La scène politique tunisienne a été profondément secouée mardi 2 décembre 2025, après l’arrestation à son domicile de l’avocat et opposant Ayachi Hammami.
La police est intervenue pour exécuter une peine définitive de cinq ans de prison à l’encontre d’Ayachi Hammami, dans le cadre de ce que les autorités appellent « l’affaire de complot 1 ». Quelques instants après son arrestation, une vidéo enregistrée à l’avance a été publiée sur sa page officielle, dans laquelle Hammami annonce entrer en grève de la faim illimitée dès son placement en détention.
Dans ce message adressé à l’opinion publique, il dénonce un jugement « injuste » et « éminemment politique ». Selon lui, la condamnation pour « appartenance à une organisation terroriste » n’est rien d’autre qu’une décision dictée par le président Kaïs Saïed et son gouvernement. Hammami accuse le pouvoir de « traquer tous ceux qui s’opposent à la dérive autoritaire », affirmant que le chef de l’État, incapable de résoudre les crises structurelles du pays — santé, éducation, transport — se contente « d’étouffer les voix dissidentes en les accusant de trahison ». Il promet de transformer sa cellule en « espace de lutte » et assure qu’il ne suspendra sa grève de la faim qu’à sa libération.
L’indignation gagne les milieux politiques et droits humains
Il n’y a plus une semaine qui passe en Tunisie sans son lot d’arrestations de militants politiques, d’avocats ou d’attaques en règle contre les dernières poches de liberté. La Tunisie de Kaïs Saïed comme l’Algérie de Tebboune sont des prisons à ciel ouvert. Des tyrannie en construction. L’arrestation d’Ayachi Hammami a provoqué un raz-de-marée de réactions indignées dans le pays. Pour le politologue Tarek Kahlaoui, ce placement en détention constitue « un choc » et touche l’une des figures « les plus constantes et désintéressées de la lutte démocratique en Tunisie ». Selon lui, croire que l’on peut régler les problèmes du pays en emprisonnant ceux qui défendent l’action politique pacifique est « une grave erreur ».
L’avocat Sami Ben Ghazi a, pour sa part, salué la stature de Hammami, qu’il décrit comme « un chapitre entier de la résistance civile tunisienne ». À ses yeux، la détermination de l’opposant dépasse de très loin les murs d’une cellule : « Ceux qui pensent que la prison peut effacer l’empreinte de ceux qui ont bâti leur engagement sur le courage ne réalisent pas que ces hommes sont plus grands que les décisions tremblantes du pouvoir. »
Le militant des droits humains Ayoub Ammara a également réagi, dénonçant « l’arrestation d’une conscience libre ». Il rappelle que Hammami a toujours été « une voix ferme en faveur de la dignité, de la justice et de l’État de droit ». À l’adresse de l’opposant, il écrit : « Vous n’êtes pas seul. Nous continuerons le combat, nous porterons votre voix dans les rues et les places publiques jusqu’à ce que la liberté retrouve sa place. »
Cette arrestation intervient alors que la tension ne cesse de monter autour des jugements prononcés en appel dans le dossier dit « du complot », avec des peines allant de cinq à quarante-cinq ans de prison. Plusieurs ONG et formations politiques qualifient ces décisions de « sévères » et « profondément injustes ».
Mourad Benyahia

