28 mars 2024
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Solécisme et jeu de mots de Noureddine Boukrouh

DEBAT

Solécisme et jeu de mots de Noureddine Boukrouh

« Les intuitions ne peuvent être blâmées par leur façon d’opérer, mais ce serait de leur demander une dichotomie générale entre vérités analytiques qui seraient de sous-produits du langage et des vérités synthétiques qui seraient des reportages sur le monde ». Le mot et le chose de W. V Orman Quine 

Dans un de ses derniers papiers publiés dans le Matin d’Algérie, un homme politique algérien nous gratifie d’un superlatif désigné sous le terme Tgarmit. Noureddine Boukrouh en voulant représenter un phénomène bureaucratique vieux comme le monde se croit inventer un concept politique. Or ce qu’il croit être un fait d’une importance capitale n’est en définitive que la dislocation du clan de l’ancien chef d’état-major de l’armée algérien.

D’ailleurs après avoir fait fi des règles élémentaires de la langue, il reconnaît lui-même la lutte des clans qui sévit en Algérie actuellement. Alors se pose la question de savoir pourquoi, Noureddine Boukrouh s’aventure dans le domaine de la complexité de la langue ?

Certainement, nous ne pouvons pas y répondre parce que les éléments constitutifs du prénom Garmit nous échappent. Comme nous ne connaissons pas l’origine  du lieu de naissance de l’officier B. Garmit, nous avons essayé de rechercher au moins deux choses essentielles à la formation des noms; l’étymologie et la grammaire de la darija.

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Il se trouve que le trilitère GRM est répandu dans la langue amazighe et qu’il s’accorde probablement avec le verbe arabe « G’RaMa », mais là n’est pas le problème parce que tous les langues empruntent les unes aux autres langues.

En effet, la suffisance affichée par l’homme politique pour croire à la conceptualité d’une simple défection d’une personne d’un clan par l’ajout d’un préfixe. Or, la préfixation d’un prénom n’est pas suffisante pour élaborer un concept représentatif d’une situation générale. Du coup, le sens qu’a voulu donné N. Boukrouh à Tgarmit comme « mot et chose » se heurte à la simple logique de la langue amazighe.

Habituellement, la préfixation et la suffixation en « t » sont la féminisation d’un mot en conformité avec les règles grammaticales de la langue.(1) L’aversion française sous la forme de Garmatisme est aussi un autre genre lexical qui se limite à un pur jeu de mot sans conséquence sur la langue française.

A contrario, il serait heureux pour que les académiciens français l’acceptent comme néologisme et 
l’intègrent dans le Larousse. Inconsciemment,l’auteur soléciste tente d’introduire dans le champ lexical de la darija toute une gamme de superlatifs sans qu’il connaisse réellement la naturalité de la langue qu’il parle.

Le plus surprenant dans tous ça c’est que le mot « Tgarmit » n’a ni sexe ni genre et de plus sa substantialisation nécessite une adéquation phénomènologique du signifiant au signifié. Or dans les règles d’usage de la darija et de la tamazight, il ne semble pas que le mot et ses dérivés respectent  pleinement les accords de l’interlocution.

Certes, la naturalité de la langue provient de la spontanéité des locuteurs qui reproduisent automatiquement à l’infini les règles grammaticales mais il se trouve que la formation du mot Tgarmit ne prend pas en compte suffisamment les principes logiques qui préexistent à l’énonciation. Noureddine Boukrouh qui ne fait pas attention à la règle élémentaire de la féminisation du nom en berbère, perpétue inconsciemment la logique du contact des langues.

A moins qu’il ne soit qu’un  rejeton phonologique d’un jeu de mots, il y aurait à voir du côté de la dialectologie de la darija si le mot a un sens. Hélas! cette vieille tradition de l’étude des langues a 
été marginalisée dans les universités algériennes.

Et pourtant, elle est fort utile pour comprendre comment s’est formée la darija qui n’est que le résultat du contact cumulatif de l’arabe et de la tamazight. Et si Noureddine Boukrouh et ces millions de Maghrébins arabophones pensent en berbère sans le savoir.

A. Hamitouche

1- A. Mettouchi, Le « t » n’est-il qu’une marque de féminin en berbère? Faits de langues, La catégorisation dans les langues, no 14, 1999.  

Auteur
Fatah Hamitouche

 




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