25 avril 2024
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Soudan : un cessez-le-feu armé après 400 morts

L’armée soudanaise a annoncé vendredi soir un cessez-le-feu, après une nouvelle journée de violents combats opposant ses soldats aux paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) et de multiples appels au calme, au premier jour de l’Aïd el-Fitr marquant la fin du ramadan. 

La désescalade est fragile. Les combats ont déjà fait plus de 400 morts, selon les dernières et rares informations qui sortent de la capitale soudanaise. En soirée, des témoins dans différents quartiers de la capitale Khartoum ont indiqué ne plus entendre le bruit d’explosions, après l’annonce par l’armée d’un cessez-le-feu de trois jours.

Les FSR, qui avaient annoncé une trêve le matin ne se sont pas prononcés sur l’annonce de l’armée. Déclenchés le 15 avril, les combats ont fait 413 morts et 3.551 blessés, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

De nouveaux hôpitaux ont été fortement endommagés à Khartoum, et quatre établissements ont été touchés à al-Obeid, à 350 km au sud de la capitale, soulignait dans la journée le syndicat des médecins: au total « 70% des hôpitaux en zone de combat sont hors service ».

Pour porter assistance aux civils, le Comité international de la Croix-Rouge réclamait elle un « accès humanitaire immédiat et sans entraves (…) une obligation au regard du droit international humanitaire ».

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Depuis six jours des combats opposent à Khartoum et au Darfour (ouest) principalement, l’armée sous le commandement du général Abdel Fattah al-Burhane , chef de facto du Soudan depuis le putsch de 2021, aux FRS que dirige le général Mohamed Hamdane Daglo.

Longtemps latent et cantonné aux négociations sur les conditions d’intégration des FSR aux troupes régulières, pour finaliser un accord politique sur le retour des civils au pouvoir, le conflit entre les deux camps s’est transformé en lutte armée.

Au Darfour, l’une des régions les plus pauvres du Soudan, « la situation est catastrophique », raconte un docteur de Médecins sans frontières (MSF).

« Patients à même le sol »

« Il y a tellement de patients qu’ils sont soignés à même le sol dans les couloirs parce qu’il n’y a tout simplement pas assez de lits », dit-il depuis cette région où les miliciens Janjawids, le gros des FSR, ont commis d’atroces exactions lors de la guerre déclenchée en 2003 par le dictateur Omar el-Béchir, déchu en 2019.

L’armée de l’air, qui vise les FSR disséminées dans les zones résidentielles, n’hésite pas à larguer des bombes. Dans ce chaos, « 70% des 74 hôpitaux de Khartoum et des zones touchées par les combats ont été mis hors d’usage », rapporte le syndicat des médecins.

Les consultations diplomatiques, elles, s’intensifient: le ministre britannique des Affaires étrangères, James Cleverly, a écourté une tournée en Asie-Pacifique « à cause de la situation au Soudan ».

Jeudi, le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, et le secrétaire d’Etat américain, Antony Blinken, avaient appelé à un cessez-le-feu durant « au moins » les trois jours de l’Aïd.

Mais regrette Sami al-Nour, un habitant de Khartoum, « on passe l’Aïd avec en fond sonore le bruit des tirs et l’odeur de la mort à la place des gâteaux, des enfants heureux et du bon temps en famille ».  Pour Ibrahim Awad, un autre habitant de la capitale, « la situation était inévitable: un pays avec deux dirigeants et deux armées ne peut pas aller de l’avant ».

Le général Daglo était depuis le putsch d’octobre 2021 le numéro deux du général Burhane. Ce dernier est apparu jeudi pour la première fois depuis le début des hostilités à la télévision d’Etat.

« Pour l’Aïd, notre pays saigne: la destruction, la désolation et le bruit des balles ont pris le pas sur la joie », a-t-il déclaré. Jusqu’ici, comme son rival, le général Daglo, il n’avait parlé qu’à des médias et ne s’était pas adressé directement aux 45 millions de Soudanais.

Cadavres sur les routes

De leur côté, les Etats-Unis, ont annoncé l’envoi de militaires dans la région pour faciliter une éventuelle évacuation de leurs ambassades et ressortissants ; la Corée du Sud et le Japon vont eux envoyer des avions alors que l’aéroport est fermé depuis samedi. L’Union européenne envisage pour sa part une évacuation dès que possible par voie terrestre.

Femmes et enfants essentiellement se pressent sur les routes pour fuir, entre points de contrôles et cadavres.

Depuis le début des hostilités, 10.000 à 20.000 personnes, surtout des femmes et des enfants, sont passés au Tchad voisin, selon l’ONU.

Les humanitaires ont pour la plupart été forcés de suspendre leur aide après que trois employés du Programme alimentaire mondial (PAM) ont été tués.

Fuite vers le Tchad

Dix à vingt mille réfugiés soudanais fuyant les combats ont déjà traversé vers le Tchad et leur nombre croît de jour en jour. Les humanitaires sont à pied d’œuvre pour préparer un afflux massif de réfugiés, mais les répercussions du conflit soudanais dans l’est du Tchad sont aussi économiques et sécuritaires.

À Koufroun, dans l’extrême est du Tchad, la frontière avec le Soudan se matérialise par un ouadi, une bande de terre sablonneuse formée par une rivière asséchée. Juchés sur des pick-up, des militaires tchadiens, fusils d’assaut en bandoulière, scrutent l’horizon. Quelques ombres traversent, transportant à dos d’âne de maigres provisions. « La frontière est fermée au transport de marchandises, mais on ne peut pas refouler ces personnes en danger », explique le lieutenant-colonel Ali Mahamat Sebey, préfet du département d’Assoungha.

« En face, c’est le Darfour. À 200 mètres se trouve la ville de Tendelti. Environ 80% de ses 32 000 habitants ont traversé la frontière après que l’armée soudanaise a déserté la localité », poursuit le jeune fonctionnaire. D’autres ont fui les attaques des milices, les pillages ou l’incendie de leur village.

Côté tchadien, les réfugiés s’abritent comme ils peuvent sous quelques arbres secs et dépourvus de feuillage. Derrière une toile à moitié déchirée, une jeune femme vient d’accoucher de jumeaux. Ici, on manque de tout. En cette période de ramadan, le jeûne n’est plus volontaire. « Nous assurons leur sécurité. Maintenant, c’est aux humanitaires de prendre le relai », indique le préfet.

Avec AFP/RFI

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