Le juge des délits du tribunal de Bir Mourad Raïs a ordonné, jeudi, le placement en détention provisoire du journaliste Saad Bouakba, après son présentation en comparution immédiate. L’audience a été renvoyée au 4 décembre 2025, date à laquelle l’affaire sera examinée.
Selon un communiqué du procureur de la République près le même tribunal, une enquête préliminaire a été ouverte à la suite d’une plainte déposée par Mahdia Ben Bella, fille du premier président algérien, Ahmed Ben Bella. Elle accuse le journaliste d’avoir porté atteinte à la mémoire de son père, considéré comme l’un des symboles historiques de l’État, lors d’un entretien diffusé sur la chaîne YouTube Vision TV News, intitulé : « Ainsi les chefs de la Révolution se sont partagés l’argent du FLN ».
D’après le ministère public, l’entretien contient des “informations fausses, erronées ou attentatoires”, mettant en cause plusieurs figures de la Révolution de Novembre. Le journaliste y affirme que des dirigeants du FLN auraient, durant la guerre de libération, détourné des fonds du mouvement en les déposant sur des comptes personnels — des propos qualifiés d’atteinte aux symboles de l’État et de la lutte de libération nationale.
La ministère des Moudjahidine, représenté par son conseiller juridique, s’est constitué partie civile aux côtés de la plaignante. Saad Bouakba est poursuivi pour injure et diffamation via l’utilisation de moyens électroniques à l’encontre de symboles de la Révolution, ainsi que pour diffusion volontaire de fausses informations auprès du public.
Le gestionnaire de la web TV Vision TV News, Abderrahim Harraoui, est également poursuivi pour injure et diffamation, mais le juge a décidé de le laisser en liberté provisoire.
À l’issue de la procédure de comparution immédiate, le dossier a été transmis à la section correctionnelle. Le journaliste, âgé de 79 ans, attendra son procès en détention provisoire, dans un dossier qui relance le débat sensible sur la gestion de la mémoire historique et les limites de la parole publique dans l’Algérie contemporaine.
L’affaire du journaliste Bouakba renseigne sur les limites, voire le refus, de tout débat contradictoire en Algérie.
Samia Naït Iqbal


