Il y a souvent des situations insolites dans ce pays militarisé. Abdelmadjid Tebboune vient de nommer le général-major Saïd Chanegriha au gouvernement.
En plus il s’agit d’un ministre délégué auprès du président de la république. En résumé, le grand patron de l’Algérie est sous tutelle d’un homme de statut subalterne dont la carrière fut surtout dans des ministères aux choux farcis (l’expression est connue lorsqu’il s’agit de qualifier les secrétaires d’Etat et ministres avec une importance bien marginale politiquement).
Si le petit stagiaire d’antan a semblé être finalement le grand timonier du régime crypto-civil, il reste encore loin de la caste régnante. Son pedigree est bien modeste et les fils de la marionnette sont manipulés par les vrais patrons de l’Algérie. Le tout puissant patron du clan au pouvoir est pour le moment le vénérable Saïd Chanegriha (79 ans). Rien que ça !
Qu’a-t-il pris au président de nommer un puissant général-major dans un poste faussement sous ses ordres ? La décision a été annoncée par la presse comme une volonté de montrer l’union entre les militaires et le civil. En langage politique algérien, on nomme cela un lien de subordination dans le couple.
Dans un moment de durcissement du président dans les actions violentes contre toute velléité de liberté d’opinion, il fallait lui rappeler la charte du pouvoir militaire. Elle est dans le sens « Mon petit gars, on t’a nommé Prince, tu fais bien ton job de soumission du peuple mais attention de ne pas trop en faire et de penser qu’on va te laisser aller plus loin et que le pouvoir ne te monte pas à la tête ».
Le généralissime Saïd Chanegriha aura l’unique mission de proposer une gestion d’état-major. Que veut dire cela ?
C’est simple, les destinataires des circulaires ministérielles ont intérêt à exécuter les ordres sans même les lire et sans bouger une seule oreille. Une page blanche avec seulement une signature suffirait à leur dire ce qu’il faut exécuter sans même qu’ils en comprennent le sens.
Tebboune continuera à faire le paon dans ses apparitions publiques avec le tintamarre des tambours et drapeaux au vent. Mais un petit gars, accoutré en une tenue bardée d’une quincaillerie fixée sur le torse, les épaules et le képi sera toujours derrière pour le surveiller d’un œil.
Les Algériens savent que le regard est inévitablement aveuglé par cette quincaillerie qui brille au soleil.
Une lumière qui fait de l’ombre au président potiche.
Boumediene Sid Lakhdar