Le remaniement ministériel annoncé par la présidence de la République s’apparente moins à une rupture qu’à un réagencement interne. Un non-événement en clair. Gageons que Sifi Ghrieb reconduira le même échec que ses prédécesseurs.
À l’examen de la nouvelle équipe, la continuité l’emporte : la plupart des ministres reconduits ne font que permuter leurs portefeuilles, confirmant l’impression d’un « jeu de chaises musicales».
Le général d’armée Saïd Chanegriha conserve son rôle de ministre délégué auprès du ministre de la Défense nationale. Inamovible et indéboulonnable donc malgré son grand âge.
En dépit de ses échecs patents, Ahmed Attaf, que la rumeur disait sur le départ, demeure solidement installé aux Affaires étrangères. Même tarif pour Kamel Rezig, malgré les controverses entourant sa gestion du commerce extérieur. Protégé de Tebboune, il garde son poste en incompétence notoire.
Mohamed Arkab reste dans la hiérarchie protocolaire et garde son poste de ministre d’État chargé du secteur de l’énergie et des mines.
La véritable surprise vient de la promotion de Saïd Saâyoud, réputé lui aussi proche d’Abdelmadjid Tebboune. L’ancien ministre des Transports hérite de l’Intérieur et des Collectivités locales, malgré un bilan mitigé marqué, entre autres, par la catastrophe d’Oued El Harrach.
À l’inverse, Brahim Merad, devenu ministre d’État, gagne en rang protocolaire mais perd la visibilité médiatique que procure le très stratégique ministère de l’Intérieur, qu’il cède à Saâyoud.
Dans les secteurs de l’éducation, le chef de l’État reconduit ses choix : Mohamed Sghir Saadaoui, malgré la polémique sur un régionalisme à peine voilé, conserve l’Éducation nationale, et Kamel Baddari reste à l’Enseignement supérieur.
Le Pr Mohamed Seddik Ait Mesdaoudene, chef de service de cardiologie au CHU Mustapha d’Alger fait son entrée au gouvernement et occupe le ministère de la Santé et de la population à la place de Abdelhak Saihi qui devient Ministre du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale.
Le départ de Youcef Cherfa de l’Agriculture, remplacé par le jeune Yacine El Mahdi Walid, risque d’alimenter de nombreux commentaires.
Cette éviction prend des allures de coup monté, après les critiques — sans le nommer — d’Abdelkader Bengrina, qui se vante d’être écouté et bien en cour auprès du chef de l’Etat, de vantant d’avoir adressé à plusieurs reprises des rapports défavorables sur divers ministres, walis ou responsables.
Ce rôle officieux de « délateur assumé » auprès de Tebboune lui vaut, chez certains observateurs, la métaphore de « l’œil de Moscou » du chef de l’État.
Parmi les autres mouvements remarqués, l’ancien ministre des Moudjahidine et des Ayants droit. Laid Rbiga cède sa place à Abdelmalek Tacherift qui vient du monde de la recherche spécialisé dans l’urbanisme et les questions de l’agriculture. Il était jusque-là membre du Conseil de la nation.
Amal Abdelatif, qui occupait les fonctions de Directrice générale des Impôts fait son entrée au gouvernement en héritant du portefeuille du Commerce intérieur, succédant à l’ex-chef du RND Tayeb Zitouni. Il restera à voir, dans les prochains jours, si l’appartenance partisane de ce dernier a pesé dans sa mise à l’écart.
Le tonitruant ex-ministre de la Communication Mohamed Meziane, malgré un engagement entier et partisan souvent jugé obséquieux, est écarté au profit du conseiller présidentiel Zouhir Bouamama.
Le ministre de la Culture, Zohir Bellalou débarqué après 10 mois seulement à son poste et remplacé par une revenante, Malika Bendouda. Une revenante qui a été limogée pour ensuite revenir comme si de rien n’était. Tout le système de non-gouvernance de Tebboune est dans ce recyclage rance et permanent de ses amis et copains.
Enfin, singularité notable : Mohamed Abdelnour Rabhi, wali d’Alger, devient ministre tout en conservant son poste de wali. Une configuration qui évoque, pour certains observateurs, une version revisitée de l’ancien « Grand Gouvernorat d’Alger ».
Au total, ce remaniement confirme la volonté de Tebboune de maintenir un équilibre politique plus qu’il n’inaugure une ère de réforme, renforçant l’impression d’une simple redistribution des rôles au sein d’un cercle déjà connu.
La rédaction