Il y a de nombreuses façons de rendre hommage à El Hachemi Cherif, car la réflexion et les débats ne s’arrêtent pas à une journée symbolique, pas plus qu’ils ne s’arrêtent au 02 août, date de sa disparition.

C’est à la lumière de ses actions et de ses réflexions qu’on comprend le mieux sa personnalité et sa réalité sur le terrain. Son engagement politique et sa production intellectuelle étaient au service d’une Algérie juste,sociale, solidaire, égalitaire et moderne. Toute sa vie durant, il avait produit une pensée originale : la double rupture.  

A l’origine de sa pensée, se trouve la question historique de savoir comment conduire jusqu’à son terme le processus de modernité et d’émancipation de l’Algérie et comment favoriser l’émergence des conditions de ruptures et d’ouvertures. El Hachemi était dans le présent tout en ayant une  vue sur le futur et s’opposait ainsi farouchement aux forces conservatrices. Son engagement était resté la bête noire du système rentier et de l’islamisme politique.   

L’enfant de Toudja avait compris que les faits de rupture et de résurgence sont tels qu’ils modifient les conditions du militantisme. Non seulement il faut approfondir l’examen critique, mais il faut mesurer l’impensé qui s’accumule du fait de l’avancée continue de la pensée conservatrice et islamiste au moment ou l’intelligence des mouvements progressistes oublient ses propres conquêtes. Celles-ci étaient pourtant assez substantielles pour rendre accessibles les événements intellectuels liés aux mouvements de la renaissance et de la philosophie des lumières. Ce qui le mena à œuvrer pour le dépassement de la classe politique, devenue selon ses propres propos obsolète et inaudible.   

Ses réflexions témoignent de la façon dont se forgent, se déterminent, se développent et se cristallisent les attitudes et les conceptions d’un vaste mouvement islamiste, conservateur et archaïque à la fois au sein du système et dans la société algérienne.

Il chercha inlassablement les modes d’élaboration et leur logique afin de comprendre pourquoi et comment des représentations s’imposent comme dominantes. Ces dernières ne sont pas figées, elles évoluent et se renouvellent en fonction d’un ensemble de facteurs et des rapports de forces. Leur pertinence tient à ce qu’elles déterminent en partie ces contacts.   

El Hachemi fut une figure emblématique, une opinion éclairée et un pionnier actif dans le combat visant à arracher le pays à tutelle despotique. Il occupe une place éminente et joue un rôle décisif dans le combat contre la théocratie ouvertement annoncée et assumée par le parti religieux totalitaire. 

Il fut en son temps, le représentant digne et authentique de l’Algérie combattante, osant revendiquer haut et fort, ouvertement, publiquement et quoi qu’il en coûte, une Algérie moderne, démocratique et sociale, entière et inconditionnelle, pendant que d’autres, plus soucieux de leur sécurité ou confort personnels, de leur statut social ou de leur avenir politique, s’évertuaient à chercher vainement la perspective du changement du système de l’intérieur et à réclamer des réformes politiques et sociales.  

El Hachemi Cherif nous a légués une œuvre inachevée qu’il s’est lui-même efforcé de tisser au cours d’une vie intense, mouvementée, risquée et, finalement inouïe. Pour lui, la lutte de libération nationale ne s’achève pas avec la reconquête de la souveraineté territoriale, elle se prolonge dans l’effort de construction nationale de sorte que l’idéologie de combat pour la modernité conserve sa rigueur prioritaire !