France‑Algérie : tensions autour du versement des pensions des retraités

0
609
Les retraités algériens au cœur de la tempête franco-algérienne.
Les retraités algériens au cœur de la crise franco-algérienne.

Le dossier des pensions des retraités algériens vivant en France refait surface, provoquant un débat politique et diplomatique entre Paris et Alger. Au centre des discussions : l’application de la Convention de sécurité sociale franco‑algérienne signée en 1980, qui coordonne les droits à la retraite des travailleurs des deux pays.

Des droits contestés par l’Algérie

Selon certains parlementaires français, l’Algérie ne verse pas systématiquement les pensions aux retraités résidant en France. Le pays invoquerait le principe de territorialité : seuls les bénéficiaires qui reviennent s’installer en Algérie percevraient leurs droits. Ce positionnement laisse de nombreux retraités, pourtant éligibles selon la législation algérienne, sans versement.

Pour la France, cette situation constitue un manque de réciprocité. Chaque année, l’État français verse près d’un milliard d’euros à des retraités français vivant en Algérie, soit 361 771 bénéficiaires selon les données du CLEISS. De nombreux parlementaires estiment que l’absence de transferts équivalents de la part de l’Algérie crée un déséquilibre, tant sur le plan économique que social.

- Publicité -

Conséquences sociales et financières

Cette situation pourrait avoir des répercussions concrètes. Les retraités algériens résidant en France, privés de leurs pensions, risquent de solliciter l’aide sociale française, ce qui représenterait un coût supplémentaire pour l’État. Selon certaines estimations, ces dépenses pourraient peser sur le budget des prestations sociales si aucune solution n’est trouvée.

Parallèlement, les autorités françaises ont renforcé les contrôles pour les pensions versées à l’étranger, afin d’éviter les fraudes. Environ 60 000 retraités algériens par an seront convoqués à partir de 2026 pour prouver leur existence. Ces contrôles ont été critiqués par des associations comme ciblant principalement les Algériens, alors que d’autres ressortissants étrangers percevant des pensions à l’étranger ne sont pas soumis au même niveau de vérification. Cette spécificité alimente un sentiment de stigmatisation et de discrimination.

Un contexte diplomatique en crise

Le dossier des retraites s’inscrit dans un climat bilatéral plus large. Paris et Alger connaissent des tensions sur plusieurs fronts : coopération migratoire, gestion des visas et application de la réciprocité dans les accords sociaux. Dernier cran de tension : la loi criminalisant la colonisation française, votée par l’APN la semaine dernière. Alger insiste sur le respect strict de sa législation et du principe de réciprocité pour tout Français ou binationaux percevant des droits en Algérie.

Cette polémique reflète également les enjeux politiques internes en France. Certains partis, notamment le Rassemblement national, utilisent ce dossier pour dénoncer un déséquilibre perçu dans les accords franco‑algériens et plaider pour une renégociation des conventions sociales et migratoires.

Des chiffres et faits à connaître

361 771 pensions versées par la France à des retraités vivant en Algérie chaque année. Soit environ un milliard d’euros dépensés annuellement par la France pour ces retraites.

Les fraudes potentielles sur les pensions versées à l’étranger sont estimées entre 40 et 80 millions d’euros, alors que le taux réel de fraude serait inférieur à 5 %.

Environ 60 000 retraités algériens par an soumis à des convocations administratives à partir de 2026, un dispositif qui ne concerne pas la majorité des autres ressortissants étrangers.

Au‑delà de l’aspect financier, le dossier des pensions illustre les défis de l’équilibre entre législation nationale, accords bilatéraux et enjeux sociaux entre les deux pays. Tant que Paris et Alger ne clarifieront pas leurs positions, les retraités concernés resteront au centre d’un bras de fer diplomatique et politique, avec des conséquences directes sur leur vie quotidienne.

Le débat, qui mêle droits sociaux, souveraineté et obligations internationales, devrait rester au cœur de l’actualité franco‑algérienne dans les prochains mois, avec des implications pour les retraités, les administrations et la relation bilatérale.

Mourad Benyahia 

LAISSEZ UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici