Jeudi 3 septembre 2020
Vivre, c’est choisir et choisir c’est décider
Avec le pétrole, l’argent vous vient en dormant ; avec la dette, l’argent vous vient en rampant. Avec le travail, l’argent vous vient en suant…
Le boom pétrolier qu’a connu l’Algérie illustre parfaitement la cohabitation entre la permanence d’une misère morale endémique et l’existence de ressources financières abondantes. Le prix élevé du pétrole a structurellement pour effet pervers de perpétuer à l’infini le système mis en place. A cause du pétrole et du gaz, l’Amérique a perdu tout sens moral. Par la grâce du pétrole et du gaz, l’Algérie ne pense plus, elle dépense. Et elle dépense sans compter. Elle n’a point besoin d’économistes ; ceux sont des troubles fêtes ; elle préfère avoir affaire à de joyeux lurons.
Elle éprouve un désir viscéral d’amuser la galerie. D’ailleurs, la population n’en demande pas tant. L’argent coule à flots. Et que vive l’industrie de la rente ! Une industrie qui n’a pas besoin ni de stratégie, ni de séminaires, ni de discours, ne rencontrant ni de problèmes d’approvisionnement, ni de problèmes de débouchés. Elle tourne à plein rendement. Elle peut s’en passer de tout gouvernement et de tout parlement. Elle fonctionne toute seule et n’a de comptes à ne rendre à personne même pas à elle-même. Elle se passe royalement du travail productif et de l’intelligence créatrice des algériens. Une industrie qui berce d’illusions les uns, ceux du haut et nourrit le désespoir des autres, ceux du bas.
Enfin une industrie qui fonctionne de, par et pour l’étranger. Une rente que se disputent ou se partagent fiscalement les Etats consommateurs de pétrole afin de financer à bas prix leur démocratie envoûtante et les pays producteurs dans le but de pérenniser les régimes politiques obsolètes en place avec des coûts exorbitants. Evidemment la plus grande part revenant aux puissants locaux ou étrangers.
Les uns soutenant évidemment les autres et réciproquement. Une société qui ne se pense pas est une société qui se meurt lentement mais sûrement. La vie d’une nation cesse dit-on quand les rêve se transforment en regrets. Le pétrole a fait des institutions, pâles copies de celles de nos illustres maîtres à penser occidentaux, des coquilles vides pléthoriques et budgétivores, sans impact sur la société, destinées à camoufler la réalité au regard de l’étranger, mais personne n’est dupe. Le monde aujourd’hui ne croit plus au père Noël.
A la moindre baisse du prix du baril du pétrole, elles s’écroulent comme un château de cartes. Elles ne servent que de devanture au regard de l’opinion internationale. Les exportations hors hydrocarbures sont insignifiantes. Pourtant seul le travail peut s’opposer au pétrole. Or, il est marginal. Il représente moins de 2 % des exportations depuis plusieurs décennies. N’est-ce pas le signe évident de l’échec des politiques économiques dites publiques qui n’ont de publics que les fonds, menées à tambour battant par les élites qui se sont succédé et qui aujourd’hui se sont convertis dans l’opposition ou dans l’islamisme.
La démocratie est une vue de l’esprit dans une économie rentière dominée par la politique. Toute opposition politique qui s’appuie sur les forces laborieuses est vouée à l’échec. Le poids de l’inertie est prépondérant, les forces vives sont faibles. Le travail a perdu ses lettres de noblesse. Il s’incline devant le diktat du pétrole. C’est l’accès aux pétrodollars qui garantit la fortune. L’argent facile fascine.
Sur un autre registre, qui a intérêt à se passer de la poule aux œufs d’or ? Evidemment personne. Une baisse prolongée croissante du prix des hydrocarbures, des réserves ou des débouchés, serait-elle salvatrice ou mortelle pour le pays ? De quoi vivaient les autochtones avant la découverte du pétrole en 1956 par les français ?
L’Etat nation est un marché de dupe passé entre un pouvoir et une nation, à savoir pain contre liberté, sécurité contre obéissance, l’ordre contre l’anarchie, la reconnaissance externe contre la légitimité interne. Le concept de l’Etat providence est un subterfuge commode faisant croire à la population que la providence se trouve au sommet de l’Etat et non dans le sous-sol saharien. Un des critères qui permet de déterminer immédiatement si une nation appartient ou non au tiers monde, c’est la corruption.
Partout où les représentants de l’Etat, fonctionnaires ou politiques, du haut en bas de la hiérarchie sont corrompus et où cette pratique est quasiment officielle, nous sommes bien dans un pays du tiers monde. L’appartenance d’un peuple au tiers monde tient avant toute chose à son système politique. Le monde arabe est dominé par les pouvoirs autoritaires ou totalitaires, par des castes politiques qui manipulent les mots et les institutions. C’est pourquoi plus personne ne croit à présent au développement chacun constate quotidiennement la corruption du pouvoir politique.
Les gouvernements ont délibérément choisi la croissance économique à partir de l’accumulation des revenus pétroliers et gaziers ou à défaut de l’endettement gagé sur des réserves hypothétique plutôt que sur le développement et la mobilisation interne fondé sur la formation et l’emploi des hommes., l’Etat algérien a procédé à une vaste salarisation dont l’effet social global est la dépendance dans laquelle se trouve une part importante de la population active par rapport aux revenus distribués par l’Etat provenant des recettes d’exportation des hydrocarbures pour fidéliser une clientèle de plus en plus nombreuse et exigeante.
L’essentiel du jeu économique et sociopolitique consiste donc à capturer une part toujours plus importante de cette rente et à déterminer les groupes qui vont en bénéficier. Il donne à l’Etat les moyens d’une redistribution clientéliste. Il affranchit l’Etat de toute dépendance fiscale vis-à-vis de la population et permet à l’élite dirigeante de se dispenser de tout besoin de légitimation populaire. Elle dispose des capacités de retournement extraordinaire étouffant toute velléité de contestation de la société.
Le pétrole sera le moteur de la corruption dans les affaires et le carburant des violences sociales. Il a l’art de faire la guerre et d’initier la paix. Il est à la fois le feu et l’eau. Il agit tantôt en pyromane, tantôt en pompier. Il est une chose et son contraire ; la richesse et la pauvreté, les deux sont des illusions. E
t comme pour toute illusion, il y a un manipulateur.. Nous sommes nos propres fossoyeurs. Pour sortir du trou dans lequel nous nous enfonçons, chaque jour davantage, nous devons commencer par s’arrêter de creuser car la solution se trouve sur terre ferme et non au fond d’un trou. Pour ce faire, il suffit de relever la tête, se tenir droit, et se regarder les yeux dans les yeux, en toute humilité, sans peur et sans reproche. Il faut s’armer de science et avoir foi en dieu. La science est la clé de nos problèmes, la religion notre but ultime de notre éphémère existence. Nous sommes habités par des démons.
Le pétrole nous enivre, le gaz nous pollue, l’argent facile nous aveugle. C’est un argent sale. Un argent qui tue, qui corrompt, qui pourrit, qui détruit y compris les consciences. Ce sont les pétrodollars qui dirigent le pays et lui donnent sa substance et sa stabilité. Les institutions, des coquilles vides, ne sont là que comme garniture pour rendre le « gâteau » appétissant. « Le pétrole est l’excrément du diable, il corrompt les pays et pervertit les décisions économiques » Juan Pablo Perez Alfonzo le père fondateur de l’OPEP Venezuela 1970