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 Tebboune et le pari russe

Tebboune et Poutine
Tebboune et Poutine

Tebboune va-t-il changer l’axe diplomatique de l’Etat algérien? Il est étonnant d’entendre de la part d’un président d’un pays souverain dont l’indépendance fut chèrement acquise contre la cinquième puissance mondiale, soutenue par l’Otan et les Américains, un discours assez terne et proche de la compassion envers Poutine.

Dans le discours du forum économique international (SPIEF) de Saint-Pétersbourg du 16 juin dernier, Tebboune a lancé vers son homologue russe une phrase quasiment hors-contexte et lourde de conséquences : « Poutine est un ami de l’humanité ». Personne ne sait pourquoi le locataire du palais d’El-Mouradia s’est aventuré sur ce terrain miné, sans qu’il ne mesure l’impact d’un tel propos pour un pays méditerranéen, dont les voisins proches sont en guerre ouverte contre Poutine?

De surcroît, l’Algérie a-t-elle un poids aussi stratégique pour se poser en « force opposante » à l’Otan dont la France, son principal partenaire économique, est membre? On comprend bien qu’en apparence Tebboune voulait, peut-être, mettre en avant une dynamique promotionnelle pour l’intégration de l’Algérie au BRICS, mais la célérité d’une telle déclaration dans un contexte de guerre russo-ukrainienne ouverte, laquelle accouchera d’un gros problème, jette de l’inquiétude.

La « Nouvelle Algérie », n’est-elle pas en train de chercher en la Russie, une puissance protectrice et tutelle de son virage autoritaire? Autrement dit, l’Algérie n’est-elle pas en quête d’un rôle-vassal, pour se protéger des incursions médiatiques, politiques et « droits-de l’hommistes » des Européens? Redéfinir une politique diplomatique au détour d’une petite phrase est aussi dangereux que de déclarer la guerre aux Etats-Unis. Puis, on ne saura jamais comment l’Algérie va-t-elle rectifier le tir vis-à-vis des Européens? La vapeur est à chaud et un rien peut mener à l’irréparable.

La dernière visite du travail du ministre des affaires étrangères Ahmed Attaf en Allemagne y changerait-elle quelque chose ? Peu probable! Attaf qui avait « zappé » l’escale parisienne dans son dernier périple européen n’a fait, à vrai dire, qu’enfoncer le clou et creuser le différend avec la France macronienne.

En tout cas, contrairement à ce qui a été ressassé ça et là, l’échec diplomatique algérien est patent, dans le recherche de l’équilibre entre la Russie, allié stratégique de longue date et les pays européens avec leur allié américain dont l’influence sur sa politique extérieure ne cesse de s’affirmer ces dernières années.

La récente réinsertion d’un couplet anti-français de l’hymne national par décret présidentiel  ne dénote-t-elle pas d’une volonté de rompre avec le pacte franco-algérien, communément appelé « françalgérie »?

Difficile d’avancer quoi que ce soit sur ce sujet-là, d’autant que, comme tout le monde le sait, les relations entre la France et l’Algérie sont si compliquées et si complexes qu’il serait hasardeux d’en prévoir l’évolution…

Kamal Guerroua

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