Face au brouillard institutionnel et à la dérive autoritaire en Algérie, la parole de Saïd Sadi, lucide et méthodique, dérange. Parce qu’elle nomme les choses, elle est ciblée. Parce qu’elle éclaire, elle est salie. Il est urgent de rappeler que ceux qui dénoncent l’oppression ne sont pas les ennemis du peuple, mais ses ultimes défenseurs.

Il y a des moments dans l’histoire d’un pays où dire la vérité devient un acte de dissidence. Et des voix qui, en osant le faire, réveillent autant qu’elles dérangent. La prise de parole récente de Saïd Sadi appartient à cette catégorie. D’une rigueur irréfutable, d’une hauteur de vue rare, elle n’avait d’autre but que de lever le voile sur les logiques mortifères à l’œuvre dans l’Algérie d’aujourd’hui.

Le constat est limpide : l’État algérien a cessé de penser en tant que tel. Il fonctionne désormais à l’instinct de conservation, aux alliances contre nature, à l’obsession sécuritaire. La diplomatie est pilotée non par une vision, mais par une mécanique d’improvisation confuse dictée par des services plus soucieux de contrôle intérieur que d’intérêt national.

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Saïd Sadi l’a dit avec précision : ce pouvoir a pactisé avec les forces obscurantistes, islamistes et réactionnaires, qu’il prétendait jadis combattre. Et ces forces, visibles ou occultes, ont su instrumentaliser la naïveté ou le cynisme d’une certaine intelligentsia fatiguée, parfois complice, souvent désarmée.

Mais ce n’est pas cette vérité nue qui scandalise. Ce qui dérange, ce n’est pas le contenu — c’est le fait même qu’un homme ose encore parler avec netteté dans un espace politique déserté par l’analyse. Les réactions furent à la hauteur de cette panique : injures, procès en légitimité, attaques personnelles. Comme si le fait de vivre hors du pays vous interdisait d’aimer, de comprendre, de vous inquiéter.

Ce rejet de la diaspora — si vieille, si tenace — en dit long sur la crainte qu’elle inspire. Car elle est porteuse d’un autre imaginaire, d’un autre langage politique, d’une autre exigence. Refuser qu’elle parle, c’est vouloir maintenir le pays sous cloche, entre les mains d’une caste persuadée que le peuple doit rester mineur à perpétuité.

Et que dire de cette Kabylie stigmatisée une fois encore ? Prise comme bouc émissaire pour masquer les échecs structurels d’un régime qui n’a plus rien à offrir. La désigner comme déviante, c’est diviser pour mieux régner. Mais c’est surtout fracturer l’unité nationale, au nom d’un pouvoir qui ne vit plus que de son propre maintien.

Il faut écouter Saïd Sadi. Pas par fidélité à un nom ou à un parcours, mais parce que son propos sonne juste. Parce qu’il exprime ce que des millions d’Algériens pensent, sentent, redoutent, sans toujours trouver les mots. Parce qu’il montre que l’on peut encore s’exprimer sans haine, sans slogan, sans instrumentalisation.

Ceux qui aujourd’hui le prennent pour cible ne défendent pas l’Algérie : ils défendent leur rente, leur confort, leurs petits privilèges. Ils ne craignent pas le mensonge : ils craignent la clarté. Et c’est pour cela que parler est devenu, en Algérie, un acte politique. Un acte de courage.

Face à cela, nous avons le devoir de rester debout, de refuser le silence complice, d’honorer les voix qui refusent l’effacement. Car c’est d’elles, et seulement d’elles, que pourra naître un avenir possible.

Kamel Bencheikh

5 Commentaires

  1. Le RCD cohabitait avec ce régime pendant que la charia était déjà la source juridique. Comment peut-on se redire démocrate quand le tryptique avait élevé l’islam à constante, c’est-à-dire musulman d’office : où serait la différence avec l’idée sociétale du régime. C’est cette dérive au niveau politique qui plongera le pays dans l’appendice de la Oumma dont les effets en aval actuels sont dans l’ordre du vécu ordinaire.
    Il n’y a jamais eu d’effort de rupture, si les démocrates n’avaient pas adhéré à la vision globale, ni le mouvement citoyens ni le mak ne seraient jamais nés. Du coup, ils, les « deux partis laïcs », n’ont pas rendu service au pays en faisant des compromis sur les principes, voilà la cause du renforcement du régime.

