Beaucoup de choses se disent, beaucoup d’éloges circulent sur le nouveau stade de Tizi Ouzou. Et pourtant, c’est en le vivant de l’intérieur que l’on mesure vraiment ce qui fonctionne… et ce qui reste à améliorer.
Cet été, j’étais accompagné de mon ami Nadir et de mes deux petits neveux pour assister au derby JSK – OA, lorsque j’ai réalisé à quel point la réalité est plus complexe que les images partagées sur les réseaux sociaux — et ma déception fut totale.
Le stade, il faut le reconnaître, est une prouesse architecturale. Par son design, sa structure et ses installations, il n’a rien à envier aux grandes enceintes sportives d’Europe ou d’Amérique. En tant qu’ancien cadre de la jeunesse et des sports, j’ai visité de nombreux stades à travers le monde, et je peux l’affirmer : celui de Tizi Ouzou figure parmi les plus beaux.
Mais si la forme impressionne, le fond reste perfectible. La réussite d’un grand stade ne repose pas uniquement sur la beauté du bâtiment, mais aussi sur la qualité de l’organisation : l’accueil, la gestion des flux, la sécurité, la fluidité et surtout le comportement du public.
Oui, certes : si l’on compare l’organisation du stade de Tizi Ouzou avec celle des autres stades du pays, nous sommes clairement au-dessus du lot. Sur ce point, il faut être juste.
Mais comparé aux standards internationaux, nous en sommes encore très, très loin.
Ce jour-là, j’ai vu des milliers de spectateurs avancer avec une simple feuille A4 en guise de billet d’accès : un système archaïque, fragile, indigne d’une enceinte aussi moderne. Et au passage aux portiques, nous étions poussés, compressés, entassés comme du bétail, sans signalétique claire ni gestion maîtrisée des flux.
Comment peut-on construire un stade d’envergure internationale tout en conservant des pratiques d’un autre âge à l’entrée ?
L’ambiance, elle, reste extraordinaire : ferveur, passion, intensité. Les supporters vivent le football comme un acte d’identité. Mais cette énergie est trop souvent entachée par des comportements inciviques : insultes, vulgarité, agressivité, jets de bouteilles d’eau… autant d’attitudes qui n’ont rien à voir avec le sport que nous voulons transmettre aux jeunes.
Et puis, comment ne pas évoquer la présence remarquable de la gente féminine, de plus en plus nombreuse dans les tribunes ? Cela m’a fait une immense joie : voir des femmes, des jeunes filles, des familles entières partager la passion du football est un signe encourageant d’ouverture et de modernité.
Dommage… car l’ambiance parfois vulgaire et les insultes répétées gâchent cette avancée, au point de rendre ce moment parfois inconfortable pour celles qui n’aspirent qu’à vivre un match dans la sérénité.
Lors du même match, après que Nadir eut rappelé calmement à un jeune supporter que les insultes et les gros mots n’étaient pas nécessaires, celui-ci lui a répondu :
« On est au stade, non ? »
Et permettez-moi d’ajouter une chose : avant de baptiser ce stade du nom de Hocine Aït Ahmed, certains auraient dû réfléchir à ce que cela implique réellement. Associer le nom d’un homme connu pour son sens de la dignité, de la retenue et du débat civilisé à une enceinte où résonnent grossièretés, insultes et comportements indignes… il y a, quelque part, une profonde incohérence.
Un stade qui porte le nom de Hocine Aït Ahmed mérite mieux que des vulgarités. Il mérite un climat de respect, de civisme et de responsabilité. Autrement, ce n’est pas la mémoire du défunt que l’on honore, mais que l’on trahit.
Cette phrase du jeune résume tout. Comme si le stade devenait un espace d’impunité. Comme si la passion justifiait l’irrespect. Comme si la ferveur effaçait les règles élémentaires du vivre-ensemble.
Et malgré cette déception, je veux adresser un mot d’encouragement à mes anciens collègues et à leurs responsables, aujourd’hui en charge de la gestion du stade. Ils ont entre les mains un outil exceptionnel, et je suis convaincu qu’avec plus d’investissement, d’invention et de créativité, ils peuvent en faire un véritable modèle national.
