawaat Magazine propose un regard critique et artistique sur ces réalités. Le caricaturiste Tawfiq Omrane y apporte son humour noir, tandis que la bande dessinée de Seif Eddine Nechi offre un point de vue original et engagé. Loin de la simple actualité, le magazine cherche à décrypter, analyser et contextualiser les événements pour en révéler les causes et les conséquences.
Depuis sa création en 2004, Nawaat s’est imposé comme un pionnier du journalisme alternatif en Tunisie, combinant enquêtes approfondies, reportages, portraits et vidéos de qualité. Le média, multi-primé, se distingue par son audace et son indépendance, offrant un regard critique sur la démocratie, les droits civiques et la justice dans le pays. En 2020, le lancement du magazine imprimé trimestriel et l’incubateur Innawaation ont renforcé ses capacités à produire un contenu multimédia et innovant, allant au-delà de l’instantanéité de l’information classique. En 2021, Nawaat a inauguré un festival annuel de trois jours, destiné à présenter au grand public ses productions et à promouvoir un journalisme engagé et alternatif.
Pour soutenir ce travail et accéder à l’ensemble des contenus, Nawaat propose diverses formules d’abonnement : annuel avec numéro gratuit, abonnement Patreon donnant accès aux archives en ligne, ou achat à l’unité en version numérique. Ces initiatives permettent aux lecteurs de participer activement à la promotion d’un journalisme libre et de qualité, indispensable dans un contexte où la liberté d’expression et les droits humains sont constamment menacés.
Le 17ᵉ numéro de Nawaat Magazine ne se contente pas d’informer : il interroge la société, dénonce les abus et rend visibles les invisibles. Face à l’augmentation des arrestations, aux décès en détention et à la répression croissante des voix dissidentes, le magazine confirme sa mission : offrir un journalisme engagé, indépendant et critique, capable de mettre en lumière les enjeux cruciaux de la Tunisie contemporaine.
Mourad Benyahia