  2. Attendre 5 ans pour dénoncer l »emprisonnement massive pour délit d’opinion!
    Le discours est beau, bien construit, du beau français, de belles phrases, mais M. Bencheikh, pourquoi ne pas faire un résumé, une synthèse de son discours. Moi, je sais pourquoi. Parce qu’il n’y a à rapporter, c’est de la bonne rhétorique démagogique. C’est la clarté de la démagogie démocratique. Je vous mets au défi de nous rapporter ce discours est différents des discours dèmagoguques du caciques du régimes.

    • Et a qui s’adresse-t-il? A ceux qui sont painards, c.a.d. suffisemment lucides pour analyser, a un certain moment, leur situation labas et biensur la changer. Ils n’ont pas change’ de vocabulaire ou language seulement… Ils ont change’ de langue. Et c’est la langue qui porte les ideologies, projets… visions.

      Personnellement, je n’ai pas de probleme avec les delits d’opinion. Il faut en executer les chatiments prescrits pour. Et a mes yeux et opinion, c’est tout ce bled qui est a executer, c.a.d. a dissoudre. Il ne tient que sur les militaires et c’est ce qu’il faut detruire… C’est au-dessus de mon grade, alors j’attends qu’il aient chille’ suffisemment sur le monde dans l’espoir d’une reaction.

      En effet les discours et poemes se doivent d’etre ecrits dans le language des concerne’s, du Khrabien !

  3. C’est le moment d’exposer la racine des problemes migratoires dont le monde occidental en particulier souffre…et des miseres que celle-ci(migration anarchique) genere… misere sur les migrants comme ceux qui les recoivent. Et cela ne se fera pas a coups de ventes dedicace’es de papier avec des histoires, vocabulaire et language clairement destine’s a macron et Co. Et biensur paye’s en ZEUROS !

    Voila l’interet que porte et le regime et ses antennes envers les EXILE’S, volontaires en general… labelise’s « Diaspora ».

  4. Le RCD et ses présidents, c’est à l’image de l’Algérie: ça ne fait pas de bilan.
    Dès lors, M. Saadi est celui qui a émis la critique de ce qui était en grande partie à l’origine du désastre : l’école.
    Pour autant c’est le même personnage qui a soutenu les mêmes généraux initiateurs de cette même école. Celle-ci continuait ses ravages l’orsqu’il a pris parti pour les généraux en 91.
    Non pas qu’il fallait ne rien faire ou, pire, se mettre du côté fous de dieu, non. Tout ce que nous voulions en tant que Kabyles est que les deux partis s’en remettent aux prérogatives de leurs mandats : représenter les intérêts des électeurs kabyles. Qu’avions-nous a faire avec l’un ou l’autre des deux belligérants ? La réalité est que depuis un siècle, nos élites kabyles ne le sont que par le fait d’être d’extraction kabyle. Et c’est là que la lucidité devait s’opérer.
    M. Saadi est aussi de ceux qui, en tout cas par le biais de gens de son parti et Seb la presse amie, calomniaient l’opposition de l’étranger. Ironie du sort, voilà que, le temps passant, il subit lui même (d’après vous) la même calomnie. Sans bilan donc on peut se retrouver à faire la chose et faire son contraire le lendemain et se représenter devant les gens le surlendemain pour nier tout.
    On ne va pas s’attarder sur le dommage irréparable causé au MCB par la prétention de son parti à reprendre le flambeau du mouvement. Tenter de récupérer un mouvement autogéré, expression directe de la société par un nouvel appareil affiliée aux règles du très démocratique état algérien, c’est le pervertir simplement. Le pouvoir algérien n’aurait pas fait mieux avec ses services et sa police gendarmerie et même son école.
    Voilà, donc, passer à autre chose sans regarder ce qui a peut être mal tourné ne peut pas être effacé par de beaux discours.

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