À ce titre, je me permets une proposition simple : organiser des journées de sensibilisation dans les maisons de jeunes, les lycées et les universités, afin d’éduquer les futurs supporters au respect, au civisme et à la culture sportive — si ce n’est déjà fait, ce que j’ose espérer.
Car un public mieux formé, c’est un stade plus sûr, plus convivial et plus digne du nom qu’il porte.
Un stade est un lieu de joie, pas un défouloir. Il est un espace de communion, pas de dérive. Il est un symbole de modernité, pas un théâtre d’incivilités.
Le stade de Tizi Ouzou a tout pour devenir une référence nationale – et même internationale – mais cela exige un investissement réel dans la culture du civisme, la professionnalisation de l’accueil, la modernisation des accès et une gestion digne des grandes arènes sportives.
Car au-delà de l’architecture et de la technologie, ce qui fera la grandeur de cette enceinte, ce n’est pas seulement le béton ou le design.
C’est la qualité de l’expérience humaine qu’elle offrira.
Aziz Slimani


Cher Aziz, vous venez de signer un très bel article, écrit avec une élégance rare, qui met en lumière le magnifique stade Hocine Aït Ahmed — cette prouesse architecturale qui s’élève aujourd’hui comme l’un des plus beaux monuments sportifs du pays. Vous en parlez avec une sensibilité qui dépasse la simple admiration pour le béton ou les courbes : vous rappelez qu’un tel édifice n’atteint sa véritable grandeur que lorsqu’il est accompagné d’un civisme à sa hauteur.
Votre texte respire cette nuance intelligente : célébrer la beauté du lieu sans ignorer les défis qui l’entourent. Vous dites, avec une retenue très juste, que la perfection d’un stade comme Hocine Aït Ahmed n’a de sens que si nous, citoyens, savons en être dignes — par l’éducation, la discipline collective, et ce respect silencieux qui fait les grandes nations.
Merci pour cette note d’espoir et de lucidité. Dans un débat souvent agité, vous apportez de la profondeur, de la mesure et cette délicatesse critique qui illumine plus qu’elle ne juge. Votre regard donne envie de croire que ce joyau de Tizi-Ouzou n’est pas seulement un stade, mais le début d’un chemin — celui d’une société qui apprend à aimer ce qu’elle construit.
Monsieur @Aziz Slimani auteur de l’article, vous avez tout bien décrit , tout bien observé, c’est bien , mais pour moi vous avez oublié une chose essentielle. Dans l’enceinte du stade , vous n’avez même pas remarqué que toutes les pancartes de direction, de position, d’indication sont transcrites uniquement en langue arabe (bien sûr , la langue d’Allah) et en langue anglaise. Aucune odeur de Tamazight alors que cette langue est d’après la Constitution soi- disant ….. langue nationale ET officielle.
Personne ne s’est révolté contre cette omission , cette grave anomalie , cette grave insulte et à deux pas du Djurdjura , de Lalla Khedidja. Ni les Tizi Ouziens, ni l’APC ffs , ni les supporteurs de la JSK, ni ses dirigeants n’ont osé s’indigner, ou même simplement relever cette grave méprise délibérée de la part du pouvoir. Alors n’en parlant pas de l’interdiction catégorique d’oser arborera l’emblème berbère amazigh sous peine d’être conduit sur le champ en prison et sans jugement. y’a dine ezzah . Personne n’a voulu entendre la colère de Ait Ahmed depuis sa tombe qui criait son refus qu’on donne son nom au stade , surtout qu’il a constaté que dans cette enceinte , le pouvoir a voulu humilier et mépriser le peuple Kabyle en refusant l’utilisation de langue berbère kabyle amazigh. Il a voulu lancer le message au peuple kabyle qu’il est chez lui; que c’est son fief , que c’est lui qui fait ce qu’il veut, ce que bon lui semble …..même au cœur de la Kabylie . Eh oui..