Dimanche 24 février 2019
Ya si Boumédiene !
Le Président Macron veut définitivement contrôler les injures, menaces et insultes sur Internet, particulièrement sur les réseaux sociaux. C’est l’une des frontières de liberté totale qui reste hors du droit (dans une grande partie de son expression), dans sa régulation comme dans les sanctions pénales et civiles. En finira-t-on avec l’anonymat ?
Lorsqu’un internaute, en bas de mes articles, avec le grand courage de l‘anonymat, commence par « Ya si Boumédiene ! », c’est la certitude d’une avalanche d’insultes à mon égard. Ce qu’il y a de certain avec ce genre de personnages est qu’on n’est jamais déçu, il ont une signature ADN qui correspond à la sémantique utilisée, dès la première phrase.
Il y en a même un, un forcené des bas de mes articles, un résident permanent des zones d’ombres qui titre ses posts par « Encore Bousila ! ». Bousila, je trouve ça sympa comme patronyme mais, hélas, la syntaxe et le vocabulaire qui suivent sont d’un français digne de nos illettrés des années 50, l’intelligence et l’éducation en moins.
Il y en a un autre (peut-être le même, allez savoir avec l’anonymat !) qui, comme la mouche du coche, ne me lâche jamais et rédige ses posts avec un humour éculé et lourd, qui ne fait rire que lui, c’est à dire en mélangeant le français avec un peu d’arabe, le tout avec beaucoup de tournures populaires comme « Ji soui sourpri de tui » Des tonnes et des tonnes de baragouinages, ça l’amuse, que nous utilisions lorsque nous étions gamins, en Algérie. Cet énergumène a quarante ans de retard et, surtout, c’est la plus vieille technique pour dissimuler un français déplorable sous le couvert de l’humour linguistique.
Et je laisse de côté tous les autres obsessionnels qui me répondent toujours avec leur vocabulaire de combat nationaliste (croient-ils !). Je pourrais parler de la sexualité des insectes du temps précolombien au Pérou septentrional qu’ils me répondraient toujours avec le même argument nationaliste, raciste et certainement hors sujet.
Mais revenons à notre propos car tout cela est en parfaite ligne avec le coup d’arrêt que souhaite le Président Macron et que d’autres n’ont pas osé ou réussi réglementer.
Car au-delà de mes ridicules commentateurs, il y a de graves problèmes, bien plus dramatiques. Des jeunes scolaires se suicident suite au harcèlement anonyme sur les réseaux sociaux, des « fake news » déstabilisent l’information et donc, les démocraties. Des déversements de boue et d’horreur alimentent le racisme et la plongée dans un monde des plus barbares et dangereux comme la propagande islamiste et de bien d’autres comme les révisionnistes, les partisans de la thèse du complot et les « anti-tout ».
Le débat pose les deux écueils que l’on retrouve indéfiniment lorsqu’on parle des libertés dans les démocraties. Trop réglementer étouffe cette liberté, la laisser faire sans règles crée la jungle et détruit les démocraties.
Tout repose essentiellement sur le problème de l’anonymat qui permet tous les excès sans en assumer les responsabilités, ce qui est une définition parfaite de la lâcheté intellectuelle. La réponse des démocrates est très ancienne, l’anonymat ne saurait couvrir la responsabilité de ceux qui enfreignent les règles de la démocratie.
Ils ont toujours accepté que l’anonymat puisse protéger ceux qui militent contre les dictatures et qui ne sont pas en mesure de lui échapper, notamment par une résidence à l’intérieur. Ainsi, lorsque je suis violent contre le régime militaire algérien et ses acolytes, ils n’auraient effectivement pas la même protection territoriale et de droit, ce qui les légitimeraient dans leur anonymat.
Mais les protagonistes du « Ya si Boumédiene » me répondent dans des médias qui sont tous dans la liberté d’expression puisque sur Internet et, d’ailleurs, ils n’ont aucun risque à lever l’anonymat lorsqu’ils n’insultent pas le régime politique en place mais une personne qui s’en prend à lui.
L’anonymat est une plaie et une lâcheté sans nom, elle ne pourra plus longtemps s’exercer dans des territoires et des supports qui sont dans le périmètre du droit et de la démocratie.
Je ne vois absolument pas pourquoi, lorsqu’un internaute dérape sur Internet, il aurait plus le droit de le faire que lorsque l’insulte est proférée dans un livre, un journal, un discours ou une œuvre cinématographique.
Je ne réponds jamais individuellement aux lâches mais je leur rappelle collectivement que moi, j’assume mes propos. Je m’appelle Sid Lakhdar Boumédiene, marié et deux enfants, enseignant à Paris, résident depuis 43 ans.
Alors sortez des caniveaux des bas des articles, mettez-vous sous la lumière pour me regarder en face, écrivez des articles dans le haut de la page. Il est vrai que lorsque vous quitterez les ténèbres de l’anonymat, il faudra signer de votre nom, rédiger en bon français, avoir une idée de développement et des arguments et, surtout, prendre ses responsabilités juridiquement.
Dans ces conditions, vous serez assez dignes pour débattre avec moi. Et, franchement, si vous êtes d’un service obscur de l’État, le recrutement et la formation laissent à désirer.