Dimanche 14 juin 2020
14 juin devoir de mémoire : non et non à l’impunité !, appelle RI
Riposte internationale (RI) a rendu publique une déclaration à l’occasion de la célébration de la marché du 14 juin 2001 des archs de Kabylie à Alger.
14 juin 2001-14 juin 2020. Près de 20 années déjà que l’irréparable s’est produit. Alors que toute la Kabylie et une partie de l’Algérois s’apprêtaient à commémorer dans le calme le printemps 1980, une nouvelle vint terrasser tous les militants. Âgé de 19 ans, Massinissa Guermah rendit l’âme à l’hôpital Mustapha où il fût transféré par les siens après avoir reçu, lâchement, une rafale de kalachnikov au cœur de la brigade de gendarmerie des At Dwala.
Au lieu de demander pardon au nom de l’État, Noureddine Yazid Zerhouni alors ministre de l’intérieur, traita la jeune victime, un brillant lycéen, de voyou. Et le général Ahmed Boustila commandant la gendarmerie à l’époque, répondit aux manifestations d’indignation de la population en ordonnant à sa troupe de ne pas faire de quartier. Le résultat est tragique : 127 jeunes sont tombés sous les balles assassines des gendarmes, la 128ème victime mourût quelques semaines plus tard et près de 5000 blessés trainent encore des traumatismes irréparables. Quant à Zerhouni et Boustila, leur crime est, à ce jour, resté impuni.
L’arrogance des hommes du système ne s’arrête pas là puisque le premier, Zerhouni, vit bourgeoisement, à l’heure actuelle, au Canada et le second, Boustila, est mort en 2018 paisiblement dans un hôpital parisien après avoir reçu les meilleurs soins d’une France hypocritement décriée et présentée comme une main étrangère par les oligarques militaro-mafieux algériens qui cherchent à discréditer les luttes du Hirak.
Le 14 juin 2001, le peuple algérien de Kabylie s’est dressé comme un seul homme et est allé protester sur Alger pour dire, à la face du pays et du monde, non à cette répression sans retenue, non à l’impunité, non au déni identitaire, non au système despotique. Plus de deux millions de personnes se rendirent pacifiquement dans leur capitale pensant se faire entendre cette fois, pensant pouvoir remettre la plateforme d’El-Kseur, où sont inscrites les revendications légitimes de la région.
Au lieu de rendre justice aux familles des victimes, au lieu d’inaugurer une politique de l’écoute, le pouvoir de Bouteflika, son chef de gouvernement Ali Benflis et le chef d’État-major des armées Mohamed Lamari ont préféré répondre par le mépris et la brutalité. Forces de répression, groupes de baltadjis recrutés de façon ad hoc sont lâchés pour taper aveuglement dans la foule. L’instinct bestial et raciste inculqués à ses troupes hétéroclites depuis la guerre contre le FFS (1963-65) a fait le reste.
Une chasse au Kabyle sans retenue dura toute la journée et toute la nuit. Des morts, des blessés dont le bilan exact est à ce jour occulté. Ce qui devait être le printemps de l’espoir devint le « Printemps Noir ».
Comme chaque année, nous nous recueillons à la mémoire des victimes et ne cessons de réclamer que justice passe. Ce devoir est pour nous, Riposte Internationale, une obligation morale et c’est au nom de notre ONG que nous nous inclinons, aujourd’hui, devant tant de victimes, tant de familles en souffrance qui ne peuvent faire leur deuil étant donné le déni qui entoure toujours cette tragédie. Un déni accompagné du refus maladif de reconnaître le droit des Amazighs à disposer librement de leur culture, de leur langue et de leur Histoire.
Ce devoir de mémoire est d’autant plus important aujourd’hui que le comportement du pouvoir, de sa police politique, de ses forces de « l’ordre » n’a pas changé. Le déni des morts et des violences perpétrés en Kabylie, au Mzab et dans toute l’Algérie durant la décennie noire a ouvert la voie à la politique répressive récurrente, aux arrestations et condamnations qui se multiplient, à la délinquance institutionnelle devenue culture du pouvoir.
Le Hirak, véritable réplique nationale du 14 juin 2001, ne cessera pas tant que dure la machine à fabriquer le malheur, tant que se maintient en place le système mortifère. Il est le seul à même de mettre fin au cumul des calamités qui menacent de rendre ce chaos durable voire irréversible. La misère s’accroît, la pandémie s’amplifie et comme seule réponse à cette tragédie, le pouvoir instrumentalise la justice pour étouffer les lanceurs d’alerte.
Riposte Internationale considère que le moment est venu pour que cette leçon du 14 juin 2001 se traduise en un ressaisissement collectif national dans le respect des différences politiques, religieuses, culturels, linguistiques, Cela exige de nous une stratégie intelligente libérée des dogmes et des certitudes du passé. Une rupture fondatrice est possible et elle ne viendra sûrement pas d’en haut, elle viendra de nous toutes et tous. La lutte pour la démocratie et pour une Algérie nouvelle nous y oblige.
Gloire à nos martyrs de l’indépendance,
Gloire à nos martyrs de la démocratie
Gloire aux militants du Hirak